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Films d’avril 2008

Commentaires sur : J’ai toujours rêvé d’être un gangster – Ben X – The Other Boleyn Girl – Lady Jane – Vantage point.

Article mis en ligne le avril 2008
dernière modification le 3 mars 2012

par Firouz Elisabeth PILLET

J’ai toujours rêvé d’être un gangster


de Samuel Benchetrit, avec Anna Mouglalis, Edouard Baer, France. 2008.

L’histoire d’un braqueur sans arme dont la victime est elle-même une braqueuse, armée… L’arroseur arrosé, revu et corrigé par Samuel Benchetrit, inconditionnel cinéphage du néo-réalisme italien des années cinquante et soixante. Deux kidnappeurs amateurs qui enlèvent une adolescente suicidaire. Deux chanteurs qui règlent leurs comptes au sujet d’un tube volé. Cinq septuagénaires qui se retrouvent pour un dernier coup, arthrose en prime. Tout ce petit monde se retrouve dans la cafétéria d’une ère d’autoroute.

« J’ai toujours rêvé d’être un gangster » avec Anna Mouglalis
© Mars Distribution

Après Janis et John, Samuel Benchetrit a eu du mal à se remettre à écrire pour le cinéma. La sortie avait été trop pénible à vivre pour lui, d’autant plus pénible qu’ultra-médiatisée par la disparition par mort violente de son ex-compagne, Marie Trintignant. « J’avais envie de me concentrer sur la littérature et le théâtre 8…et puis, le cinéma est revenu de lui-même, organiquement. Je me suis lancé sur un projet assez gros avec Roberto Benigni. Mais celui-ci n’était pas libre avant un an. J’ai alors décidé de travailler à un film intime avec peu de moyens. Un film populaire mais avec une ambition artistique et technique. Comme on en faisait dans l’Italie des années 60. Je regardais beaucoup ce genre de films avec mon fils. Le Pigeon, Le Fanfaron, Les Monstres... Je ne veux pas paraître prétentieux en disant que je voulais faire ces films-là, qui sont des grands films, mais c’était leurs esprits qui m’inspiraient. J’avais un besoin énorme de liberté. Le même que celui que j’avais connu au théâtre avec Moins 2. J’avais très peu d’argent pour faire cette pièce, pas de décor et juste deux comédiens, et j’ai aimé la paix qu’on m’a foutue pendant les répétitions ! J’ai donc eu envie de faire un film dans ce sens, en sachant bien sûr que le cinéma coûte toujours plus cher, mais je voulais voir si j’en étais capable. »
Pour ce faire, le réalisateur s’entoure d’une bande copains : Edouard Baer, Anna Mouglalis (devenue sa compagne et mère de sa fille, Saul), Jean Rochefort, Jean-Pierre Kalfon, les chanteurs Arno et Alain Bashung dans une mise en abîme de leur propre personnage. Présenté sur la Piazza Grande lors du dernier Festival de Locarno, le film de Samuel Benchetrit a, de par sa forme en noir et blanc, immédiatement fait penser à Jarmush. La scène entre les deux chanteurs rappelle inévitablement la séquence tournée par Jim Jarmusch avec Tom Waits et Iggy Pop. Pourtant le réalisateur se défend avec véhémence de s’en être inspiré : « Tout le monde m’en a parlé, et j’ai fini par regarder Coffee and cigarettes. » Cependant, quand on savoure ce film au lieu et à l’action unique, filmé en noir et blanc, et offrant une galerie de portraits plus cocasses les uns que les autres, on ne peut s’empêcher de penser à certaines œuvres du cinéaste indépendant américain.
L’indépendance, c’est certainement là le point commun majeur entre les deux créateurs, farouchement attachés à ne pas s’encombrer du carcan et des exigences imposées par d’éventuels producteurs. Quand producteurs il y a, le réalisateur impose sa volonté quant à sa création ; pour Benchetrit, il était impératif de respecter son postulat de départ : faire un film à petit budget, comme un défi à relever, même si une société de production est venu le soutenir dans son entreprise.
Le nouveau venu dans l’équipe de Benchetrit, c’est Edouard Baer. Pressenti initialement, pour le rôle de Gino, Sergi Lopez a dû renoncer à ce tournage à cause d’une jambe cassée. Après ce film « à la bonne franquette » et « entre potes », Benchetrit nous promet un gros projet avec Benigni. Même si J’ai toujours rêvé d’être un gangster se voulait sans prétention, il n’est pas passé inaperçu aux festivals de Londres et Locarno 2007, ainsi qu’à Sundance 2008 !
Firouz-Elisabeth Pillet

Ben X


de Nic Balthazar, avec Greg Timmermans, Laura Verlinden. Belgique, 2007.

