Arts-Scènes
Slogan du site

Cinéma Danse Expositions Musique Opéra Spectacles Théâtre

Opéra de Marseille
Marseille : “Der Rosenkavalier“

Magnifique Chevalier à la Rose à Marseille !

Article mis en ligne le novembre 2009
dernière modification le 1er décembre 2009

par François JESTIN

La saison démarre sous les meilleurs auspices à l’Opéra de Marseille avec un Chevalier à la Rose parfaitement crédible et de haute qualité.

Placé sous la direction musicale de Philippe Auguin, l’orchestre de l’Opéra démontre brillamment que cette difficile et exigeante partition de Richard Strauss est tout à fait dans ses cordes. Les cordes justement, sont raffinées et délicates dans les soli ou petits ensembles, et bien présentes et majestueuses lorsque le flot orchestral se fait plus dense. Les autres pupitres sont aussi à saluer, en particulier les bois précis et mélodieux, les cuivres qui ne couaquent pas, et jusqu’aux harpes et percussions placés dans les avant-scènes à jardin et cour.

Le Chevalier (Kate Aldrich) apporte la rose
© Christian Dresse

La distribution vocale est également très homogène, avec une révélation ce soir, la prise de rôle de la pétulante et juvénile Kate Aldrich (Octavian). La voix est superbement timbrée et riche, les aigus sortent victorieux, et l’expressivité de son jeu – souvent celui d’un adolescent tout feu, tout flamme – passe d’abord par son visage. Les œillades lancées à Sophie, ou les yeux qui roulent, tête baissée, pour laisser passer la colère, sont des moments mémorables. Le timbre de Gabriele Fontana (la Maréchale) surprend d’emblée, en paraissant vieilli, et presque en décalage avec sa remarquable plastique. Cette fêlure dans la voix amène certainement une couleur plus animale (sans doute plus wagnérienne) qu’aristocratique au personnage, mais convient idéalement aux multiples réflexions sur le temps qui passe (fin des I et III). Margareta Kobucar (Sophie) démarre un peu timidement, avec des aigus tout juste assurés, mais finit par tenir son rang dans le sublime trio final. La basse Manfred Hemm (Baron Ochs) ne dispose pas exactement de la tessiture du rôle : les graves profonds sont plutôt sourds, et l’aigu détimbre presque systématiquement, à la limite de l’incident. Son impayable accent viennois rattrape l’ensemble, même si le jeu manque peut-être d’un peu de truculence.
Dans les rôles secondaires, on remarque le sonore Lionel Lhote (Faninal), qui a tendance à hacher un peu le texte, le très bon Olivier Ringelhahn (Valzacchi), et le joli chanteur italien de Avi Klemberg, dont les spectateurs apprécient l’oasis de belcanto dans ce long fleuve viennois.

La production de Dieter Kaegi, montée pour l’Opéra de Monte-Carlo, est extrêmement classique, contrairement à certaines de ses mises en scène antérieures (on se souvient des néons et hologrammes de sa Semiramide montée à Pesaro il y a quelques années, située quelque part entre Cape Canaveral et Rencontres du 3ème type). La première image est somptueuse : le petit jour pointe, une ambiance vaporeuse sur des massifs de fleurs en arrière-plan, le couple d’amoureux qui s’enlacent dans le lit (Octavian y est très entreprenant !). Un rideau d’argent monumental sera entrouvert au II pour l’arrivée du Chevalier, puis les majestueux rosiers dans toute leur splendeur seront enfin découverts au III, en bordure de l’auberge.
Le jeu des acteurs a été bien travaillé et semble nature ; ceux-ci semblent toutefois à l’étroit par moments sur le plateau, en raison de l’encombrant volume occupé par la partie végétale du décor.

François Jestin

Strauss : DER ROSENKAVALIER : le 2 octobre 2009 à l’Opéra de Marseille