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Opéra de Paris
Paris, opéra : Les Ballets russes

Hommage aux Ballets russes à l’Opéra de Paris, avec des chorégraphies de Fokine, Nijinski et Massine.

Article mis en ligne le février 2010
dernière modification le 22 février 2010

par Stéphanie NEGRE

L’Opéra de Paris a programmé, du 12 au 31 décembre 2009, quatre ballets – Le Spectre de la rose, L’Après-midi d’un faune, Le Tricorne et Petrouchka – créés par les Ballets russes entre 1911 et 1919 de trois artistes, Michel Fokine, Vaslav Nijinski et Leonide Massine qui, chacun avec leur style propre, marqueront l’histoire de la danse.

L’argument du Spectre de la rose s’inspire du poème éponyme de Théophile Gautier. Une jeune fille qui revient d’un bal, s’endort dans sa chambre après avoir abandonné sur sa coiffeuse la rose qu’elle portait à son corsage. Surgit alors par la fenêtre le fantôme de la fleur. En un instant, la scène romantique bascule dans le fantastique.

« Le spectre de la rose » avec Clairemarie Osta et Emmanuel Thibault.
Photo Sébastien Mathé

Extrêmement raffinée, la chorégraphie de Michel Fokine donne vie à un être immatériel, une présence plus qu’un personnage, et nous fait même sentir son influence sur les songes de la belle assoupie. Quant à Emmanuel Thibault qui incarne le spectre, il sublime son rôle. Fantôme d’une rose, son corps fin et souple se joue de la pesanteur dans les sauts tandis que les expressions de son beau visage traduisent ce mélange subtil de douceur et de sensualité qu’on prête à la reine des fleurs. Il nous entraîne dans une dimension onirique où la réalité n’a plus sa place. Comme la belle qui se réveille après que le délicieux esprit s’est envolé dans un ultime saut, je me demande alors que le rideau se baisse, les yeux grands ouverts : n’ai-je pas rêvé ?

Pour son premier ballet qui fera entrer la danse dans l’avant-garde où l’attendaient depuis quelques temps déjà la peinture et la musique, Vaslav Nijinski s’inspire de la Grèce antique pour imaginer des mouvements inédits, libérés de tout académisme. Solitaire sur son rocher, avec la toile de fond de Léon Bakst qui représente une nature luxuriante, un faune guette un groupe de nymphes. Il va à leur rencontre et se retrouve face à face avec l’une d’elles. Les danseurs qui évoluent de profil nous plongent dans une fresque antique animée, et les notes délicates de Debussy, dans une atmosphère langoureuse. Œuvre révolutionnaire par son esthétique et sa cohérence artistique, L’Après midi d’un faune l’est également par le thème traité, l’attirance physique. Dans le rôle-titre, Jérémie Bélingard est un faune sauvage, animal. Il interprète de manière éblouissante et sexuelle celui qui, le premier dans l’histoire du ballet, personnifie le désir débarrassé des sentiments et nous livre une scène finale d’une grande intensité érotique.

« L’après midi d’un faune » avec Jérémie Bélingard.
Photo Sébastien Mathé

Après ces deux petits chefs-d’œuvre, la soirée se poursuit avec Le Tricorne, ou l’histoire d’une meunière courtisée par un vieillard. Leonide Massine qui a travaillé sa chorégraphie pendant trois ans auprès de maîtres espagnols, nous fait vivre une aventure pleine de passion entre le mari jaloux et l’épouse fière et fidèle. Jose Martinez et Stéphanie Romberg servent avec fougue cette histoire à rebondissements. Tout le petit peuple andalou défile sous nos yeux dans les décors et les costumes de Picasso alors que les deux époux vont s’employer à déjouer la machination du barbon. La chorégraphie s’inspire librement des danses populaires espagnoles, jota, farruca et sevillana. Divertissement mené tambour battant, Le Tricorne est un bel exemple du talent de Leonide Massine.

Dernière œuvre présentée, Petrouchka est le ballet de trop de cette soirée. L’histoire est émouvante, les amours malheureuses de la marionnette Petrouchka pour la poupée ballerine qui lui préfère le Maure. La chorégraphie de Michel Fokine, la musique d’Igor Stravinski, les décors et les costumes d’Alexandre Benois sont parfaits pour évoquer les fêtes populaires russes et le monde des marionnettes. Malheureusement, après trois œuvres très fortes, l’esprit sature et peine à l’apprécier pleinement.

Stéphanie Nègre