Ben n’est pas un adolescent tout à fait comme les autres. Surprotégé par sa mère et son petit frère, il vit dans son propre monde. Pour lui, l’extérieur est d’une violence inouïe. Aller à l’école est devenu chaque jour un peu plus un enfer depuis que deux types de son lycée technique lui rendent la vie impossible, ne cessant de le traquer, de le harceler, de l’humilier, le poussant lentement mais sûrement à bout. Son unique havre de paix est sa chambre. Dès qu’il s’y retrouve, il allume son ordinateur et plonge dans le seul univers où il se sente bien et un peu plus en sécurité, celui d’Archlord, un jeu en ligne fascinant. Il devient alors Ben X, un héros prêt à tout, invincible, qui a le cœur battant pour une certaine Scarlite. Ben X se réfugie dans ce monde virtuel où il devient invincible et redouté par ses tortionnaires de tous les jours. Alors qu’il décide d’en finir avec son douloureux quotidien, cette jeune fille énigmatique va quitter le monde virtuel où ils se rencontrent habituellement pour entrer dans la vraie vie de Ben.
La Belgique est un véritable vivier cinématographique, les artistes belges surprennent souvent – on pense à C’est arrivé près de vous, un travail de diplôme iconoclaste et dérangeant – et Ben X ne faillit à la règle. Durant la première demi-heure, les spectateurs restent perplexes, la caméra nous faisant osciller entre le monde réel, haineux et vindicatif où évolue péniblement Ben, et le monde virtuel, où nombre d’adolescents s’épanouissent pour fuir une réalité ingérable. Puis, soudain, la magie s’opère et on se laisse entraîner par ce sujet difficile, admirablement traité et porté par un jeune acteur au talent prometteur. Le défi du film, amplement atteint, est le périlleux exercice de parler de personnes différentes – c’est bien connu, la différence inquiète. Du Cobaye à Thomas est amoureux en passant par Hinokio, nombreux sont les films qui ont traité du rapport entre le handicap mental, les rapports sociaux et les univers virtuels. Dernier en date, Ben X vient s’ajouter à cette liste de manière convaincante et habile, grâce à un scénario intelligent.

« Ben X », avec Greg Timmermans
© Océan Films

On aime ou on déteste, mais on ne reste pas indifférent. La chute est, certes, un peu convenue. Cependant, le film nous poursuit bien au-delà de la salle obscure. Qui se cache derrière cette caméra experte ? Ancien critique de théâtre et de cinéma, Nic Balthazar s’intéressera rapidement à l’aspect technique des émissions qu’il animera pendant près de vingt ans sur les ondes du Plat Pays, et acquerra ainsi les notions de base d’un tournage. Cette connaissance ne lui servira que plus tard, lorsque son attention sera attirée sur un fait divers bien particulier : l’histoire du suicide d’un jeune autiste harcelé littéralement à mort par des camarades de classe. Poussé par un besoin viscéral de réagir à la détresse de la mère de la victime, Nic écrit alors le roman Niets Wa salles wat hij Zei (Il ne disait rien du tout) traitant d’un sujet similaire, qu’il adapta par la suite en pièce de théâtre multimédia (un acteur seul accompagné d’une vidéo) et enfin en court métrage où se retrouveront déjà une partie du casting de Ben X, le film étant la dernière mouture de l’histoire. Voici la version long métrage.
Au-delà de la chronique sociale pessimiste ou la leçon moralisatrice, Nic Balthazar choisit un angle bien plus original : au lieu d’user de la méthode classique qui place la caméra en observatrice, il s’immisce dans le monde tant extérieur qu’intérieur de Ben, faisant de lui son protagoniste principal, un adolescent perdu à mi-chemin entre la réalité virtuelle d’un jeu en réseau massivement multijoueur (ou MMORPG) et la vie sociale d’un adolescent diminué socialement, bien qu’ayant toute sa tête. Insolite, troublant,déconcertant…
Convaincant.
Firouz-Elisabeth Pillet

The Other Boleyn Girl


(Deux sœurs pour un roi), de Justin Chadwick, avec Natalie Portman, Scarlett Johansson. Grande-Bretagne, 2008.

