Arts-Scènes
Slogan du site

Cinéma Danse Expositions Musique Opéra Spectacles Théâtre

Au Théâtre du Passage
Neuchâtel : « Play Strindberg »

Strindberg sur scène...

Article mis en ligne le 1er mars 2007
dernière modification le 28 juin 2013

par Frank FREDENRICH

L’enfer, c’est l’autre, ou encore 25 ans de mariage, c’est le désamour fou : August Strindberg n’y allait pas de main morte lorsqu’il a tiré le portrait d’un mariage en accouchant de Danse de mort.

Pas de demi-mesures chez le dramaturge suédois à ce sujet, il faut dire que sa biographie – avec trois mariages et autant de divorces – n’incite pas à l’optimisme et explique sans doute sa misanthropie teintée de misogynie. Et lorsque Friedrich Dürrenmatt décida de reprendre Danse de mort et d’en présenter une nouvelle mouture à sa façon, sous le titre Play Strindberg, la scène de la vie conjugale devint le ring d’un combat en douze rounds.

Version au vitriol
Dans une coproduction avec le Théâtre Populaire Romand (la pièce a été donnée en premier lieu à La Chaux-de-Fonds au mois de janvier), le Théâtre de l’Atalante à Paris que dirige Alain Alexis Barsacq en proposait une version au vitriol, d’une virulence bienvenue mettant parfaitement en exergue la problématique imaginée par Strindberg et revisitée par Dürrenmatt.
Décor minimal avec quelques meubles dans une ambiance de nécropole, présence de l’arbitre-témoin pour orchestrer l’action, les acteurs sont ici les maîtres du jeu dans un cadre intimiste ne laissant aucun temps mort.
Grognard atrabilaire, le mari râle, hurle, se plaint, crache son venin avec une évidente jouissance dans l’ignominie dans le portrait qu’en donne Philippe Hottier imposant de présence. Mais face à lui, Agathe Alexis dans le rôle de l’épouse a du répondant – c’est le moins que l’on puisse dire. Dans un style tout en finesse et cynisme, elle compose un personnage subtilement distant d’une grande justesse. Le troisième homme, celui qui sert de catalyseur permet de retrouver Philippe Morand impeccable de hiératisme, observateur blasé et non moins cynique, voyageur sans bagage crédible. Entre théâtre de la cruauté et drame pathétique teinté de comique, l’affrontement à deux, puis trois personnages, captive dans la mise en scène d’Alain Alexis Barsacq qui ne laisse aucun répit au spectateur. Et si l’on rit parfois durant le spectacle, c’est d’effroi devant l’efficacité de la prestation des comédiens, étant entendu comme il se doit que le mariage selon Strindberg et Dürrenmatt, « ça n’arrive qu’aux autres » !

Frank Fredenrich

Théâtre du Passage à Neuchâtel du 14 au 18 mars. Loc. 032 71779 07