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Opéra d’Avignon
Avignon : “Aida“

Aida intimiste à Avignon.

Article mis en ligne le juin 2010
dernière modification le 2 août 2010

par François JESTIN

Assez éloignée des productions monumentales montées dans l’Arène de Vérone ou au Stade de France, la représentation avignonnaise permet d’assister
à une autre Aida, plus intimiste.

La mise en scène de Paul-Emile Fourny, créée à l’Opéra de Nice en 2005, est complètement conventionnelle et figurative : les maçons s’affairent à lisser parois et colonnes dès le lever de rideau, une toile de palmiers et pyramides habille le fond de plateau, avec un scribe présent tout au long du spectacle. La très courte animation vidéo avant la marche triomphale (type Google Earth, qui part d’un ciel nuageux pour atterrir aux pyramides) en tombe un peu comme un cheveu sur la soupe. Du fait de l’exiguïté du plateau, les décors de Jean-Pierre Capeyron n’en sont que plus imposants, avec une forte densité d’artistes au mètre carré. Mais dans cette salle, c’est bien le drame humain qui ressort, à condition tout d’abord de maîtriser le flot musical. Sur ce point, le chef Rani Calderon obtient un formidable résultat des forces en présence : dès les premières mesures les musiciens sont très attentifs, et même si on entend quelques approximations plus tard, le résultat est plus qu’honorable, avec un équilibre fosse – plateau toujours sous contrôle. Les chœurs, et particulièrement la partie masculine avec la belle entrée des prêtres, sont aussi très appliqués. La musique montre beaucoup de caractère et de profondeur, et le choix des tempi est pertinent, peut-être sous la réserve de quelques accélérations et ralentis excessifs autour de la marche triomphale.

Indra Thomas (Aida)
© ACM – Studio Delestrade

La distribution est dominée par la présence de la soprano Indra Thomas dans le rôle-titre. Déjà entendue dans cet emploi aux Chorégies d’Orange en 2006 (voir SM 188), l’actrice est toujours aussi impressionnante, elle vit son conflit intérieur entre amour et devoir en roulant des yeux et déployant une gestuelle des mains plus que crédible. Du point de vue vocal, les moyens imposants sont toujours là, entre aigus puissants et graves profonds, mais quelques passages sont un peu désordonnés et le style reste perfectible, comme à Orange il y a 4 ans. Le ténor coréen Jeong-Won Lee (Radamès) se situe à l’exact opposé pour ce qui concerne le jeu théâtral : planté comme un piquet, il semble impassible et très loin du tempérament méditerranéen. Les aigus sont brillamment claironnés, mais le reste de la tessiture est bien plus terne : manque de mordant dans les attaques, ainsi que grave et medium parfois trop confidentiels. Elena Manistina (Amneris) se sort vaillamment de sa partie, malgré sa voix peu étendue : elle négocie habilement certains graves qu’elle ne semble pas posséder naturellement, et à l’autre extrême ne tient pas sa note finale sur « Anatema su voi ». Le baryton Carlos Almaguer (Amonasro), déjà entendu dans cette production à Nice puis Toulon, est toujours aussi solide et expressif, transformant le duo Aida – Amonasro en un sommet de la soirée. A noter enfin le soin apporté aux rôles secondaires : la basse Jean Teigten (Il Re) timbre superbement ses graves, et Nicolas Courjal (Ramfis) remplit correctement son office.

François Jestin

Verdi : AIDA : le 27 avril 2010 à l’Opéra-Théâtre d’Avignon