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Grand Théâtre de Genève
Entretien : Daniel Dollé

Rencontre avec Daniel Dollé qui évoque sa fonction au Grand Théâtre.

Article mis en ligne le novembre 2009
dernière modification le 26 novembre 2009

par Anouk MOLENDIJK

Daniel Dollé est dramaturge et conseiller artistique du Grand Théâtre de Genève. Il s’est volontiers prêté au jeu des questions de Scènes Magazine.

Comment définiriez-vous votre fonction au sein du Grand Théâtre ?
Mes titres officiels sont conseiller artistique et dramaturge. Ces deux fonctions sont étroitement liées, car être conseiller artistique implique d’avoir une réflexion dramaturgique sur les œuvres. Je suis l’interface de Tobias Richter avec la technique, les metteurs en scène, les chefs d’orchestre, les chanteurs… Je suis responsable de la programmation, qui est le résultat d’un dialogue, d’une collaboration avec Tobias Richter. Étre conseiller artistique, c’est un rapport à l’autre. Pour moi le théâtre doit être un lieu de partage, du vivant : c’est le cœur de la cité, qui lui insuffle ses pulsations propres.

Vous êtes arrivés avec la nouvelle équipe du Grand Théâtre, dirigée par Tobias Richter. Quels sont vos rapports avec lui et avec l’équipe ?
Je le connais depuis très longtemps, c’est un ami de longue date. Le milieu du théâtre est un microcosme, je retrouve ici des gens avec qui j’ai déjà travaillé, comme la chef des chœurs, le directeur technique du ballet... Lorsque Tobias m’a proposé de le suivre à Genève, c’était une continuité logique de notre relation, cela s’est fait très simplement. On a des habitudes de travail, on connaît nos qualités et défauts, il y a une compréhension, une loyauté. Nous avons développé au cours de cette relation à long terme une complicité, un dialogue silencieux. Je sais ce qu’il attend de moi, et il sait ce qu’il peut attendre de moi. Il est très important d’avoir ce rapport de confiance, ainsi que des valeurs telles que l’amitié.

Daniel Dollé
© Yunus Durukan

On peut voir dans la programmation de cette saison des œuvres moins populaires, telles que L’Etoile, de Chabrier, côtoyant de grands titres tels que Don Giovanni ou Parsifal.
Pour moi L’Etoile est le « bijou des bijoux », même si elle n’a pas été bien perçue à son époque. On est dans la tradition de l’opérette mais tout est décalé : on peut y déceler une préfiguration du surréalisme et du dadaïsme. Cette œuvre permet de vastes interprétations, et est aussi un joyau musical qu’on ne peut plus ignorer, comme ce couplet du bal qui préfigure à la fois Jarry et Satie. Bien sûr, on va retrouver aussi des œuvres plus connues comme Don Giovanni, dans la première mise en scène de Marthe Keller en Suisse. Il y aura des œuvres jamais données, telles que La Donna del Lago, avec Joyce di Donato, mis en scène par Christof Loy, qui a été nommé trois fois metteur en scène de l’année par la critique, La Calisto au BFM, et une œuvre contemporaine qui a été très peu jouée, Alice in Wonderland, autour de laquelle on tissera des liens, notamment avec un concert de Contrechamps sur des œuvres d’Unsuk Chin. A travers cette programmation, on aura parcouru quatre siècles.

En quoi est-ce que votre activité de metteur en scène pourrait influencer votre fonction de conseiller artistique ?
C’est un couteau à double tranchant, avec des aspects positifs et négatifs. En temps que metteur en scène, on connaît la problématique de la scène, le cœur de l’action. Mais on connaît moins le côté organisationnel et logistique, le nombre d’heures de travail. Il est surtout primordial de pouvoir se séparer de ses goûts. Il faut pouvoir apprécier le travail de l’autre même si ce n’est pas notre univers esthétique. En art, tout est subjectif, mais il faut faire rentrer une part d’objectivité. Par exemple, on ne peut pas faire une saison entière autour de la musique contemporaine parce que l’on aime ça, car cela exclurait une part du public.

Comment se présentent les « 1/2 heure avant » que vous animez ? Pourquoi avoir réduit la durée de la présentation d’une heure à une demi-heure ?
« Les 1/2 avant » sont encore quelque chose que je veux perfectionner. Si nous avons réduit la durée de la présentation, c’est parce que tout le monde ne peut pas venir à 18h45 pour la représentation à 20h, et il y a déjà les conférences du Cercle la veille de la première. Pendant environ un quart d’heure, on tente de donner aux spectateurs des clés pour comprendre l’œuvre. Pour moi une œuvre ne s’explique pas uniquement par des considérations harmoniques, mais je peux rendre attentif à des thèmes, à la réception. J’aimerais que ces conférences soient au futur téléchargeables à partir du site du Grand Théâtre.

Propos recueillis par Anouk Molendijk