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Film de novembre 2007 : “ Le deuxième souffle“
Article mis en ligne le novembre 2007
dernière modification le 4 mars 2012

par Firouz Elisabeth PILLET

Le deuxième souffle


d’Alain Corneau, avec Daniel Auteuil, Monica Bellucci, Michel Blanc, Jacques Dutronc, Gilbert Melki, Eric Cantona. France, 2007.

1958. Gustave Minda dit « Gu », célèbre et dangereux gangster condamné à vie, s’évade de prison. Traqué par la police, il veut s’enfuir à l’étranger avec Manouche, la femme qu’il aime, qui quitte son cabaret parisien pour le suivre. Ayant besoin d’argent, il accepte de participer à un dernier hold-up. Grâce à lui, le coup est une réussite. Mais, victime d’une machination montée par la police, Gu passe pour un donneur et un traître aux yeux de ses complices. Pour laver son honneur, Gu prendra tous les risques. Face à lui, le commissaire Blot, un homme d’une intelligence extrême qui connaît tous les rouages de la mafia et donne bien des fils à tordre à Gu.

« Le deuxième souffle »
© 2007 ARP - photo Jérôme Prébois

Le Deuxième Souffle est la seconde adaptation du roman éponyme de José Giovanni, quarante ans après le film de Jean-Pierre Melville sorti en 1966. Alain Corneau connaissait José Giovanni pour avoir été son premier assistant. Depuis plus de trente ans, Corneau nourrissait le projet de réadapter Le Deuxième Souffle au cinéma mais il a longtemps gambergé avant de s’atteler à la tâche. Quels costumes ? Quelle époque ? Enfin décidé, Corneau se plonge aux sources mêmes de l’histoire, le roman, pour évoquer certains aspects absents du film de Jean-Pierre Melville : l’histoire d’amour entre Gu et Manouche ainsi que la faille de Blot. La densité et la richesse des personnages du livre de Giovanni sont rendus avec justesse par le film de Corneau qui a su choisir une distribution royale. Obsédé par les balances, l’écrivain a choisi de faire piéger Gu, le personnage à la rigueur morale infaillible. Pour rendre l’atmosphère familiale de la mafia, il fallait créer un accord viscéral entre les acteurs, et par conséquent, il fallait au réalisateur de gros calibres, des pointures d’acteurs complices et désireux de porter à bout de bras le même projet.
Pour qu’un film de ce genre ne sombre pas dans l’esthétisme, il faut disposer d’une histoire dense, solide, à tiroirs, afin que l’histoire reste au premier plan. C’est le défi relevé par Corneau qui soigne la mise en scène pour que la présence des acteurs la bonifie. Le réalisateur s’est fixé deux garde-fous pour sa mise en scène. Le premier : fuir le naturalisme, sortir de la réalité, en créer une qui n’appartienne qu’au film. Le second : ne jamais devenir solennel, ni théâtral. Bien que situé dans les années soixante, le film évite le noir et blanc ou le bleu métallisé pour regorger de couleurs chaudes et vides à l’image des violentes passions qui animent chaque personnage : amour, haine, jalousie, vengeance. Corneau s’est associé le talent du compositeur Bruno Coulais, dont le travail sur Les rivières pourpres l’avait séduit, pour créer une atmosphère tragique, dramatique, un univers en suspension jusqu’à l’implosion finale.
Les Français n’ont rien à envier aux Américains pour ce film de genre qui s’est fait attendre ben longtemps, mais cela en valait la peine ! Le Deuxième Souffle est aussi l’occasion de rendre à un bel hommage à José Giovanni, décédé à Lausanne en 2004, et qui tenait tant à ce projet !

Firouz-Elisabeth Pillet