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Opéra de Lausanne
Entretien : Benedicte Tauran

Benedicte Tauran sera La Fille de Madame Angot à Lausanne.

Article mis en ligne le décembre 2010
dernière modification le 15 décembre 2011

par Martine DURUZ

La jeune cantatrice originaire de Limoges vit en Suisse depuis quinze ans. Elle a déjà chanté de grands rôles, comme Susanna, Zerlina Musetta, Annchen, Didon, principalement sur les scènes françaises et suisses. Elle fait partie de la jeune troupe du Grand Théâtre créée par son directeur Tobias Richter il y a une année.

Doublure de Rosine dans le Barbier de Séville, elle a incarné Berta dans ce même opéra, après avoir participé à la récente production de la Donna del lago. Elle sera à nouveau sur les planches de la Place neuve dans Elektra, et à Lausanne du 26 décembre au 2 janvier dans La Fille de Madame Angot.
Benedicte Tauran est entièrement dédiée à son art : elle n’a pas pris de vacances depuis deux ans, et n’a guère le temps, dit-elle, de faire « autre chose », mais cela ne lui manque pas.

Benedicte Tauran sera Clairette lors des représentations, à l’Opéra de Lausanne, de « La Fille de Mme Angot »

Nous l’avons rencontrée juste avant la Messe en si, à laquelle elle participait le dimanche 31 octobre au Victoria Hall.
Benedicte Tauran n’a jamais douté de son orientation. Enfant, elle a intégré les classes à horaire aménagé pour les musiciens, puis passé son bac avec musique et littérature comme matières principales. Après ses études de chant, flûte et clavecin dans sa ville natale, elle décide de continuer la flûte à bec à la Schola Cantorum de Bâle. Mais elle s’aperçoit vite que la voix est son premier instrument. Elle trouve donc un professeur, à Neuchâtel, Jeanne Roth, et passe son diplôme quatre ans plus tard. Chaque professeur a été pour elle important, mais en particulier Daniel Delarue, qui a été le premier et lui a fait « sortir les tripes », et récemment Maria Casoni, qui lui a fait mieux comprendre la technique italienne et l’a aidée pour les aigus.

Ses atouts
Les langues. Elle a appris l’allemand à Bâle et perfectionné son italien et son espagnol à….. Bâle aussi (!) grâce aux nombreux étudiants étrangers qui l’entouraient.
La polyvalence. Elle a l’expérience de la musique baroque grâce à sa formation ; elle possède non l’oreille absolue mais la « gorge absolue », qui lui permet d’exécuter les œuvres contemporaines sans sueurs froides ; elle maîtrise une technique adaptée à Mozart tout comme au bel canto.
Une carte de visite .Outre la liste déjà longue de ses engagements, les récompenses suivantes pourraient y figurer : Prix Mozart à Genève en 2003, Deuxième Prix du Concours International Mozart de Salzbourg en 2006 et Premier Prix en 2008 au Concours International Marcello Viotti.

Maquette de costume du spectacle par Dominique Borg

Son répertoire
Elle considère que sa voix se situe entre le soprano lyrique léger et le soprano lyrique. Son souci est de toujours choisir des rôles qui conviennent à ses possibilités, les mozartiens en tête. Elle se souvient de la production de Don Giovanni au théâtre de Rennes, retransmise sur écran géant devant 3000 personnes, que les artistes sont allés saluer à l’issue de la représentation. Un souvenir inoubliable, même s’il n’a pas été facile au début de s’approprier les gestes stéréotypés de la commedia dell’arte voulus par le metteur en scène. Zerlina, Susanna, bientôt Ilia, ou peut-être Donna Anna, des personnages qu’elle gardera sans doute dans son répertoire. Elle espère aussi Juliette (Gounod) et Manon (Massenet).
Lully et Marais exigent une utilisation différente de la voix mais elle n’est d’accord de collaborer qu’avec les chefs qui admettent un instrument plus corsé. Rameau ? Oui, mais cela dépend avec qui ! En tout état de cause elle trouve que la tessiture souvent limitée, moins brillante, des œuvres baroques fait qu’il est ensuite plus problématique de repasser à d’autres emplois.

Les obstacles
Benedicte Tauran dit ne pas être déçue ou frustrée par les seconds rôles qui lui sont attribués à Genève. Elle n’a pas l’impression de perdre son temps, car elle est contente d’avoir rejoint une troupe, ce qu’elle n’avait pas recherché jusqu’ici ; elle aime appartenir à un lieu, qui de plus a une réputation internationale, et apprécie la sécurité financière que représente un tel engagement.
La principale difficulté qu’elle a rencontrée est le manque de préparation à la planification d’une carrière. Les jeunes chanteurs ne reçoivent pas une aide suffisante, ne sont pas assez encadrés. Au début, elle se demandait avec une certaine angoisse : Comment commencer ?

Les récitals
Benedicte Tauran souhaiterait s’y consacrer davantage. Cela nécessite beaucoup de travail et de temps. Elle a un faible pour Poulenc, mais aussi Debussy et Fauré, et bien sût Schubert, Brahms, Schumann… Son partenaire préféré : Todd Camburn, chef de chant au Grand Théâtre, pianiste au toucher sensible, toujours à l’écoute, présent, concentré et encourageant. « Il y a une complémentarité entre nous », explique-t-elle.
Quant à la musique sacrée, on fait souvent appel à elle pour les Passions, le Magnificat et les Cantates de Bach. Elle accepte, pour des raisons artistiques uniquement. Car elle ne va à l’église, dit-elle, QUE pour chanter !

D’après des propos recueillis par Martine Duruz