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Les Jardins Musicaux de Cernier
Entretien : Philippe Huttenlocher

Trois questions à ... Philippe Huttenlocher, baryton.

Article mis en ligne le juillet 2007
dernière modification le 26 juillet 2007

par Pierre JAQUET

Personnalité de la vie musicale romande, et plus particulièrement neuchâteloise, Philippe Huttenlocher évoque ces concerts dont il est une des âmes.

Parlez-nous des « Jardins musicaux » de Cernier.
Depuis des années, je collabore avec Valentin Reymond qui est un vieil ami. Avec lui et avec Maryse Fuhrmann, j’ai contribué à la création, en 1998, des « Jardins Musicaux », et je participe aux concerts depuis l’an 2000. J’apprécie l’originalité du programme ; pouvoir me produire dans un ouvrage de Hans Werner Henze, mais aussi interpréter le Chant de la Terre de Mahler est à mes yeux un privilège. Je suis très fier qu’avec des moyens plutôt limités nous ayons pu faire du grand répertoire, comme la Neuvième de Beethoven. Je ressens avec beaucoup de bonheur l’enthousiasme qui règne tant du côté des organisateurs, des interprètes et du public. Nous avons maintenant un « fonds » de mélomanes très fidèles, qui assistent régulièrement aux manifestations. C’est encourageant et rassurant. Le lieu, avec son côté « petit Mézières », me plaît énormément. Au départ, nous étions dans une autre grange, plus petite et moins agréable. Nous avons changé d’endroit, et les choses se construisent peu à peu. Cela devient de plus en plus plaisant. Cela dit, les dimensions restreintes nous obligent à faire preuve d’imagination. Pour produire Trouble in Tahiti de Bernstein, nous avons dû placer l’orchestre dans la galerie !

Philippe Huttenlocher © Pierre-William Henry

Dites-nous quelques mots de l’Ode à Napoléon de Schönberg, qui sera donné en concert le 31 août.
C’est un « Sprechgesang » pour quatuor à cordes, piano, et récitant. Ce dernier doit suivre des indications approximatives de hauteur et de rythme. Certes, ce n’est pas du chant, mais le récit doit être organisé pour l’oreille, et un comédien, même excellent, ne pourrait pas s’y consacrer. Le texte est signé de Byron, et il me paraît toujours intéressant de se pencher sur ce que dit un Anglais sur l’Empereur français ! L’auteur offre une réflexion sur la fin de Napoléon et sur le pouvoir absolu. A mon avis, c’est typiquement une oeuvre pour les « Jardins musicaux ». Le problème, c’est qu’il y a beaucoup de texte et il ne me semble pas bien que les gens se concentrent presque exclusivement dans la lecture des surtitres. Valentin Reymond et moi, nous façonnons une traduction. J’avais fait une version préparatoire que nous retravaillons. Ce n’est pas évident : il faut partir d’une langue très concise pour produire un texte dans une autre langue qui ne l’est pas autant. Il faut aussi respecter les rythmes dans une proportion acceptable. Le fait d’élaborer à deux est stimulant, les idées s’enchaînent. Il y a quelque temps nous nous étions penchés sur une composition de Othmar Schöck dont le texte était signé par Gottfried Keller. A ce moment-là, les données étaient un peu différentes car, lors du concert, la traduction avait été préalablement lue par un comédien. Dans ces deux cas – et dans d’autres – nous avons fait oeuvre de pionniers, et c’est ce qui m’enthousiasme beaucoup à Cernier.

Quels sont vos projets personnels et pour Cernier ?
J’aimerais me tourner encore plus vers la formule du récital, piano et chant. La formule, que j’ai déjà largement pratiquée, m’a d’ailleurs toujours fasciné. Vous savez, on me demande de plus en plus de donner des cours d’interprétation. J’essaie de faire un récital avant le cours pour pouvoir donner une référence, dire ce que j’attends. Il faut montrer aux élèves ce qu’on veut faire, donner de sa personne. Pour Cernier, nous n’avons pas de projets sur le très long terme. Chaque édition est un enjeu. Tout reste ouvert. De toute façon, je ne suis pas certain que cela soit forcément très fructueux de prévoir sur une trop longue durée. J’aimerais proposer un récital qui offre des oeuvres méconnues, surtout de compositeurs contemporains. L’opéra est un rêve : Valentin Reymond me disait hier : « Et si nous proposions une fois Ariane à Naxos ? » Mais il faut bien être conscient qu’un opéra, cela coûte très cher. La place disponible sur la scène nous oblige à nous focaliser sur les opéras de chambre. Mais je tiens à vous dire que chaque année, même si tout n’est pas possible, des rêves sont réalisés...

Propos recueillis par Pierre Jaquet

[Site internet : http://www.jardinsmusicaux.ch/]