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A La Chaise-Dieu et à La Côte-Saint-André
Chaise-Dieu & Côte-St.André : Festivals

Rendez-vous à La Chaise-Dieu, l’un des plus beaux festivals qui soient, et à La Côte-Saint-André, pour célébrer Berlioz.

Article mis en ligne le octobre 2009
dernière modification le 17 décembre 2009

par Christian WASSELIN

Se rendre dans un festival, c’est toujours espérer découvrir ou retrouver un lieu, une atmosphère, ou bien répondre au rendez-vous pressant d’un artiste, qu’il soit créateur ou interprète.

A cet égard, le Festival de La Chaise-Dieu, qui en était l’été dernier à sa 43e édition, ne déçoit jamais. Il a beau se décentraliser au Puy, à Chamalières ou à Brioude, c’est toujours vers l’abbatiale Saint-Robert qu’on revient, dont l’architecture gothique de style languedocien surbaissé est peut-être l’une des raisons qui en rendent l’acoustique aussi naturelle, aussi apte à faire vibrer la musique.
La Chaise-Dieu, cet été, c’était une trentaine de concerts auxquels il faut ajouter des sérénades gratuites, des conférences, etc. bref, un éventail de manifestations permettant d’entendre aussi bien l’Octuor de Hummel que la Symphonie des mille de Mahler, un audacieux programme Britten-Dowland-Dusapin (par la mezzo Juliette de Banes Gardonne, le guitariste Philippe Mouratoglou et le clarinettiste Jean-Marc Foltz) que Cosi fan tutte (en version de concert), avec des interprètes choisis comme le Collegium 1704 de Vaclav Luks (qui a ressuscité le Requiem pour Auguste II de Zelenka), l’Ensemble Doulce Mémoire ou encore l’orchestre Anima Eterna de Jos van Immerseel, qui promettait une redécouverte de deux symphonies de Beethoven.

Jos van Immerseel
© Dirk Vervaet

D’autres interprètes, sans atteindre au même degré d’exigence, sont des familiers du festival. Le Chœur de l’Académie nationale et la Philharmonie de Kiev, sous la direction de Mykola Dyadyura, proposaient cette année deux grandes partitions dont l’une a fait son entrée à La Chaise-Dieu : la Huitième Symphonie, appelée « des Mille », qui a trouvé là un cadre à sa mesure, même si on peut déplorer que l’orgue de l’abbatiale (certes, du XVIIIe siècle) n’ait pas été utilisé, et que les chœurs d’enfants aient été un peu perdus dans la masse des interprètes. Pour apprécier l’interprétation de cette œuvre par Dyadyura, il faut la comparer à la manière dont il aborde le Requiem de Verdi. Dans les deux cas, une mise en place irréprochable, un raffinement relatif. Mais autant il est aisé de trouver un style pour le Requiem, mélange de lyrisme et de mysticisme, autant la symphonie de Mahler exige une tout autre imagination. On en connaît l’agencement : un Veni Creator en latin puis, deux fois plus longue, la dernière scène du Second Faust de Gœthe, en allemand donc, qui se révèle à l’écoute une vaste succession de lieder aux lumières changeantes, où deux solistes en particulier se sont fait remarquer : la lumineuse Alla Rodina en Pénitente et le ténor Dmytro Popov, qui a tendance à en faire trop dans les tutti mais tout à coup trouve les couleurs de Parsifal en Doctor Marianus. Propos déconcertant, musique singulière : la messe de Verdi semble presque rassurante à côté !
On a pu entendre aussi l’impeccable Camerata Ireland du pianiste et chef Barry Douglas, et surtout l’Orchestre français des jeunes, survolté d’enthousiasme sous la direction de Kwamé Ryan. Une soirée mémorable au cours de laquelle on fit de nouveau l’expérience amère de trouver plate et convenue l’œuvre la plus contemporaine du programme (un concerto pour flûte de Marc-André Dalbavie) en regard de l’étrangeté toujours splendide, toujours dépaysante du Mandarin merveilleux de Bartok.
La Chaise-Dieu reste l’un des plus beaux festivals qui soient. Il faut saluer Guy Ramona, président démissionnaire (désormais remplacé par Jacques Barrot), qui en fut longtemps l’âme et le principe, et Jean-Michel Mathé, jeune directeur qui a repris la flamme.

La Côte-Saint-André
Quelques dizaines de kilomètres à l’est, le Festival de La Côte-Saint-André ne dispose malheureusement pas de lieu digne de sa promesse : défendre et illustrer la musique de Berlioz, l’enfant du pays. Cette manifestation, qui est née sur les décombres du Festival de Lyon emmené de 1979 à 1989 par Serge Baudo, utilisait autrefois les belles halles en bois du XIIe siècle. Dorénavant, c’est la cour du Château Louis XI, munie d’une conque, qui est le lieu principalement utilisé – un lieu à l’acoustique imparfaite, alors qu’on sait quelles étaient les préoccupations de Berlioz en ce domaine.

Marc Minkowski & Les Musiciens du Louvre
© Michel Garnier - DG

L’intérêt toutefois était ailleurs, puisque l’édition 2009 du festival était la première du nouveau directeur, Bruno Messina, qui a de l’ambition, des idées, des projets. La présence d’interprètes comme Paul McCreesh et Marc Minkowski est là pour le confirmer. Nous n’avons pu assister qu’au concert de clôture, mais il était lui aussi assuré par des interprètes passionnants : les Chœurs de Lyon et l’Orchestre Les Siècles (sur instruments historiques, avec quatre harpes et les violons I face aux violons II) sous la direction de François-Xavier Roth. Au programme : une Symphonie fantastique racée et, suite naturelle de la symphonie, Lélio ou le Retour à la vie, avec en particulier un ténor idéal de style et de délicatesse, Pascal Bourgeois. On n’en dira pas autant du navrant Charles Berling (qui certes remplaçait Richard Bohringer, défaillant) : en matière d’ânonnements et de susurrements, Gérard Depardieu, qu’on a entendu au printemps dernier dans le même ouvrage, a trouvé là son maître.
Une nouvelle ère vient de s’ouvrir pour le Festival Berlioz : vivement les prochains chapitres !

Christian Wasselin