Quand la rumeur se répand que le roi Henry VIII ne partage plus la couche de la reine Catherine d’Aragon – son épouse incapable de lui donner un héritier mâle –, le souverain s’inquiète pour la succession de son trône. Apprenant que la couche royale se libère, le Duc de Norfolk et son parent Sir Thomas Boleyn décident d’introduire la jeune fille de ce dernier, Anne Boleyn, auprès du roi avec pour recommandation de le séduire afin de lui procurer un héritier. Sir Thomas Boleyn rêve de gagner la faveur royale grâce à sa fille aînée, Anne, à la beauté redoutable. Lors d’une partie de chasse organisée dans la demeure des Boleyn, Anne commet une faute grave. Henry VIII s’en détourne. L’ambitieux projet de Sir Thomas est alors quelque peu contrarié par la fougue indomptable d’Anne qui sera envoyée en exil à la cour du roi de France pour apprendre l’étiquette du savoir-vivre, des bonnes manières et de la convenance.

« The Other Boleyn Girl », avec Scarlett Johansson

Le roi s’éprend alors de l’autre fille, Mary, la cadette déjà mariée. Peu importe : ce que roi ordonne ne peut être refusé. Mary, contre son gré, sera entraînée au sein de la cour afin de devenir la maîtresse officielle d’Henry VIII et finira par lui donner le fils tant attendu.
Ce sera sans compter sans les intrigues de la cour : Mary sera vite évincée, son fils et elle oubliés au profit d’Anne, revenue littéralement transformée par son séjour en France. Anne et Mary, sœurs tout d’abord complices, deviennent des rivales prêtes à tout pour gagner les faveurs du roi. Anne manigancera au point d’obtenir le divorce du roi de son épouse Catherine, une première dans l’histoire de la perfide Albion qui signera par cet acte sa séparation définitive du Vatican. L’Histoire s’écrit peu à peu dans les couloirs sombres de la demeure royale. Catherine, Mary, Anne ne seront que les premières d’une longue liste de femmes, légitimes ou courtisanes, sacrifiées dans la couche royale du roi d’Angleterre.
Deux sœurs pour un roi est l’adaptation sur grand écran du roman The Other Boleyn Girl, de l’écrivaine Philippa Gregory, paru en 2001. Cette artiste britannique, née au Kenya en 1954, a été journaliste en Angleterre avant de se spécialiser dans, notamment, l’écriture de romans historiques. Deux sœurs pour un roi est la première adaptation cinématographique de l’un de ses ouvrages en long métrage. Le roman, lui-même tiré d’une histoire vraie, relate l’histoire de deux sœurs qui devinrent ennemies pour le cœur d’un roi au 16e siècle. L’histoire a tendance a retenir Anne Boleyn, qui finit tristement sur l’échafaud, accusée injustement d’adultère et d’inceste. Le film de Chadwick, tout comme le roman à l’origine de cette adaptation, redonne avec justesse un certain éclairage sur Mary et le rôle non négligeable qu’elle a joué.
On savait les Anglais férus d’histoire, et surtout de reconstituons historiques. La vie des sœurs Boleyn ne faillit pas à la règle : 2003, soit cinq ans avant Deux soeurs pour un roi, la chaîne britannique BBC a produit un téléfilm basé sur le roman The Other Boleyn Girl. D’une durée de 90 minutes et d’un budget modeste, il remporta un joli succès qui influa sur le passage au grand écran quelques années plus tard.
Pour ce film en costumes très réussi, il fallait un tandem d’actrices contrasté, capable de symboliser l’antagonisme viscéral entre les deux sœurs ; deux valeurs montantes d’Hollywood incarnent à merveille ce duo : Natalie Portman (Anne) et Scarlett Johansson (l’égérie de Woody Allen incarne ici Mary) se sont pliées à l’exercice périlleux, pour des actrices américaines, de parler dans un parfait anglais shakespearien pour la version originale. A l’image de leur personnage respectif, les deux femmes irradient littéralement. Leur amour fraternel se heurte aux réalités des intérêts familiaux. Mary, la douce et blonde épouse, piégée par les intentions d’avancement paternel, ne cesse de clamer son innocence et sa sincérité. Anne, prisonnière des tourments de la réussite sociale, s’éduque au contact de la cour et comprend qu’être une femme, c’est avant tout apprendre à manipuler et à se faire désirer. La candeur et la sincérité s’opposent au machiavélisme et à la duplicité. Sur fond du grand schisme de l‘Angleterre avec le Vatican et de la naissance de l’Eglise anglicane, c’est toute la symbolique de l’ange et du démon qui ressurgit, magnifiquement interprétée par ces deux actrices judicieusement choisies. Si vous vous êtes ennuyés à la projection d’Elisabeth L’âge d’or, vous vous régalerez de cette fresque historique rondement menée.
Firouz-Elisabeth Pillet

