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Odéon-Théâtre de l’Europe
Paris : “La Ronde du carré“

Le metteur en scène Giorgio Barberio Corsetti nous faire connaître La Ronde du carré.

Article mis en ligne le juin 2010
dernière modification le 2 août 2010

par Despoina NIKIFORAKI

Penseur issu d’une Grèce moderne repliée sur elle-même, Dimitris Dimitriadis est mis à l’honneur à l’Odéon-Théâtre de l’Europe.

Né en 1944 à Thessalonique, l’auteur quitta la Grèce pour étudier le cinéma et le théâtre à Bruxelles. Sa première pièce de théâtre Le Prix de la révolte au marché noir laissa sa trace à Paris lorsqu’elle fut montée par Patrice Chéreau au Théâtre d’Aubervilliers en 1968. Depuis, plusieurs de ses textes ont été révélés au public grec et français grâce à des travaux des metteurs en scène reconnus. Anne Dimitriadis présenta à MC 93 Bobigny Léthé, en 2001, et Je meurs comme un pays, avec Anne Alvaro en 2009 ; Yannis Kokkos Je meurs comme un pays au Théâtre du Rond-Point en 2003 ; Stefanos Lazaridis L’Arche de la vie, en 1995 et Yannis Houvardas L’Eblouissement des bêtes avant le carnage à Athènes, en 2000.
Prosateur et poète dont l’œuvre fut traduite en nombreuses langues, il fut également lui-même traducteur. Ainsi, il traduisit en langue grecque des œuvres importantes de K. Axelos, H. de Balzac, G. Bataille, M. Blanchot, G. Courteline, M. Duras, J. Genet, W. Gombrowicz, B.-M. Koltès, A. Malraux, Molière, G. de Nerval, J.-P. Sartre, W. Shakespeare, T. Williams.

« La Ronde du carré »
© Alain Fonteray

Variations jusqu’à l’infini
Après une première mise en scène de Michael Marmarinos et une deuxième de Caterina Gozzi, c’est au tour de Giorgio Barberio Corsetti, nominé deux fois aux Molières 2009 pour sa précédente mise en scène de Gertrude, de nous faire connaître La Ronde du carré.
La structure de l’intrigue est prise dans le tourbillon des variations : douze scènes reviennent 6 fois en accélérant la cadence au fur et à mesure qu’elles se répètent sans cesse. L’histoire qu’amorce Dimitriadis ne trouve pas de point final : des fragments de vie amoureuse se succèdent en s’emboîtant et les situations entre des couples, qui s’affrontent au moment de la crise, se dénouent, toutes, par le meurtre et le suicide. Nous y voyons une série de quatre liaisons : une femme ayant quitté son domicile et souhaitant y revenir, un couple en consultation dont l’homme s’avère à tendance homosexuelle, une épouse trompant son mari avec son meilleur ami et deux homosexuels amoureux du même homme.
Mais malgré cela, l’atmosphère du spectacle ne s’assombrit guère car, marquée par la fantaisie des situations poussées à l’extrême, elle côtoie tant la drôlerie du paradoxe que le caractère exemplaire d’un univers symboliste.

Décors
Barberio Corsetti réussit magnifiquement un double travail, à la fois de metteur en scène formaliste et de directeur d’acteurs. Les décors géométriques de Christian Taraborrelli encadrent l’intrigue en lui imposant une forme lumineuse et rigoureuse. L’espace de la scène est construit pour être décomposable : un panneau rouge avec trois portes symétriques représentant le cabinet, la douche et le lavabo au fond de la scène, un second, orange, avec un carré noir au milieu, un mûr bleu, à cour, un mûr bleu, à jardin, avec un cercle et une pièce entière en forme rectangulaire avec un sol en pente posent le périmètre d’un endroit clos. Ces éléments composés, recomposés et décomposés s’unissent et se désunissent pour créer le contour de l’action. Dans cet espace qui fascine de ses lignes esthétiques, des objets étonnants trouvent leur place : un canapé et un fauteuil gonflables orange et un bureau avec une chaise suspendus aux perches du théâtre. A la fin, le plateau de la scène se relève devenant ainsi une pente glissante que les personnages escaladent ou ils se laissent rouler de haut en bas. Barberio Corsetti laisse la fin de la pièce ouverte en jetant pêle-mêle, de derrière la pente, des lettres en néon qui reconstituent le mot « continue ».
Le jeu des acteurs est remarquable dans son ensemble par son inventivité. Tous les personnages sont très expressifs et ils sont habillés avec élégance selon un code vestimentaire riche en couleurs, ce qui leur donne aussi une identité claire. Barberio Corsetti confirme son talent pour le grand spectacle !

Despina Nikiforaki

La pièce se joue actuellement à l’Odéon-Théâtre de l’Europe (Paris 6e) jusqu’au 12 juin.