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Londres, Royal Opera House
Londres : ”Orlando“

Belle surprise que cette représentation d’Orlando, qui offrait l’image d’un monde délicieux et onirique.

Article mis en ligne le mai 2007
dernière modification le 15 juillet 2007

par Philippe BALTZER

Disons-le franchement ! On n’attendait que peu fort de choses de ces quelques heures en compagnie de cette œuvre de George Frederic Handel : 240 minutes de duos, un livret inspiré d’un poème d’Aristote brodant sur les hésitations amoureuses d’un improbable héros et de sa dulcinée ... et un premier rôle tenu par un contre-ténor ! Encore une soirée pas folichonne en perspective ...

On avait évidement tout faux !
La première bonne surprise est dans la fosse : Sir Charles Mackerras (82 ans) dirige l’excellent « Orchestre of the Age of Enlightenment » avec un bonheur paternel et communicatif. Alors que la majorité de ses homologues s’efforcent de rendre moderne la musique baroque en jouant « plus vite et plus fort », Sir Charles nous restitue la véritable respiration et la diversité des couleurs de cette musique, en magnifiant ses moments héroïques, tendres, sombres ou radieux. Du grand art.

Bejun Mehta en Orlando (Covent Garden Mars 2007).

Deuxième heureuse nouvelle, une distribution exceptionnelle et homogène, porte cette œuvre d’un bout à l’autre de la soirée. Bejun Mehta (contre-ténor et vague cousin de Zubin) est un Orlando charismatique et d’une aisance époustouflante dans tous les spectres de sa tessiture. Malgré les difficultés, il survole les douze arias de sa partition avec une grâce et une virtuosité remarquable. Les quatre autres personnages sont également servis par des chanteurs d’excellente qualité ; citons pour le plaisir Kyle Ketelsen qui incarne un solide Zoroastro et Camilla Tilling piquante et fort drôle dans le rôle de Dorinda.
On mesure le défi que représente la mise en scène de ces cinq héros antiques (et statiques !) errant dans un monde fantastique ou enchanteur tout en déroulant un écheveau de sentiments croisés. Francisco Negrin choisit de placer cette intrigue au cœur d’une ravissante tournette aux couleurs changeantes : une face inspirée de Gainsborough, une autre peinte d’un bleu cher à Yves Klein et une dernière ... changeante au gré des humeurs du plateau. Le passage d’un duo à un autre se faisant au travers d’une simple porte reliant les différentes faces du dispositif. Cette simplicité géniale contribue grandement à la fluidité du spectacle. Une autre trouvaille du metteur en scène illumine la soirée : trois danseurs (Eros, Mars et Venus) dont les silhouettes évoquent Botticelli, traversent le spectacle en encourageant, consolant, caressant ou protégeant chaque personnage.

Les quatre heures de cet Orlando passent comme un rêve, et lorsque le rideau tombe, on souhaiterait qu’il se relève immédiatement afin de pouvoir à nouveau rejoindre ce monde délicieux et onirique.

Philippe Baltzer