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Théâtre Hébertot
Paris : “Solness“

Hans-Peter Cloos met en scène Solness, le constructeur de Henrik Ibsen.

Article mis en ligne le octobre 2010
dernière modification le 31 octobre 2010

par Régine KOPP

Pour parler du spectacle dont Hans-Peter Cloos signe la mise en scène, il faut prendre en compte sa lecture de l’œuvre d’Ibsen. Car, si généralement on nous donne une vision désespérée, sombre et pessimiste de son œuvre, Hans-Peter Cloos ne partage pas cette lecture, qu’il juge erronée et propose de « plonger son regard dans les profondeurs de l’existence humaine avec humour, et c’est cet humour même qui le sauve et nous sauve ».

Solness est un architecte à qui tout a réussi dans la vie professionnelle mais qui ronge son frein dans sa vie d’homme. Il y a longtemps qu’il s’est détourné de sa femme Aline qu’il subit, lui préférant de jeunes conquêtes. Sa comptable (Nathalie Niel) s’est éprise de lui mais elle doit s’accommoder de l’arrivée de Hilde, une jeune femme belle et intelligente, qui joue de son charme avec l’art de la parfaite séductrice. Ils se sont rencontrés autrefois et elle a attendu dix ans pour le revoir et recevoir ce royaume qu’il lui avait promis, avec des châteaux de nuages.

Hans-Peter Cloos

Avant de construire des maisons pour des hommes, Solness avait construit des églises. Mais l’incendie de sa maison et la mort de ses jumeaux, ressentis comme une punition, l’ont poussé à construire des « maisons pour des hommes ». Hilde a l’avenir devant elle et reproche à Solness sa conscience tourmentée qui l’empêche de vivre et d’être libre. Libre, il ne le sera qu’à la fin, au prix de sa vie. « Maintenant je le sens libre, s’écrit Hilde qui le regarde grimper sur la tour. Il y a aussi le personnage de Ragnar, son employé dessinateur qu’il a formé et qu’il ne laissera partir que contraint et forcé. Ragnar incarne la jeunesse. Cette jeunesse qui fait si peur à Solness, « elle m’attire si terriblement et va venir me détruire ». Ragnar, interprété avec justesse par Thibault Lacroix, a la décontraction et l’aplomb des jeunes gens qui savent que leur heure viendra.

Dans cette mise en scène, que Hans-Peter Cloos préfère voir comme une comédie, et que le décor très épuré de Jean Haas place dans un environnement moderne, le spectateur a cependant du mal à être convaincu, pour ne pas dire qu’il s’y ennuie. Cela change avec l’arrivée de la séduisante Mélanie Doutey, qui dynamise le jeu. Quant à Jacques Weber, qui semble mal à l’aise dans ce rôle de Solness, on peut se demander si ce n’est pas la faute d’avoir voulu mettre en avant la dimension comique, imposée par le metteur en scène, au détriment de registres plus subtils qui structurent les profondeurs de l’existence humaine. De même Edith Scob, une comédienne par ailleurs de grand talent, joue Aline de manière trop précieuse et agace par son jeu de femme trop hystérique. En maître expérimenté de la scène, Hans-Peter Cloos imagine toutefois une fin poétique à ce mélodrame universel, auquel le public ne saurait rester insensible.

Régine Kopp