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A Genève
Entretien : Michel Beretti

Le Spectacle Calvin Genève en flammes est à voir aux Bastions durant tout le mois de juillet.

Article mis en ligne le juillet 2009
dernière modification le 6 juillet 2009

par Bastien FOURNIER

Parmi les différentes manifestations prévues pour marquer les 500 ans de la naissance de Jean Calvin ainsi que le 450ème de la création du Collège et de l’Académie de Genève, un grand spectacle sera joué chaque soir aux Bastions durant tout le mois de juillet. Calvin Genève en flammes, sur une mise en scène de François Rochaix et un texte de Michel Beretti, plongera les spectateurs dans la vie au temps de Calvin et montrera les différentes facettes du Réformateur.

Retenu par des répétitions en France, Michel Beretti s’est prêté au jeu de l’interview par mail pour Scènes Magazine.

Que raconte Calvin Genève en flammes ?
C’est l’histoire d’une communauté qui se choisit un destin peu banal, et qui se donne, pour y parvenir, une autorité morale, en l’occurrence un homme arrivé là par hasard. Cette communauté a décidé de réaliser une utopie : une cité plus juste, exemplaire aux yeux du monde. Il y a quelque chose de radical, de révolutionnaire dans cette tentative : il y a des modérés et des ultras, des opposants et des opportunistes. La doctrine de Calvin va de l’ouverture au raidissement devant la résistance du réel : c’est un itinéraire tragique. La Réforme genevoise finit par se scléroser, comme d’autres révolutions, et aboutit à l’opposé de ce qu’elle recherchait, à l’établissement d’une société de castes, politiquement bloquée, sans évolution possible autrement que par la violence.

Qu’est-ce que Calvin représente pour vous ? Est-ce que ce personnage vous parle ?
Je ne peux pas dire si c’est à moi que Calvin parle ! C’est à nous tous, pour peu qu’on veuille l’entendre. Qu’on l’apprécie ou non, il pose des questions qui se présentent à nous, au carrefour des chemins où nous nous trouvons : sur la justice économique, sur l’usage raisonnable des ressources naturelles, sur l’éthique, sur l’égalité... Aussi ce spectacle s’adresse-t-il à tous, croyants ou non.

Michel Berretti
© Marc Vanappelghem

Certains Genevois sont habités parfois par l’idée d’une mission universelle. Ce n’est pas par hasard si la Croix-Rouge est née à Genève et si la SDN est venue s’y installer, si des savants comme de Candolle, qui sont aussi des citoyens, y sont apparus. Le meilleur de cette cité-république est dans sa générosité, quand elle elle ne cède pas aux chamailleries et au dénigrement de soi. Calvin est pour une part à l’origine de cet « esprit de Genève », pour le meilleur et pour le pire.

Comment avez-vous procédé pour sélectionner les textes ? Avez-vous retenu plutôt des semons de Calvin, ou des discours quotidiens ?
Calvin Genève en flammes n’est pas une pièce historique. C’est une fiction, tout comme – toutes proportions gardées – Shakespeare écrit ses History Plays sur des événements qui se sont déroulés deux siècles auparavant. Si cette fiction utilise des figures « historiques » – en petit nombre, d’ailleurs, ce sont des personnages de théâtre qui ont un référent dans l’Histoire, voilà tout. Tous les autres personnages, et ils sont nombreux, sont imaginaires et aussi importants que les premiers.

Quelle figure de Calvin voulez-vous montrer ? Plutôt le dictateur ? Le théocrate ?
Ce sont des stéréotypes. L’image du « dictateur de Genève » a été bâtie par Stefan Zweig dans un livre fort, mais bâti sur une perspective faussée : en 1936, Zweig, fuyant le nazisme,
recouvre la figure de Calvin avec celle d’Adolf Hitler. Quant à « Calvin théocrate », là, c’est encore plus ironique, puisqu’il n’a cessé de lutter contre la théocratie que les gouvernements successifs ont voulu installer, à l’exemple de Berne et de Zurich. Calvin, qui n’est d’ailleurs admis « bourgeois de Genève » que tardivement, n’a aucune autre autorité que morale. C’est une histoire collective qui se joue là, convulsive et violente.
La réalité est plus complexe, c’est le pari d’en rendre compte dans une pièce de théâtre qui dure 2 heures. Le spectacle se joue devant le mur des Réformateurs où on a statufié Calvin il y a un siècle. Il s’agit de faire que cette statue se lézarde, car Calvin est infiniment moins monolithique que les représentations qu’on en a. Le personnage théâtral de Calvin Genève en flammes est contradictoire, et non exempt de passions et de fragilité.

Au niveau des costumes, avez-vous eu recours à l’avis d’historiens ? Avez-vous fait en sorte d’être fidèle au détail près ?
Pourquoi ? Il y a des costumes d’aujourd’hui qui habillent le chœur et aussi, en effet, des costumes du XVIème siècle, mais stylisés. Une reconstitution historique ne nous intéresse absolument pas et est hors de notre propos.

Des propos recueillis par Julie Bauer

« Calvin Genève en flammes ».
Du 1er au 26 juillet, relâches le lundi, Promenade des Bastions (Théâtre du Léman en cas de pluie).
Location : www.resaplus.ch, 900 552 333 (CHF 1.-/min)