En dehors du mois de juillet (festival oblige !), les spectacles lyriques sont bien trop rares à Aix-en-Provence pour ne pas se précipiter au concert de June Anderson, qui clôt la saison du Grand Théâtre de Provence.
Formidable June Anderson !

Les années passent, et même si les moyens de la soprano américaine se sont un peu émoussés depuis 25 ans, l’émotion et le frisson sont toujours au rendez-vous. La barre est placée très haut – trop peut-être ? – en ouvrant le programme par l’air d’entrée de Semiramide de Rossini : la technicienne assure l’ensemble des écarts et vocalises, mais avec une voix pas encore suffisamment chauffée pour masquer quelques rares notes de passage inconfortables. Norma et Sonnambula la montreront un peu plus tard sous son meilleur jour, avec, particulièrement dans les passages élégiaques, des nuances forte – piano et des variations de couleurs qui en remontreraient à bon nombre de ses jeunes consœurs actuelles.

En deuxième partie, l’air du Saule de l’Otello de Verdi touche au sublime : les notes planent dans un impressionnant silence, et le drame est intensément vécu de l’intérieur. Le grand air d’Imogene du Pirata bellinien, puis les rappels (Valse de Juliette, puis habituel « Bambino caro »), prouvent à nouveau qu’Anderson reste, à 56 ans aujourd’hui, l’une des artistes majeures du monde lyrique. Elle est malheureusement accompagnée ce soir par Philippe Bender, aux commandes de son Orchestre de Cannes PACA, non spécialiste de ce répertoire belcantiste, qui tombe rapidement dans tous les travers interprétatifs (souvent trop fort, trop lent, trop prosaïque). On peut aussi se poser quelques questions à propos d’un public qui applaudit, à la même intensité, une tonitruante et peu finaude ouverture de Norma, puis un sublime air du Saule…

François Jestin

Concert June ANDERSON : le 6 mai 2008 au Grand Théâtre de Provence – Aix-en-Provence