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Young Vic Theater, Londres
Londres : “Sweet Nothings“

Luc Bondy à Londres

Article mis en ligne le juillet 2010
dernière modification le 20 août 2010

par Régine KOPP

A l’automne dernier, Luc Bondy avait fait son entrée au Metropolitan de New York, mais sa version de Tosca avait été copieusement huée par le public new-yorkais, plutôt conventionnel dans son esthétique scénique.
Le succès remporté par sa mise en scène de l’adaptation de Liebelei (Amourette) d’après Arthur Schnitzler, par David Harrower, sous le titre Sweet Nothings, au Young Vic Theater lui rendra peut-être son échec moins amer.

L’amour est un jeu dangereux
Luc Bondy a une connaissance approfondie de l’œuvre de Schnitzler, en connaît les tenants et les aboutissants pour l’avoir mise en scène à plusieurs reprises.
C’est le dispositif scénique imaginé par Karl Ernst Hermann qui rythme l’action dramatique. Un carrousel qui tourne très lentement, mouvement dont on ne se rend compte que par les meubles qui bougent de place. Tout commence dans la bonne humeur, l’ambiance semble être aussi pétillante que le champagne que boivent des jeunes gens en quête d’amour et aussi voluptueuse que le moelleux des fauteuils, où s’ébattent ces jeunes romantiques. Fritz et Théodore, deux jeunes officiers du début du siècle dernier à Vienne sont venus pour se divertir avec Mizi et Christine. Sous des apparences d’hommes sûrs d’eux, se cachent pourtant des failles, qui préparent la tragédie finale. La vie semble insouciante et amusante, jusqu’à ce qu’on sonne à la porte. L’homme en noir qui se présente et que l’on voit arriver lentement sur le plateau, vient le provoquer en duel. C’est que Fritz, engagé dans une relation avec une femme mariée, doit faire face à la réalité et ne peut plus jouer.

« Sweet Nothings »
© Ruth Walz

La mise en scène ne s’intéresse qu’accessoirement aux relations sociales entre les protagonistes, mais se focalise plus sur les frustrations des personnages, en proie à des illusions destructrices. Au premier acte étourdissant comme une danse folle succédera un deuxième et dernier acte, représentant la chambre de Christine, dans un décor dépouillé, approprié à la tragédie qui va s’y jouer. Car Christine, amoureuse de Fritz, espère le grand amour mais la vie en décidera autrement, puisque Fritz est tué. Luc Bondy est un maître rigoureux pour mener ces jeux de l’amour et du mensonge. Il est vrai qu’il a choisi une distribution performante : Natalie Dormer dans le rôle de Mizi révèle un tempérament de grande comédienne, qui sait tirer parti de plusieurs registres ; Kate Burdette joue Christine de manière moins convaincante ; Tom Hughes dans le rôle de Fritz et Jack Laskey dans celui de Théodore sont des comédiens aguerris, qui savent jouer avec les sentiments les plus divers. Il faut encore citer Hayley Carmichael qui interprète avec talent et une bonne dose d’humour une voisine, engoncée dans les principes de la morale. En retravaillant le texte dans une langue plus moderne, David Harrower le simplifie également, sans pourtant toucher à la complexité des sentiments et donne ainsi à l’histoire une dimension plus intemporelle.
Autres représentations en tournée : Wiener Festwochen, Rhurfestspiele Recklinghausen, Teatros del Canal Madrid.

Régine Kopp