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Galeries nationales du Grand Palais
Grand Palais : Marie-Antoinette

Le Grand Palais propose une exposition retraçant la grandeur et la décadence de Marie-Antoinette, dernière reine de la monarchie absolue.

Article mis en ligne le mai 2008
dernière modification le 27 septembre 2008

par Régine KOPP

En 2006, la cinéaste américaine Sofia Coppola avait évoqué à sa manière, distanciée et libre, le destin d’exception de la dernière reine de la monarchie absolue. Aujourd’hui, ce sont deux commissaires d’exposition, Pierre Arizzoli-Clémentel et Xavier Salmon, qui reprennent le même thème.

Pour éviter une accumulation de tableaux et objets d’art, ils donnent au thème une dimension théâtrale et le traitent sous forme de tragédie en trois actes. La scénographie – subtile et originale – est confiée à Robert Carsen, connu pour ses mises en scène d’opéras. Pour éclairer chacun des aspects de la personnalité de Marie-Antoinette, tant sur le plan de l’éducation que dans le domaine des arts, trois cents œuvres, en provenance de toute l’Europe, ont été rassemblées et mises en valeur par le scénographe.

Education
L’enfance de la reine dans les palais de Schönbrunn et de la Hofburg est suggérée par des pièces en enfilade. On nous montre que l’étiquette y est moins rigoureuse qu’elle ne le sera à Versailles. On suit les différentes étapes de l’éducation reçue par la petite archiduchesse, et digne de son rang. Elle apprend la musique, le chant, la danse et le dessin. Tout est également fait pour familiariser son œil à la beauté, suivant en cela l’exemple de sa mère Marie-Thérèse, promotrice des arts. Le jeu des alliances, qui décide de faire d’elle l’épouse du dauphin de France, le futur Louis XVI, la transplante à l’âge de 14 ans, en 1770, dans un autre pays où les us et coutumes diffèrent de sa Vienne natale.

Popularité
Quatre ans plus tard, elle monte sur le trône. Sa popularité est grande et la société du spectacle, qui ne date pas d’aujourd’hui, réclame aux souverains de régner par l’image. Ce que nous montre merveilleusement l’exposition : il s’agit de diffuser le portrait de la reine. Plusieurs artistes s’y essaieront mais seule, la femme-peintre Elisabeth-Louise Vigée Le Brun satisfera la souveraine.
Son portrait officiel de 1778, plein de grâce et de noblesse, souligne l’éclat du teint tout en adoucissant les traits des Habsbourg. Lorsque l’opinion publique lui sera moins favorable, l’artiste sera chargée de donner de la souveraine une image noble et protectrice : c’est le portrait pour le salon de 1783 qui la représente en déshabillé et qui fait scandale. Finalement, lorsque les choses iront de mal en pis, au moment de l’affaire du collier (une copie est montrée dans une vitrine) qui la discrédite encore davantage, la reine, consciente de l’impact de l’image, commande au peintre un tableau la représentant en famille, posant en bonne mère autour de ses enfants. Un portrait qui ne changera cependant rien à son image de Madame Déficit.
L’acte II nous montre une reine, émulatrice des arts de son temps. Elle s’attache à créer des intérieurs raffinés, passant commande de meubles à Jacob ou Riesener ou de services de porcelaine de Sèvres. C’est au Petit Trianon dont elle reçut la jouissance peu après l’accession au trône de Louis XVI, qu’elle règne en maîtresse, y organisant une vie d’un raffinement extrême mais aussi artificielle, coupée du monde et des réalités. Ce que Robert Carsen, grand ordonnateur de fastes royaux, met en scène avec jubilation, en créant un espace qui se scinde en deux scènes de théâtre, diurne et nocturne. Bien qu’ouvertes sur le ciel et la nature, ces salles n’en demeurent pas moins des décors qui masquent la réalité.

Descente aux enfers
Pour entrer dans l’acte III, celui de la chute, qui occupe l’étage inférieure du grand Palais, le visiteur descend l’escalier en colimaçon, tapissé de têtes de femmes aux perruques extravagantes, provenant du coiffeur de Marie-Antoinette. Arrivé en bas de l’escalier, le visiteur voit son image dans un immense miroir cassé, puis est conduit dans une longue salle sombre qui se rétrécit jusqu’à l’ultime portrait de la reine, sur la charrette qui la conduit à l’échafaud, un dessin attribué à Louis David. Sur les murs sont reproduits des pamphlets, des libelles et des estampes satiriques qui cristallisent les haines du peuple. Une longue descente aux enfers que rien n’arrête plus.
La reine est morte, vive le mythe !

Régine Kopp

Exposition jusqu’au 30 juin 2008