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A Lausanne, en marge du “Chat botté“.
Portrait : Emilio Sagi

Emilio Sagi sera à l’Opéra de Lausanne, fin mars, pour la mise en scène du Chat botté.

Article mis en ligne le mars 2009
dernière modification le 28 mars 2009

par Pierre-René SERNA

Pour présenter le Chat botté au public de Lausanne, l’Opéra de la cité des bords du Léman fait appel à un expert : Emilio Sagi. Car cet opéra d’après Charles Perrault est espagnol, né en 1948 de la plume du compositeur Xavier Montsalvatge. Et qui mieux que Sagi – par ailleurs une personnalité ouverte et attachante comme peu – pour illustrer scéniquement l’art lyrique espagnol ?

Emilio Sagi s’est fait un nom international en puisant à ses racines. Ce metteur en scène recherché par toutes les grandes maisons lyriques, du Châtelet à l’Opéra de Monte-Carlo, de l’Opéra de Los Angeles au Festival Rossini de Pesaro (où sa production remarquée du Viaggio a Reims continue à faire les beaux soirs), n’a cessé de défendre – avec quelle imagination et quel savoir-faire ! – le patrimoine opératique de son pays.

Revitalisation
Né dans les Asturies, il se dirige très vite, après des études de philosophie et musicologie, vers la mise en scène lyrique. Car voilà aussi un scénographe qui n’est pas passé par la case du théâtre parlé, se dédiant exclusivement au chant et à sa représentation. Traviata marque ses débuts dans sa ville natale (Oviedo), puis Don Pasquale suit. Sa carrière est lancée. Mais à son office reconnu de metteur en scène, il ajoute alors celui de directeur d’institutions lyriques : le Teatro de la Zarzuela de Madrid dans les années 90, puis le Teatro Real, l’Opéra de la même ville, de 2001 à 2005. Son action s’y distingue par un travail de revitalisation d’un répertoire autochtone plus ou moins délaissé dans son propre pays même : la zarzuela et l’opéra espagnol. Une tâche que peu ont entreprise, et réussie avec de tels fruits.

Emilio Sagi
© Jaime Gorospe

Tradition
Car il faut savoir qu’Emilio Sagi a de qui tenir en ce domaine, héritier d’une longue tradition familiale. Son grand-père, Emilio Sagi Barba, est baryton et l’un des piliers du Liceo (que l’on ne dénommait pas encore Liceu) de Barcelone, sa ville natale ; sa grand-mère, Luisa Vela, est soprano ; son père, Enrique, baryton, tout comme son oncle Luis. Cette famille de chanteurs cultive assidûment l’opéra, mais surtout la zarzuela, alors florissante dans les années 30 ; avec des compétences éclectiques, qui mènent aussi bien à diriger des orchestres qu’à prendre en charge des compagnies lyriques. Dans ce cénacle, le jeune Emilio est donc à bonne école. Il n’ignore rien du chant, des nécessités de la scène et des conditions d’un répertoire qu’il va bientôt ardemment fertiliser. La suite sera celle, partagée et célébrée, d’une carrière consacrée à la mise en scène lyrique, tous genres confondus, et à la valorisation éclairée d’un patrimoine spécifique.

A Lausanne
Un petit mot sur le Chat botté, “El gato con botas”. Son auteur, Xavier Montsalvatge (1912-2002) appartient à la génération espagnole qui succède au fameux trio Falla-Albéniz-Granados. C’est celle des Turina, Sorozábal ou Torroba, qui se caractérise par un langage musical néo-classique (à l’instar de Milhaud ou Poulenc en France), avant la vague ravageuse, en Espagne comme ailleurs, des compositeurs post-sériels. Son Chat botté se destine à de grands enfants, de ceux qui savent se laisser charmer par une musique délicate tout en relevant les complexités de l’écriture. Créé à Barcelone en 1948, il sera remis au goût du jour par le Teatro Real de Madrid en 2005. C’est cette production que reprend l’Opéra de Lausanne, mais sur un livret réécrit en français pour la circonstance. Une découverte, à n’en pas douter, pour beaucoup de mélomanes suisses. Gageons qu’ils seront conquis, et d’autant mieux avec le talent d’Emilio Sagi au service de l’œuvre.

Pierre-René Serna

Opéra de Lausanne ; les 18, 20, 21, 22 et 25 mars (loc. 021/310.16.00)