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Au Victoria Hall de Genève
Genève : Tania León

Tania León revient à Genève pour un concert de Noël intitulé « Give us hope ».

Article mis en ligne le décembre 2009
dernière modification le 25 janvier 2010

par Beata ZAKES

Il y a dix ans exactement, la compositrice et cheffe d’orchestre cubano-américaine Tania León enthousiasmait les spectateurs du Grand Théâtre de Genève lors de la présentation de son opéra dans une mise en scène signée Bob Wilson. Très attendue, elle revient pour un concert de Noël : une personnalité haute en couleurs pour une soirée arc-en-ciel !

De son île de Cuba natale, Tania León a gardé en mémoire son enfance et sa jeunesse baignées dans la musique. Elle se souvient encore lorsque, élève du conservatoire, elle interrompait ses gammes au piano pour courir à la fenêtre et voir se former un défilé de carnaval. Peu après, elle se remettait à Chopin ou Bach, les oreilles pleines de rythmes déhanchés et chauds : congas, guitare, trompette latinos… Sa composition Indígena – une sorte de « credo interculturel cross-boarder » – est nourrie de ces échos. Le repertoire classique au bout des doigts, la salsa cubaine dans les oreilles, le sang français, chinois, africain et espagnol dans les veines… la jeune musicienne était prête à devenir « citoyenne du monde » et porter la musique sur toute la surface du globe.
Née à La Havane en 1943, Tania León s’expatrie à New York en 1967. Elle y suit des cours de direction d’orchestre auprès de… Leonard Bernstein et Seiji Ozawa, tout en continuant ses études de piano. Bientôt elle se lance dans une carrière trépidante, aux multiples axes, dont les principaux sont : femme-maestro, compositrice et « artiste engagé e », chargée de différentes fonctions à responsabilité au niveau international. Jusqu’en 1980, elle est à la tête du Dance Theatre de Harlem. Dans les années 90, elle se voit confier par Kurt Masur le poste de conseiller pour la musique nouvelle au New York Philharmonic. En mars 2008, elle est nommée Ambassadrice Culturelle des Etats-Unis à Madrid. Elle a reçu de prestigieux prix et récompenses, comme le New York Governor’s Lifetime Achievement Award en 1998 ou le Guggenheim Fellowship Award en 2007. Elle se consacre au travail pédagogique en enseignant comme visiting professor à Harvard, Yale, au Brooklyn College ou à Hambourg.

Tania León

Une femme à la baguette
La Britannique Marin Alsop, la Française Emmanuelle Haïm, la Polono-Uruguayenne Giselle BenDor et Tania León… De nos jours, les femmes sont de plus en plus nombreuses à monter sur le podium. Toutes considérées comme pionnières, elles ont simplement suivi les traces de… Nadia Boulanger, la première maestra à diriger les orchestres symphoniques de New York et de Boston. Dans son parcours, Tania León, qui s’apprêtait à triompher comme pianiste, doit beaucoup au hasard : en 1968, une année à peine après son arrivée à New York, une amie malade lui a demandé de la remplacer dans les classes de ballet du Harlem School of Arts… Quelques mois plus tard à peine naissait The Dance Theater of Harlem dont la pianiste a assuré la direction musicale. La double carrière de cheffe d’orchestre et de compositrice a ensuite été stimulée par une simple invitation d’Arthur Mitchell, premier danseur afro-américain, principal au New York City Ballet : « Ecris un morceau, je ferai la chorégraphie ! » Vu le succès de ce projet, le chorégraphe l’a ensuite « poussée » sur le podium : « Voyons donc, pourquoi tu ne dirigerais pas ? » Aujourd’hui, après des années d’expérience, Tania León reconnaît que mener de front cette double activité s’est avéré être pour elle une sorte de « grâce salutaire » : « Conduire nous apprend beaucoup sur la composition », affirme-t-elle, tout en s’émerveillant devant l’universalité du langage musical dans la communication de musicien à musicien.
Atteindre cet « autre niveau », au-delà de l’entente verbale, c’est, dans son opinion, le but ultime et quand cela marche, « c’est juste merveilleux » !
Dans sa musique, elle cherche des correspondances, entre mélodie, danse, chant et mots. Elle a cherché de l’inspiration auprès des poètes et écrivains, ses contemporains : Wole Soyinka (opéra Scourge of Hyacinths), Derek Walcott (les deux Prix Nobel noirs), ou encore Isabel Allende (nièce du président Allende) ainsi que de nombreuses autres personnalités. Elle sollicite le recours à l’improvisation : « Ça fait partie de la culture cubaine », explique-t-elle, dans une interview donnée à Frank J. Oteri pour NewMusicBox. Simultanément, elle s’amuse à suivre les tentatives de nombreux critiques musicaux à cerner son style : « Je suis encore en train de grandir, j’apprends encore… »

Noël à Genève
Après avoir donné un concert à la Cathédrale de Saint-Pierre, dans le cadre des célébrations de l’ONU, Tania León offrira aux mélomanes genevois un vrai tour du monde musical en guise de cadeau de Noël. Elle dirigera à l’occasion le Young People’s Chorus of New York, une jeune chorale américaine, symbole de « melting pot » et tolérance, qui regroupe les voix venant de différentes peuples, religions et horizons… Pas étonnant qu’ils aient déjà été applaudis à Washington, chez le Président Obama ! Parmi le programme international, Tania León glissera une de ses compositions : chaleureuse, modeste, généreuse ; ces trois qualificatifs lui correspondent bien !

Beata Zakes

« Give us hope ». Concert de Noël le 10 décembre 2009, 20h au Victoria Hall. Au programme : œuvres de A. Copland, K. Jenkins, B. Martinu, L. Bernstein, P. Casals, J. Lennon, T. León et mélodies traditionnelles de divers pays. OCG et Young People’s Chorus of New York, dir. Tania León (loc. 022/807.17.96)

A découvrir : Singin Sepia (Six Compositions 1992-2002) BRIDGE 9231.