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Victoria Hall de Genève
Genève : Ahmad Jamal

Le pianiste de jazz Ahmad Jamal donnera un concert au Victoria Hall, le vendredi 16 avril prochain à 20h30.

Article mis en ligne le 25 mars 2010

Cinq ans après sa dernière apparition dans la série JAZZ CLASSICS, Ahmad Jamal revient à Genève pour un concert en compagnie de ses acolytes James Cammack à la basse, Manolo Badrena aux percussions et Herlin Riley à la batterie. Il reprendra le répertoire de son dernier album "A Quiet Time".

Ahmad Jamal est un pianiste de jazz au toucher unique. Légende vivante, il a du mal à s’intéresser au monde matériel, tant son attention et sa réflexion sont consacrées à sa quête spirituelle et aux notes de son clavier.

Etrange destin que celui de ce musicien à la fois méconnu et célèbre. Son nom n’est pas familier du grand public. Pourtant, Jamal a creusé un profond sillon dans le jazz, ce qu’attestent les déclarations enflammées que lui font les musiciens depuis près d’un demi-siècle. Le pianiste Erroll Garner qui l’a suivi dès ses débuts, le considérait comme un génie. Keith Jarrett avoue, aujourd’hui, qu’il n’aurait jamais quitté le classique s’il n’avait été foudroyé par le jeu d’Ahmad Jamal. Mais le plus dithyrambique de tous fut Miles Davis, déclarant lors d’une interview, en 1986, au sujet de celui qu’il avait surnommé "Ahmad le Terrible" : « Ahmad : espace, silence. Toute ma vie, je me suis inspiré de sa sonorité feutrée. »

Ahmad Jamal

Qu’a donc ce musicien de si extraordinaire pour impressionner autant des stars habituellement avares de compliments ? Woody Allen et Clint Eastwood, fans de la première heure, ont répondu à la question en intégrant sa musique aux séquences de plusieurs de leurs films, tels Hollywood Ending et Sur la route de Madison.
Woody Allen a souligné la modernité d’un Jamal abolissant la hiérarchie entre les instruments : « Ses trios sonnent comme un orchestre, jouant sur les contrastes entre tension et détente. » Eastwood, de son côté, déclarait que « ce pianiste est un diable et un ange. Il possède l’énergie des big bands noirs de Duke Ellington et l’élégance des ensembles blancs de Benny Goodman ».

Au début des années 1950, alors que les musiciens de be-bop poursuivaient leur révolution, toujours à la recherche de plus de vitesse, Ahmad Jamal, lui, s’en allait vers la lenteur, vers le toucher cristallin et les silences. « J’étais un ange parmi les diables, dit-il. Les boppers faisaient exploser les notes. Moi, je les laissais résonner jusqu’au bout de leur vie. » Puis, en pleine vague free, alors que la musique virait à l’abstrait, Ahmad Jamal reprenait les tubes de Stevie Wonder. Là, il devenait "le diable", accusé de flirter avec le tout-venant commercial. Cette image d’artiste solitaire, en marge des mouvements, explique son manque de notoriété.

Natif de Pittsburgh (Pennsylvanie), Jamal a grandi dans un maelström musical. Adolescent, il joue Liszt et Nat King Cole, étudie avec Mary Caldwell Dawson, fondatrice de la première compagnie d’opéra noire des Etats-Unis : « C’est elle qui m’a appris que la création en musique est une utopie. Il n’y a que Dieu qui puisse créer. L’artiste peut seulement transmettre. Un travail qui consiste à s’imprégner de ce que l’on entend et de ce que l’on vit pour le restituer dans la plus grande simplicité. »
Cinquante ans après avoir formé son premier trio, Ahmad Jamal revient au Victoria Hall avec ses mélodies à la beauté immédiate et à la poésie épurée. Incontestablement un des événements jazzistiques à ne pas manquer.