Etre ensemble et soi-même, est la devise de la Comédie-Française, qui sert de fil conducteur à la programmation imaginée par la directrice des trois salles, Muriel Mayette, pour qui la Comédie Française "pose avec acharnement la question du métissage des êtres, des écritures, des
cultures". Ainsi sont proposés 22 spectacles, dont 15 créations dans les trois salles.
Salle Richelieu, la saison s’ouvre le 22 septembre 2007 par une nouvelle mise en scène du Mariage de Figaro de Beaumarchais, confiée à Christophe Rauck, directeur du Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis. Pour lui, la modernité de l’auteur se lit dans" les questions sociales, notamment de la condition féminine et des rapports entre dominants et dominés" et l’on retrouvera certainement cette générosité et liberté de ton qui ont marqué son travail précédent. Le 8 décembre, c’est un jeune metteur en scène lituanien, Oskaras Korsunovas qui poursuit son exploration de l’univers shakespearien et propose une nouvelle mise en scène de La Mégère apprivoisée . Le 26 janvier, le mythe de Penthésilée , relaté par Homère et repris par Heinrich von Kleist fait son entrée au répertoire, mis en scène par Jean Liermier, séduit par la langue fiévreuse de Kleist et le thème de l’amour fou et destructeur. L’oeuvre de Jean-Luc Lagarce, décédé en 1995, explore les thèmes du retour, de la disparition, de la perte et de la difficulté à communiquer. Sa pièce Juste la fin du monde fait son entrée au répertoire, le 1er mars 2008, et c’est Michel Raskine qui en signe la mise en scène, abordant "ce chef-d’oeuvre du théâtre d’aujourd’hui" comme un théâtre de tréteaux. Don Quichotte , chevalier errant et Sancho, son écuyer, font leur entrée au répertoire, le 19 avril 2008, dans le texte d’Antonio José da Silva, un des auteurs de la dramaturgie baroque portugaise les plus importants. C’est à une marionnettiste que la direction a fait appel pour la mise en scène. Emilie Valantin offre à la troupe l’occasion d’expérimenter le travail avec des marionnettes. La dernière entrée au répertoire de la saison prochaine, le 31 mai 2008, célèbre l’un des plus grands dramaturges du XX°siècle, le Hongrois Odön von Horvath, avec sa pièce Figaro divorce . Tamas Ascher, metteur en scène hongrois, invité dans les grands théâtres d’Allemagne et d’Europe centrale, mettra son talent au service de cet auteur, dont il a monté plusieurs pièces.
La salle Richelieu offre par ailleurs quelques belles reprises : Pedro et le Commandeur de Lope de Vega, dans la très belle mise en scène d’Omar Porras(27.9-29.12.07), Le Malade imaginaire de Molière, mise en scène par Claude Stratz (4.9-26.12.07), les Fables de La Fontaine , dans la très poétique mise en scène de Robert Wilson (17.10-fin janvier 2008) et Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand dans l’émouvante mise en scène de Denis Podalydès.
Au Théâtre du Vieux-Colombier, le rideau se lève (19.9-27.10.07) avec les comédiens et chefs de troupe François Chattot et Jean-Louis Hourdin, qui s’emparent de six farces médiévales inédites, avec cinq acteurs de la Comédie-Française et cinq du Jeune Théâtre national et de la Région de Bourgogne, accompagnés d’un musicien, réinventant toutes les solutions théâtrales, pour faire revivre ces merveilles. Du 27 septembre au 18 novembre 2007, au Studio-Théâtre, Jean Liermier choisit de mettre en lumière la modernité de Marivaux et des Sincères , qui confronte la vérité d’un amour à l’épreuve de la réalité sociale et humaine. Le metteur en scène anglais Dan Jemmett, invité pour la première fois à la Comédie-Française s’attaque aux Précieuses Ridicules de Molière (14.11-29.12.07), avec la jubilation du théâtre des tréteaux, ramenant le nombre des comédiens de neuf à six et modernisant le piquant de la satire en s’inspirant du monde de la mode, forme moderne du snobisme et de l’apparence.
Rénovateur du théâtre et fondateur, en 1913, du Théâtre du Vieux-Colombier, Jacques Copeau est à l’honneur sur la scène du Vieux-Colombier. C’est Jean-Louis Hourdin, digne héritier de Copeau qui défend un théâtre populaire de qualité, qui compose un spectacle, à partir de textes de Copeau (16.1-26.1.08). Le théâtre du Vieux-Colombier accueillera deux nouvelles entrées au répertoire : Bonheur ? d’Emmanuel Darley, que mettra en scène l’Espagnol Andrés Lima, dont le travail repose sur l’improvisation et déborde d’humour et d’énergie (26.3-27.4.08). Yerma de Garcia Lorca est également joué pour la première fois à la Comédie-Française. Vicente Pradal, familier de l’oeuvre de Lorca associe aux comédiens deux musiciens et chanteuses, pour illustrer et faire vivre ces émotions profondes (20.5-29.6.08).
Signalons encore sur la scène du Théâtre du Vieux-Colombier, les samedis à 16h, cinq sociétaires honoraires de la Comédie-Française participent à Portraits d’acteurs, évoquant leur parcours, leurs regards présents sur leur art et leur domaine : Jean Piat (6 octobre), Françoise Seigner (8 décembre), Jacques Sereys (1er mars 2008), Micheline Boudet (19 avril 2008), Geneviève Casile (31 mai 2008). Six acteurs du Français investissent, quant à eux, le plateau du Studio-Théâtre ; une carte blanche leur est confiée, qui peut prendre les formes les plus disparates.
Le poète René Char est aussi célébré dans la salle Richelieu, avec une soirée le 19 octobre, intitulée Conversations . La Comédie Française ne veut pas rester cloisonner dans le seul univers théâtral et, pour créer un art en phase avec son monde et son temps, propose une série de grands débats au Théâtre du Vieux-Colombier : jusqu’où montrer le corps (20.10.07), les classiques, des textes à défigurer (24.11.07), du sang et de la violence au théâtre (23.2.08), le théâtre est-il encore en phase avec la société (5.4.08), existe-t-il des pièces dangeureuses (14.6.08). Mais les innovations ne s’arrêtent pas là : vous pourrez assister à des cours magistraux sur le travail de l’acteur, la pratique du théâtre mais aussi des soirées cabarets sont prévus au Studio-Théâtre (17 au 28 octobre, et du 9 au 20 janvier 2008, à 20h30).
Last but not least,réservez la soirée du 15 janvier 2008, au cours de laquelle un hommage est rendu à Molière, pour son trois cent quatre-vingt-sixième anniversaire. Hier comme aujourd’hui, c’est une troupe solidaire d’acteurs différents et talentueux qui vous invite à réfléchir mais aussi à vous amuser.
Régine Kopp