Lady Jane


de Robert Guédiguian, avec Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Gérard Meylan. France, 2008.

A l’époque où les Rolling Stones chantaient Lady Jane, Muriel, François et René, amis d’enfance nés dans les ruelles populaires de Marseille, distribuaient des fourrures volées à toutes les ouvrières de leur quartier. Ils cessèrent leurs cambriolages après que Muriel ait tué, à bout portant, un bijoutier dans un parking, arguant la légitime défense. Pour se faire oublier, ils ne se voient plus jusqu’au jour où le fils de Muriel est enlevé... La bande se reforme alors pour réunir l’argent de la rançon. S’agit-il uniquement d’une rançon ?

« Lady Jane » de Robert Guédiguian

Il l’avait annoncé l’an dernier à Locarno alors que le collectif Agat Film recevait un prix sur la Piazza, Guéduiguian souhaitait revenir à Marseille pour y tourner son prochain film, après son périple existentiel puisant dans ses racines, avec Le voyage en Arménie (2006). Ce que le réalisateur n’avait pas dit, c’est qu’il se frotterait à un genre encore méconnu dans sa filmographie : le policier. Un Guédiguian demeurera toujours un Guédiguian. Axiome vérifié dans le chapelet de ses multiples films : un cinéma talentueux, plein de soleil et de réflexion sociale, un cinéma qui dénonce les injustices, met l’éclairage sur les marginaux, les oubliés, ces personnages forts en gueule, attachants et entiers, ce qui vaut d’ailleurs à Guédiguian d’être souvent qualifié de Ken Loach de l’Hexagone. Pour son dernier film, le réalisateur a donc choisi de faire un polar, avec les canons du genre, violence, suspense et pistolets à l’appui, meurtre sanglant face à la caméra, filmé avec un réalisme glacial – une scène qui vaudra sûrement au film d’être limité à seize ans. Autant dire tout de suite que le résultat, chez ce réalisateur qui nous a plus habitués à la chronique politico-sociale, surprend et enchante. Si la noirceur du film étonne, on rentre vite dans cette histoire de passé qui rattrape, de malfrats obligés de se réunir après des années à cause des circonstances, le tout scandé par Lady Jane. L’omniprésence du rock des années septante surprend aussi, dans un premier temps, pour se fondre agréablement à l’histoire, presque à l’insu des spectateurs.
La construction parfaite permet au spectateur d’apprécier de bout en bout les méandres de l’intrigue, jusqu’au dénouement final, inspiré par un proverbe arménien du XIXe siècle :
« La vengeance est comme la mouche qui s’obstine contre la porte fermée, sans voir, à côtés, la fenêtre ouverte. » La clef du film réside dans ce proverbe, inséré dans le générique de fin : mettre une fin à la soif de vengeance, arrêter cette spirale infernale qui pourrait se transmettre sans fin, de génération en génération. L’ambiance semble d’abord aux antipodes des Guédiguian d’antan : le film est sombre, la plupart des scènes se déroulent de nuit, dans des parkings mal éclairés, l’hiver, et l’atmosphère et les couleurs accompagnent très justement les événements. Mais la touche du réalisateur est toujours tangible au niveau des dialogues, du thème de l’amitié, de l’amour, incarné comme à l’accoutumée par son trio d’acteurs fétiche.
Ses acteurs attitrés (Ariane Ascaride, sa compagne, Jean-Pierre Darroussin et Gérard Meylan) sont toujours là, mais dans des rôles qui les éloignent de leurs compositions habituelles. Tous restent cependant bluffants de vérité, crédibles, insufflant au film un élan réaliste et sincère. Les thèmes abordés au-delà de l’histoire (rancune, vendetta, culpabilité, vérité, colère, dette) permettent à Guédiguian d’introduire une réflexion universelle subtile sur la vengeance sous toutes ses formes. Guéduguian a osé s’aventurer sur le chemin délicat du polar, grand bien lui fasse ; où faudra-t-il l’attendre pour son prochain opus ?
Le cinéaste de l’Estaque n’a pas fini de nous surprendre.
Firouz-Elisabeth Pillet

