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Opéra de Marseille
Marseille : “Aida“
Article mis en ligne le février 2009
dernière modification le 17 mars 2009

par François JESTIN

Annoncée comme une coproduction avec les Chorégies d’Orange (voir SM 188 pour la chronique du spectacle donné en juillet 2006), la nouvelle réalisation de Charles Roubaud à Marseille n’a pas grand-chose à voir avec ce qui avait été montré devant le mur du théâtre antique.

Le principe de projections d’images sur les parois en fond de scène a cependant été appliqué cette fois jusqu’à l’extrême, à tel point qu’on se croirait par moments dans une soirée diapos entre amis, de retour d’une croisière touristique sur le Nil. Certes les diapositives sont fort belles – temples gardés par les dieux égyptiens, séries de hiéroglyphes, croix coptes, … – et le procédé est encore amplifié par quelques séquences filmées, comme ces gros plans sur des soldats se déplaçant au ralenti, pour la marche triomphale. On ne relève strictement aucun élément de décors sur le plateau – mis à part une paire d’estrades pour Amneris et son papa le roi d’Egypte pendant le défilé – et on imagine que la décoratrice (Emmanuelle Favre) n’a tenu qu’une place modeste face aux animations vidéo, assurées par la société Graphbox. Le coup d’œil sur scène est très joli pendant toute la soirée, mais des projections filmées – qui ont l’avantage de réduire les coûts de production, du moins on l’espère ! – ne sauraient constituer une véritable mise en scène d’opéra, le jeu des acteurs s’avérant par ailleurs correctement réglé, sans plus. Les beaux costumes de Katia Duflot suivent le noir (les Ethiopiens) et blanc (les Egyptiens), et la chorégraphie de Laurence Fanon sort de l’ordinaire pour les danses hyper dynamiques et quasiment tribales des Ethiopiens à l’acte II, même si on peut se demander pourquoi ces prisonniers semblent si joyeux et déchaînés.

« Aida »
© Christian Dresse

Concernant les solistes, l’Aida de la Noire américaine Adina Aaron irradie le plateau de sa beauté et de sa voix, très présente du grave à l’aigu, et les pianissimi sont exquis. La mezzo Béatrice Uria-Monzon (Amneris), après une prudente entrée en scène, presque timide avec plusieurs piani à la limite de l’audible, s’affirme ensuite en déployant son timbre, impressionnant dans le grave. Le ténor Walter Fraccaro, pourtant très habitué du rôle de Radames, rencontre de sérieux problèmes de justesse, et déçoit fortement. Si le volume et la projection de Ko Seng-Hyoun (Amonasro) sont toujours aussi époustouflants, il faut aussi lui reconnaître une ligne de chant somptueuse et expressive, qui en fait sans doute aujourd’hui un des plus beaux barytons Verdi. Côté basses, Dmitry Ulyanov (le Roi) est plus sonore mais moins musicalement précis que Wojtek Smilek (Ramfis). Le chef Nader Abbassi, actuel directeur musical de l’Opéra du Caire, cisèle délicatement les passages lents, mais ne maîtrise pas totalement le volume de la fosse dans les grands ensembles, ni quelques départs à donner aux choristes, ces derniers s’avérant par ailleurs remarquables dans les passages pianissimi, backstage. Au final, un chaleureux succès public pour toute l’équipe.

François Jestin

Verdi : AIDA : le 2 décembre 2008 à l’Opéra de Marseille