Arts-Scènes
Slogan du site

Cinéma Danse Expositions Musique Opéra Spectacles Théâtre

Forum de Meyrin : saison 2007-2008
Genève : Forumeyrin
Article mis en ligne le octobre 2007
dernière modification le 21 octobre 2007

par Firouz Elisabeth PILLET

Salle emblématique de la Ville de Meyrin, ouverte à une programmation dense, diversifiée et avant-gardiste depuis l’arrivée de Mathieu Menghini, le Forum de Meyrin alterne spectacles de danse, théâtre, musique, spectacles destinés aux familles, mais aussi des expositions, des causeries, des débats et des films, le tout articulé autour des grands thèmes qui viennent complémenter la saison présentée sur scènes.

En avant-propos du programme, le directeur, Mathieu Menghini et son assistante, Dominique Rémy, annoncent avec conviction : « La saison 07/08 se veut le miroir de notre Temps par la parole donnée aux artistes contemporains (Levin, Mouawad, les frères Dardenne) et l’attention accordée aux formes nouvelles (on pense aux univers singuliers des Nadj, Caubère, Solal, Montalvo-Hervieu. Mais elle sera aussi le miroir de l’intemporel patrimoine de l’art dramatique (Shakespeare, Racine, Tchekhov), cinématographique (Murnau, Bergman) et musical (Mozart, Stravinsky).

Saison à thèmes
Liant avec dextérité et homogénéité des artistes fraîchement découverts et des valeurs confirmées, la nouvelle saison s’articule autour de trois grands thèmes répartis dans l’année :
Un premier thème consacré à la reine des sentiments, l’Amour avec Tracas d’Eros. Ce premier thème de l’année, réalisée en collaboration avec la Fondation Maurice et Noémie de Rothschild, s’ingénue à explorer les multiples facettes de ce sentiment universel. Entre ébats et tracas, l’Amour permet-il l’épanouissement de l’être ou le condamne-t-il à museler sa liberté ? Pour interroger cette faculté étrange – qui nous balance entre souffrances et voluptés – le Forumeyrin suivra la trajectoire d’amants heureux ou déplorables, passionnés ou apaisés, incestueux ou romantiques. De l’amour/haine déclamés en vers de Racine ( Phèdre ) au texte incisif et bien de trempé de Levin ( Une laborieuse entreprise ), en passant par l’amour expliqué aux enfants ( L’Histoire du Rat ) ou l’amour du corps, par le corps et pour le corps – Paysage après l’orage et Woycek ou l’ébauche du vertige , de Josef Nadj –, l’amour sera aussi sujet d’une causerie lors d’une rencontre avec Claude Kaufmann. Sans cesser d’être exigeant, le Forumeyrin accordera une place importante à la dimension populaire et festive du spectacle en rendant hommage à la tradition foraine, comme par exemple, en accueillant La Cucina dell’Arte du Circus Ronaldo. Parallèlement aux divers spectacles liés à cette thématique se déroulera, en septembre et en octobre, une exposition, Les Météorites de l’Amour .
Un second thème, Tripalium ou le travail en question, accordera son attention à une valeur atemporelle et universelle de l’être humain. Arbeiten, to work, trabalhar, lavorare, trabajar, décliné dans toutes les langues, ce thème unit, mais parfois, oppose les hommes. L’importance du travail tient à ce qu’il assure un statut social, donne accès à la consommation et représente, parfois, l’unique espace de socialisation. L’activité laborieuse peut toutefois s’avérer un facteur de dégradation du corps, de servitude de l’esprit, d’abnégation et de résignation grégaire. Se trouvent alors réactualisées l’interprétation étymologique du mot « travail » (tripalium : instrument à trois pieux utilisé lorsque l’on soumettait quelqu’un à la question) et celle de la Bible. Pour avoir voulu goûter au fruit de l’Arbre de la Connaissance, Adam se voit condamné à « produire son pain à la sueur de son front » et Eve « à enfanter dans la douleur.
A travers le temps, du Roi Lear , de Shakespeare, à Cul de Sac , du Téatréprouvette, en passant par La Mouette , de Tchekhov, le travail sera aussi exposé aux enfants avec La Bossa Fataka de Rameau . Lors d’une rencontre avec Robert Castel ( Les Métamorphoses du Travail ), il sera temps de méditer à ce sujet qui nous concerne tous de très près, voire parfois de trop près.

Bossa Fataka De Rameau /Montalvo-Hervieu, photo Laurent Philippe

Mort et sens de la vie
Un troisième et ultime thème, Infinita ou la Mort tutoyée, un thème passionnant et parfois difficile d’abord, présenté ici de manière très exhaustive, grâce à cette approche pluridisciplinaire propre au Forumeyrin. Quoi de plus commun que la mort ? Quoi de plus mystérieux aussi ? Face à ce rendez-vous inscrit pour tous, ce passage inéluctable, nous tanguons entre prostration dépressive et exaltation vitale. Tutoyant la mort, cette thématique en viendra paradoxalement à interroger le sens de la vie. L’une ne va pas sans l’aute, évidemment.
La Mort sera abordé sous toutes dimensions lors d’une rencontre avec Marie de Hennezel, La Mort intime . Expliquée au jeune public, lors d’une création de la Compagnie Alias, L’Ange du Foyer , incite les spectateurs à replonger dans la période de l’enfance. Autre spectacle pour enfants, La Barbe bleue , héritage de notre patrimoine commun, un classique de la littérature, qui initie dès le plus jeune âge l la mort. Autre pièce désopilante, Infinita commence pourtant par un deuil, et sera l’occasion d’accueillir la Compagnie Familie Flöz (Allemagne). Après le cinéma, Patrice Leconte porte sur les planches Confidences trop intimes , qui en lieu et place de Sandrine Bonnaire et Fabrice Lucchini, recevra le tandem formé par Christophe Malavoy et Florence Darel. Côté festif, la Mort a sa place, avec Bridge , par le théâtre National de Chine et la Compagnie Akram Khan. L’Andalousie du Xxe siècle, évoquée par le Anouar Brahem Trio, ou la chanson à textes, avec Juliette, passera au crible des ces textes poétiques la mort, mais aussi l’amour, la farce, la passion, les crimes, la haine, les déviations, les marginaux.
Tout au long de la saison se succèdent des ateliers (expression théâtrale, éveil musical, danse contemporaine, corps et costunes, écriture), des causeries et débats, et des expositions. Une Installation photographique de Gérald Minkoff et Muriel Olesen se consacre à la mise en scène du hasard du désordre du lit qu’ils viennent de quitter. Grands voyageurs, ils s’en prennent surtout aux lits d’hôtels, échappatoire pour éviter de sombrer dans la routine et la lassitude du lit du couple.
Un programme bigarré, alléchant, qui ne demande plus qu’à être agendé.

Firouz-Elisabeth Pillet

www.forum.meyrin.ch, (022) 989 34 00