Vantage point


(Angles d’attaque), de Pete Travis, avec Matthew Fox, Forest Whitaker, Dennis Quaid, Susan Sarandon. USA, 2008.

Thomas Barnes et Kent Taylor sont deux agents secrets chargés d’assurer la protection du Président Ashton lors d’une conférence au sommet sur le terrorisme en Espagne.
L’effervescence bat son plein sur la Grand Place de Salamanque, et les forces de l’ordre ont bien du mal à maintenir le calme parmi cette foule euphorique. Au milieu de la foule hystérique, un touriste américain filme l’ambiance environnante, allant de l’estrade présidentielle aux fenêtres alentour dont les voilages s’agitent de manière troublante. Peu après son arrivée, le président est victime d’une « tentative » d’assassinat et s’effondre en direct devant les caméras des chaînes du monde entier. Suit une gigantesque explosion, l’effroi et la panique règnent sur la place. Rex, reporter pour une chaîne de TV américaine, a, elle aussi, été le témoin privilégié des 15 minutes avant et après le coup de feu.
C’est en suivant la reconstitution de ces moments vécus par ces quatre personnages que la terrible vérité qui se cache derrière cet attentat nous sera révélée.

« Vantage Point », avec Dennis Quaid et Eduardo Noriega
© Gaumont Columbia Tristar Films

Quelle mouche a piqué votre cinéphile, inconditionnelle de cinéma d’auteur ? A-t-elle sombré dans la marmite hollywoodienne ? A-t-elle vendu son âme aux blockbusters commerciaux ? Que Nenni. Si Vantage point a retenu mon attention, outre sa distribution reluisante, c’est pour la qualité et l’originalité de son traitement. L’intrigue n’a rien de renversant, au contraire. Rien de nouveau sous le soleil californien : un attentat, la lutte anti-terroriste, les terroristes en personne, en chair et en os face à la caméra, l‘Oncle Sam qui veille sur le monde… Bref, l’habituel discours panaméricain servi à la sauce des studios hollywoodiens.
Si Vantage Point se démarque du moule, c’est par sa façon originale de resservir, par saynètes de quelques vingt minutes, le même événement : l’attentat suivi de l’explosion – vu par différents protagonistes. Chaque saynète commence par une ouverture – écran noir, bande sonore off – puis s’ensuit la succession d’événements selon le point de vue concerné. Grâce à cette succession de saynètes, le spectateur se retrouve maintenu en haleine, presque aimanté après cette reconstitution policière, impatient de découvrir, à l’instar des agents présidentiels, le fin mot de l’histoire. Et la méthode fonctionne à merveille : à chaque saynète, un brin de vérité est servi, juste ce qu’il faut pour captiver un peu plus l’audience, qui piaffe d’impatience jusqu’à la révélation finale… Entre-temps, les spectateurs ont été baladés pendant près de deux heures, et avec un malin plaisir à se laisser berner.
Firouz-Elisabeth Pillet