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Au bout du rouleau, à La Comédie de Genève
Entretien : Manon Pulver

Manon Pulver présente en quelques mots le sujet de sa dernière pièce, Au bout du rouleau.

Article mis en ligne le décembre 2007
dernière modification le 21 janvier 2008

par Laurent CENNAMO

Du 12 au 21 décembre, la Comédie de Genève (Petite Saison) présente la dernière création de Manon Pulver, Au bout du rouleau, mise en scène par Daniel Wolf. Entretien.

Manon Pulver, pouvez-vous nous présenter en quelques mots le sujet de votre dernière pièce, Au bout du rouleau ?
Le sujet est très simple en soi. Deux femmes se retrouvent dans un lieu étrange, un Hair-self - c’est-à-dire un salon de coiffure self-service automatisé -, dans un état qui laisse supposer qu’on est au bout de quelque chose. Chacune est très préoccupée d’elle-même. Elles vont essayer de se lier d’amitié, mais au stade de narcissisme où elles en sont, cela va se révéler impossible. Au bout du rouleau est d’abord une comédie sur le désenchantement de soi. Les personnes qui l’ont lue, notamment Daniel Wolf, y ont également vu une métaphore de la condition d’acteur.

Pourquoi l’action se situe-t-elle dans un salon de coiffure ?
Ce n’est évidemment pas un hasard. Je crois que la question des cheveux dépasse largement la pure coquetterie ou la simple vanité. C’est quelque chose de très important, qui touche à la représentation de soi, à une quête par rapport à la personnalité. Les cheveux sont évidemment plus importants pour les femmes. Les hommes en parlent moins, ils ont mieux su contourner cette question esthétique. Mais qui sait : peut-être les chauves parleront-ils un jour de leur souffrance, de ce que leur calvitie leur a fait endurer ! (rires). Plus sérieusement, on a longtemps projeté la féminité dans les cheveux et aujourd’hui encore avoir une belle chevelure compte beaucoup, a rapport à la puissance.
Le salon de coiffure est un endroit de présentation de soi unique, où tout le monde va tout le temps et dont on parle finalement assez peu. La théâtralité qu’on met dans la vie est ce qui la rend intéressante et vivable selon moi, c’est là que se trouve le charme. Une vie purement pratique et fonctionnelle serait terrible. Mettre un peu de distance, essayer de faire de sa vie une œuvre, même minuscule : je crois que chacun de nous recherche cela.

La question de l’amitié entre les femmes est au cœur de la pièce.
C’est le plus souvent le caractère maternel ou amoureux qui est mis en avant quand on parle des femmes, l’empathique, le protégeant, le bienveillant, le séduisant... On ne parle pas beaucoup d’amitié, les femmes ont des « copines ». Longtemps, les femmes se méfiaient terriblement des autres femmes, il était difficile de se faire confiance. Une des grandes conquêtes du féminisme – qu’il faut réactualiser sans cesse – c’est l’amitié des autres femmes. Mais le plus important est d’avoir de l’amitié pour soi, conquérir une tranquillité peut-être plus virile, se faire confiance. Au bout du rouleau montre les travers, les difficultés réelles de cette quête, et non sa réussite.

Quelles comédiennes interpréteront les deux rôles féminins ?
C’est Claude-Inga Barbey et Pascale Vachoux qui incarneront les rôles. Pour une telle pièce, il était important de trouver des interprètes à la personnalité multiple, multi-facettes, qui aient déjà une « carrière » derrière elles. Des comédiennes qui ne soient plus immaculées, qui aient leur espace à elles, sur lesquelles on ne puisse pas projeter ce qu’on veut. Enfin des comédiennes qui soient également de grands clowns, capables de frôler leur propre drame et en même temps d’avoir de l’ironie, de conserver de la distance.

Propos recueillis par Laurent Cennamo

Du 12 au 21 décembre à la Comédie de Genève (spectacles de la Petite Saison).
Location : + 41 22 320 50 01, www.comedie.ch