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Meyrin, Forum : Trio Guarneri

Portrait du Trio Guarneri, après vingt ans d’une splendide carrière.

Article mis en ligne le décembre 2007
dernière modification le 21 janvier 2008

par Beata ZAKES

Ce que les « Stones » sont à la musique rock, les musiciens du Trio Guarneri sont en train de le devenir dans le monde classique. Portrait de ces « Inséparables » de la « musique sérieuse », avant leur concert genevois.

Si la dynastie Guarneri avait fabriqué des pianos, Ivan Klánsky en aurait certainement choisi un ! Ce pianiste - formant un trio avec deux « guarneristes » avoués - relève avec excellence le défi d’accorder son (ses) clavier(s) aux timbres de deux instruments de choix : un violon « Zimbalist » sorti en 1735 de l’atelier de Joseph Guarneri del Gesù et un violoncelle d’Andrea Guarneri de 1684. La coexistence de deux instruments d’époque aux côtés d’un piano moderne crée une sonorité particulière, propre à ces trois musiciens. Parmi les eux, Ivan Klánsky est aussi (forcément) le plus romantique, le plus « moderne » et c’est dans une partition de Schubert ou de Smetana qu’il révèle son jeu riche en nuances, qui tantôt contraste, tantôt se marie et fusionne avec le jeu des archets. Musicien leader du Trio, le pianiste se trouve en excellente compagnie : depuis plus de vingt ans, Cenek Pavlik au violon et Marek Jerie au violoncelle, parcourent ensemble le répertoire et le monde, sur les traces de leurs modèles incontestables : le Beaux Arts Trio et Trio Suk. Sortis du Conservatoire de Prague, les trois amis poursuivent en même temps leurs carrières solos.
Dans le curriculum des membres du Trio Guarneri, la Suisse semble constituer un point de repère : si Cenek Pavlik avait autrefois choisi de compléter ses études auprès de Nathan Milstein à Zürich, ses deux compagnons se consacrent actuellement à l’enseignement au Conservatoire de Lucerne. Ils rencontreront donc les mélomanes suisses en « connaissance du terrain » et avec d’autant plus de plaisir !

Trio Guarneri. Copyright : DR

Discographie sélective
Après vingt ans de carrière, le Trio Guarneri n’a rien plus à prouver. C’est une valeur sûre, ayant atteint un équilibre parfait entre technique et musicalité, expérience et recherche, personnalité de chacun et complicité. Alors que d’autres s’acharnent, par exemple, à vouloir célébrer l’année Mozart par une « nouveauté » plus au moins excentrique et souvent assez peu convaincante, les trois Pragois sortent un CD « classique », mais en même temps rafraîchissant par son côté « naturel » [Praga Digitals PRD/DSD 250 233]. Les contrastes, bien présents, arrivent « au bon moment », sans être forcés, les pauses suivent le rythme du phrasé, pour ne pas dire de la respiration... Le tout rappelle « la bonne école tchèque », pour ne pas dire « tchécoslovaque », avec sa fidélité à la partition, sa fiabilité technique, mais aussi avec un charme quelque peu désuet et quelques petites folies bohémiennes, comme dans les très légers Allegrettos.
Un enregistrement des deux trios de Schubert permet aux musiciens de déployer leurs qualités de « portraitistes », car ces deux compositions de la dernière période reflètent parfaitement la complexité de la personnalité romantique du compositeur : un jeune homme jovial, inspiré par les fêtes et mélodies populaire et un être solitaire, perdu dans ses rêves et ses souvenirs. [PRAGA Digitals PRD/DSD 250 201].
Récompensé, à juste titre, d’un « Diapason d’or », un CD consacré aux trois compositeurs tchèques révèle l’attachement des membres du Trio Guarneri à la musique de leur pays [PRAGA Digitals PRD/DSD 250 218]. Triple hommage à Smetana, Suk et, le moins connu, Lubos Fiser, cette gravure fait transparaître la quintessence de l’âme bohémienne, pour ne pas dire « bohème » : un romantisme très slave pour refléter la tragédie humaine. Smetana avait composé son Trio après la mort de Bedriska, sa fille bien-aimée, à l’âge de 4 ans. Dans le sien, Josef Suk avait dépeint en notes la douleur causée par la mort de sa femme Otilia, un événement qui a transformé sa vie. Programmée sur le même disque, son Elégie rend hommage à la mémoire de Julius Zeyer, écrivain tchèque, qui a ressuscité de nombreux mythes nationaux. La dernière oeuvre - encore un Trio, signé par Lubos Fiser -, quoique ne possédant pas de référence particulière, permet au mélomane de découvrir une incroyablement riche palette de motifs et contrastes, le type de répertoire dans lequel les Pragois excellent.
Vingt ans de fidélité à la musique cela paie, forcément. Au concert de Meyrin se retrouveront des mélomanes fidèles, mais aussi des jeunes, qui ont beaucoup à apprendre, à entrer dans l’univers du classique par la grande porte ou/et à consolider leur connaissances musicales et à (re)partir du bon... archet. Une soirée qui réunira des générations, certainement.

Beata Zakes

Date : 10 janvier 2008, 20h30, au Forum Meyrin, Place des Cinq-Continents, 1217 Meyrin
tél. : 022 989 34 00, http://www.forum-meyrin.ch