Arts-Scènes
Slogan du site

Cinéma Danse Expositions Musique Opéra Spectacles Théâtre

Opéra d’Avignon
Avignon : “Fidelio“

L’Opéra d’Avignon proposait un lecture de Fidelio diversement appréciée des spectateurs.

Article mis en ligne le juillet 2007
dernière modification le 21 juillet 2007

par François JESTIN

Une direction musicale particulièrement inspirée à Avignon, au service de grandes voix, à commencer par celle de la soprano américaine Janice Baird, dans une production diversement appréciée des spectateurs.

Fidelio est apparemment une œuvre qui convient parfaitement au chef bulgare Emil Tabakov, et sa direction est enflammée. De nombreux passages orchestraux sont portés solennellement, les volumes sont variés, et le son semble planer sur certains diminuendi magnifiquement exécutés, même si les cordes ont parfois un peu de mal à suivre les cadences rapides. Le son des chœurs se révèle de bonne qualité – ceux de Toulon et Avignon sont réunis pour cette production – une fois passées certaines attaques imprécises.

Anne-Catherine Gillet (Marzelline), Nicolas Cavallier (Rocco), et Janice Baird (Leonore) © Cédric Delestrade / ACM-Studio

Anne-Catherine Gillet (Marzelline) semble rayonner sur scène dans son rôle de jeune amoureuse : sa soprano est lumineuse et intense. Dès son entrée en scène, on décèle chez Janice Baird (Leonore – Fidelio) une belle voix sombre de wagnérienne, mais qui rencontre de subtils défauts de justesse au début de chaque acte. La voix de soprano dramatique s’épanouit ensuite, et les aigus sont projetés et remplissent l’entier volume du théâtre. Elle vit son personnage intensément, jusqu’à la fébrilité. Florian Laconi (Jaquino) est un joli ténor lyrique, mais un peu discret dans ce rôle allemand. On apprécie beaucoup la basse Nicolas Cavallier (Rocco), très présente, à la voix bien timbrée qui porte. Le Florestan de John Keyes a un potentiel de Heldentenor, mais de trop nombreux aigus sonnent carrément comme des mini-couacs, et il est trop sur le fil pour être considéré comme une valeur sûre, tandis que Werner van Mechelen (Don Pizzaro) délivre un chant confidentiel, presque sans projection, et très loin de son personnage de grand méchant. Très bien en revanche la basse Jean Teitgen dans le rôle de Don Fernando.

En changeant visiblement les lumières, par rapport aux représentations marseillaises de la saison passée, la production de Jean-Claude Auvray accentue le côté blafard de cet univers carcéral : devant les murs de béton clair, les prisonniers barbouillés de blanc sur le visage passent comme des fantômes. Une constante de la mise en scène est aussi la forte présence militaire : mis à part les gardiens de la prison, des soldats et gradés font brutalement irruption sur le plateau, jusqu’à des policiers cagoulés, type GIGN. Même si les femmes des prisonniers écrivent en plusieurs langues le mot « liberté » sur le rideau de scène, avant la libération finale, Auvray conserve une vision foncièrement pessimiste de cette nouvelle liberté acquise, et l’expose dans une saynète, après les dernières notes de musique. A l’inverse du message habituel de démocratie et d’humanité contenu dans l’œuvre de Beethoven, Don Fernando ramène des prisonniers, et se transforme en bourreau : c’est lui le nouveau dictateur. Alors que la production avait été applaudie plutôt chaleureusement à Marseille, quelques spectateurs avignonnais n’apprécient que moyennement et chahutent le metteur en scène au rideau final.

François Jestin

Van Beethoven : FIDELIO : le 17 avril 2007 à l’Opéra d’Avignon