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Théâtre de l’Orangerie
Entretien : Frédéric Polier

Coup d’œil sur l’été au Théâtre de L’Orangerie.

Article mis en ligne le juillet 2010
dernière modification le 18 août 2010

par Catherine GRAF

Cette année, le programme du théâtre de l’Orangerie proposera quatre spectacles, et débutera le 12 juillet pour se terminer le 18 septembre. Comme l’été dernier, les représentations seront données dans un lieu magique, à savoir la Tour vagabonde.

Frédéric Polier, vous êtes un fin connaisseur de Shakespeare puisque vous l’avez interprété à de nombreuses reprises et également mis en scène. Pourquoi ce choix de Henry IV ?
Certaines pièces sont sans cesse montées, comme Richard III, d’autres très connues comme Henry V de Kenneth Branagh. Il faut se souvenir que ces pièces ont été écrites dans le désordre, les derniers épisodes ont été composés avant les premiers. Ils ont bien sûr aussi des couleurs différentes. Pour Henry IV, la deuxième partie a été écrite pour Falstaff et la contraction de ces deux parties en une seule pièce a déjà été tentée par Valère Novarina et d’autres. C’est une pièce qui nous fait réfléchir sur la nature du pouvoir, sans tomber ni dans la moralisation ni dans la schématisation qui sont les plaies du théâtre politique. La trame de ma mise en scène est donc le parcours de Falstaff, qui sera magnifiquement interprété par Louis Sandoz, et le titre provisoire est un clin d’œil irrévérencieux, bien évidemment.

Quels sont les traits marquants de la figure de Falstaff ?
Ce personnage a remporté dès sa création un immense succès, éclipsant les figures historiques auxquelles il donne la réplique. Il semble concentrer tous les vices : il est veule, égoïste, menteur, ivrogne et même libidineux. Il atteint parfois les sommets du ridicule. Mais par ses côtés à la fois pitoyables et comiques, il rejoint les tréfonds de la condition humaine et de ce que nous refoulons. Il se tire parfois des pires situations par une pirouette très réjouissante.

Frédéric Polier
Photo Isabelle Meister

Son credo est la conservation de soi, qu’il oppose au code d’honneur de la chevalerie. « L’honneur remet-il une jambe ? Un bras ? Non ! Ou supprime-t-il la douleur d’une blessure ? Non ! Alors l’honneur n’a pas de compétence chirurgicale ? Non ! Qu’est-ce que l’honneur ? Un mot. … Du vent [….] L’honneur n’est qu’un écusson funéraire ». Henri IV,V, 1
La mort fait cesser toute possibilité de jouissance, voilà qui heurte le pragmatisme de Falstaff ! Ce bouffon qui fréquente plutôt la plèbe tente de s’assurer un avenir à l’abri du besoin, par ses liens avec le Prince, pour qui il tient un peu le rôle de père de substitution, mais un père copain. Par ailleurs ce lâche n’aura aucune solidarité avec ses camarades de beuverie qu’il propose bientôt comme chair à canon.

Le cadre de la Tour vagabonde soutient votre mise en scène …
C’est un lieu tout à fait magique, inspirant, on peut dire que c’est un lieu shakespearien par excellence.

Une pièce historique est-elle un piège ?
Vous l’aurez compris, je n’ai pas l’intention de recréer une mise en scène fidèle à l’histoire – laquelle d’ailleurs ? – qui axerait sa pertinence par exemple sur un décor ou des costumes exacts au bouton près. On est bien plus dans l’esprit que dans la lettre. Le contexte se veut plus atemporel.

Vous jouez sur les parallèles ?
Absolument. On perçoit dans cette pièce un va-et-vient incessant entre deux mondes, le monde politique et le monde du peuple à la veine comique. Des scènes d’auberge, d’ivrognerie, sont mises en symétrie avec des épisodes de préparation de batailles ou de discussions diplomatiques. Il y a un grand contraste temporel entre eux : les seconds ont une perception quasi chirurgicale de l’urgence de ce qu’ils doivent accomplir, les premiers jouissent pleinement du temps présent et se laissent complètement aller.

L’Orangerie offre un été riche de contrastes, donc …
Oui ; la saison commence avec un gros rigolard, continue avec des thématiques fascinantes, les non-dits des Vieilles Malles poussiéreuses soutenus par une composition musicale très inventive, un excellent Novecento, et termine avec un maigre torturé, Hamlet !

Propos recueillis par Catherine Graf

Programme du Théâtre de l’Orangerie :
 « Falstaff ou les infortunes d’un ventru », d’après Henry IV 1ère et 2ème parties, du lundi 12 juillet au lundi 2 août à 20H.
 Les vieilles malles poussiéreuses que nos parents nous ont défendu d’ouvrir, du mardi 10 au mardi 31 août 21H., mise en scène Camille Giacobino.
 Novecento : Pianiste, mise en scène Denis Rabaglia, à 18H. du jeudi 19 au dimanche 29 août.
 Hamlet, du 10 au 18 septembre à 19H30, mise en scène Eric Salama