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Teatro allla Fenice, Venise
Venise : “La Bohème“

Les jeunes artistes apportent une fraîcheur bienvenue à ce drame de la jeunesse.

Article mis en ligne le avril 2011
dernière modification le 26 août 2011

par Françoise-Hélène BROU

Présentée pour la première fois au Théâtre Regio de Turin sous la direction d’Arturo Toscanini, le 1er février 1896, La Bohème est le second succès rencontré par Giacomo Puccini, âgé de 38 ans, après celui de Manon Lescaut (1893). Bien que se situant à Paris, l’œuvre illustre un courant important de la culture italienne d’après l’unification.

Composée en quatre tableaux sur un livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica tiré du roman Scènes de la vie de bohème d’Henri Murger, La Bohème demeure l’un des opéras les plus populaires du répertoire, tant par l’évocation d’un Paris romantique à souhait que par ses personnages feuilletonesque. Le casting réunit de jeunes artistes peu connus et dont la couleur vocale manque encore d’envergure, mais qui, incontestablement, apportent une fraîcheur bienvenue et adaptée à l’argument de ce drame de la jeunesse et de l’inexpérience. D’emblée le spectateur est frappé par une scénographie originale qui, à l’ouverture du premier tableau, déploie un vaste panneau lumineux, ajouré et incrusté d’images-clichés de Paris : tour Eiffel, Arc de Triomphe, Moulin de la Galette, etc.. Le tout étincelant comme autant de néons publicitaires et affichant les mille plaisirs promis par la vie nocturne de la Ville lumière.

« La Bohème »
© Michele Crosera

Enthousiasme et solidarité
Astucieuse et accrocheuse métaphore qui laisse entrevoir derrière cette barrière scintillante le décor, plus réaliste et modeste de la mansarde où vit Rodolphe, jeune poète et journaliste, calqué sur les modèles balzacien et baudelairien. C’est dans cette soupente où brûle un poêle, symbolisant l’ardeur des sentiments de nos protagonistes, que nous assistons à la rencontre de Rodolphe avec Mimì, une petite main fabricant des fleurs artificielles. Un premier contact qui amène les fameux airs de « Che gelida manina » et « Sì, mi chiamano Mimì » que tous les affectionados de la Fenice connaissent par cœur. La salle réagit d’autant mieux à ces arias célébrissimes que la représentation se déroule en pleine période de carnaval. La plupart des spectateurs, déguisés et masqués à cette occasion, entrent dès lors dans une sorte de transe et de fusion romantique avec l’argument du spectacle qui, à cet égard, se joue aussi dans les loges et au parterre. Ambiance assurée.

« La Bohème »
© Michele Crosera

Les tableaux se succèdent faisant alterner : scènes de rues de la vie parisienne ; effets de foules ; ambiance festive de cabaret ; une superbe évocation anachronique dans le métropolitain (inauguré en 1900) ; des paysages hivernaux comme surgis d’une toile impressionniste. Ces « tableaux » illustrent et ponctuent les moments de vivacité, d’enthousiasme, d’intimité, des deux premiers actes, puis ceux de la tristesse et de la douleur des deux suivants. Le drame se conclut avec la mort de Mimì, atteinte de tuberculose, dans les bras de Rodolphe, effondré par son incapacité à comprendre le mal qui la rongeait comme de lui venir en aide.
La Bohème est aussi une célébration de l’amitié et de la solidarité juvénile confrontée aux difficultés de la réalité et des choix de vie. De ce point de vue, les seconds rôles interprètent de façon convaincante cette jeunesse insouciante et généreuse, par leur présence scénique et dans un continuum sonore modelé sur les spécificités dramatiques du sujet. La direction de l’orchestre respecte les tempi et raccorde parfaitement les solistes et les deux chœurs (le chœur de la Fenice et un chœur d’enfants), elle met également en valeur les somptueuses sonorités de Puccini, mêlant lyrisme du 19ème siècle et accents résolument vingtièmistes, pour communiquer in fine au public une émotion à laquelle il ne peut guère se soustraire.

Un bémol, de taille…
Au début du spectacle un communiqué, diffusé par haut-parleur, informe l’assistance que les suppressions de subventions décidées par le gouvernement Berlusconi dans le domaine culturel conduiront certainement un grand nombre d’institutions à fermer leurs portes dans un proche avenir (entre 5 et 6 mois).

Françoise-Hélène Brou

Casting : Sébastien Guèze (Rodolfo) ; Seung-Gi Jung (Marcello) ; Armando Gabba (Schaunard) ; Luca Dall’Amico (Colline) ; Matteo Ferrara (Benoit) ; Andrea Snarski (Alcindoro) ; Lilla Lee (Mimì) ; Ekaterina Sadovnikova (Musetta) ; Luca Favaron (Parpignol) ; Ciro Passilongo (Le vendeur ambulant) ; Salvatore Giacalone (Le sergent des douaniers) ; Franco Zanette (Le douanier). L’Orchestre du Théâtre de La Fenice est dirigé par Juraj Valcuha, en alternance avec Matteo Beltrami. La direction du chœur est assurée par Claudio Marino Moretti. Régie : Francesco Micheli. Tableaux : Edoardo Sanchi. Costumes : Silvia Aymonino. Lumière : Fabio Barettin.
www.teatrolafenice.it