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Vidy-Lausanne
Vidy-Lausanne : “Airport kids“

Lola Arias et Stefan Kaegi créent Airport kids, un nouveau spectacle avec des enfants.

Article mis en ligne le juillet 2008
dernière modification le 6 août 2008

par Nancy BRUCHEZ

Du 10 au 22 juin, au Théâtre de Vidy, Lola Arias et Stefan Kaegi créent un nouveau spectacle avec des enfants qui se retrouvent éloignés de leur pays
d’origine. Leurs histoires sont différentes. Certains sont des enfants de la guerre, d’autres de cadres supérieures dans des multinationales. Mais que vivent ces enfants nomades ? Quelle vision du monde ont-ils ? Quel sera leur avenir ?

Lors d’un atelier de travail qui a eu lieu en juillet 2007, des enfants internationaux âgés de 7 à 13 ans ont travaillé sur cette idée d’une « troisième culture », en inventant des réponses sous forme de fictions. Lola Arias nous raconte l’aventure de Airport kids.

Comment s’est passée votre collaboration avec Stefan Kaegi ?
Nous avions déjà collaboré sur un projet au Brésil. Il s’agissait d’une installation biographique où des policiers racontaient leurs propres histoires de vie. Comme j’avais une expérience d’auteure en Amérique latine, Stefan Kaegi m’a contactée. Stefan travaille habituellement avec des non-acteurs, des experts qui maîtrisent certains sujets, comme par exemple des modélistes, des policiers. De mon côté, je mélange dans mon travail des acteurs et des non-acteurs. Les enfants se trouvent au milieu de ces deux extrêmes. Ce ne sont pas des comédiens professionnels, mais dans leur vie quotidienne, les enfants passent beaucoup de temps dans des mini-théâtres :

Lola Arias

ils se mettent en scène. Pour eux, passer de la réalité à la fiction, c’est comme ouvrir et fermer les yeux. Pour Airport kids, nous souhaitions trouver un lieu à la frontière de la fiction, qui est davantage mon domaine, et du documentaire qui est le sujet de prédilection de Stefan. Cette tension entre fiction et réel nous intéresse. Dans cette optique, il était plus intéressant de travailler avec des enfants, car ils expriment une façon différente de communiquer, une autre manière d’être.

L’enfance en mouvement est-ce un thème cher à vous deux ?
Oui. Stefan est un enfant nomade. Il n’a pas de maison ! Cela fait 6 ans qu’il voyage tout le temps. Quant à moi, je vis entre deux hémisphères depuis quatre ans. Je passe la moitié de l’année en Argentine avec ma compagnie Postnuclear, et le reste du temps en Europe. Je suis entre deux vies. C’est aussi d’une expérience personnelle que nous parlons, quand nous mettons en scène ces enfants nomades.

Comment vous est venue l’idée d’une telle œuvre ?
Stefan Kaegi et moi, nous voulions travailler avec des enfants. Nous avons passé des annonces dans les écoles, dans les foyers et nous avons trouvé des histoires qui nous ont beaucoup touchés : des histoires d’immigrations ou des histoires d’enfants qui sont ici avec leurs parents qui travaillent pour des multinationales. Ces enfants bougent toujours d’un endroit à l’autre sans avoir un endroit fixe. Nous recherchions des biographies d’enfants intéressantes et nous avons trouvé cette idée du nomadisme. C’est ainsi qu’a débuté notre enquête sur ces enfants de la « troisième culture ». Ils vivent une situation particulière. Ce sont des enfants qui ne sont proches ni de leur culture d’accueil, ni de leur culture d’origine. Dans la pièce nous avons cet exemple d’un enfant venu d’Angola, mais qui ne connait pas l’Afrique. Nous nous sommes alors intéressés à ce sujet pour savoir ce qui allait se passer avec cette nouvelle génération une fois ces enfants devenus adultes. Nous voulions nous interroger sur le futur, alors un projet avec des enfants s’est tout de suite imposé ! Ils représentent notre futur ! Au-delà des enfants de parents qui travaillent dans les multinationales, il y a aussi des enfants qui ont dû fuir leur pays pour des raisons économiques ou politiques. Ils sont venus en Suisse dans l’espoir d’une vie meilleure. La pièce présente un panel de huit enfants d’horizons différents : certains proviennent d’une classe aisée et d’autres sont issus de milieux défavorisés. Il y a, dans le spectacle, une fille chinoise que la mère a sortie de Chine pour des raisons économiques. Une autre fille qui venait de Roumanie a reçu une lettre pendant le travail de répétition di-sant qu’elle devait quitter la Suisse. Alors, nous avons utilisé cela dans la pièce. Depuis la Roumanie, elle nous a envoyé une vidéo qui raconte son histoire et les raisons pour lesquelles elle a dû retourner au pays.

« Airport Kids »

Comment avez-vous recrutés ces enfants de la « troisième culture » ?
Nous avons commencé nos recherches il y a un an pour trouver des protagonistes. Cela représente un travail de longue haleine, mais très intéressant. Il y a beaucoup d’histoires qui ne sont pas dans la pièce. Certains enfants ne pouvaient plus participer au spectacle pour cause de départ ou de retour dans leur pays d’origine. Ces histoires sont tout de même présentes d’une certaine façon dans la pièce, car il reste toujours quelque chose de ces enfants que l’on a rencontrés.

Comment avez-vous repéré des comédiens potentiels parmi tous ces enfants ?
Nous avons d’abord sélectionné les enfants selon leur biographie, puis en fonction de leur capacité à jouer sur scène. Aucun des enfants n’était comédien à la base, sauf une fille. Mais le plus important pour nous était que ces enfants soient capables d’être sensibles, directs, fragiles et forts à la fois. Un enfant a déjà en lui quelque chose de particulier. Si on met un texte dans la bouche d’un enfant, il n’aura pas la même résonance que s’il était dit par un adulte. Les enfants sont de très bons messagers. Ils nous font réfléchir davantage. Ce sont des « performers » très frontaux. On dit que les enfants disent toujours la vérité. Mais peut-être qu’ils mentent tellement bien que l’on ne peut pas distinguer la vérité du mensonge !

Le spectacle participera au festival d’Avignon en juillet…
Oui, ça va être formidable ! Dix jours en Avignon avec les huit enfants, ce sera une expérience très forte pour tout le monde je crois !

Propos recueillis par Nancy Bruchez

« Airport Kids », du 10 au 22 juin, Salle de répétition, à 19h30, di à 18h30, relâche di 15.6. et lun 16.6.
(loc. 021/619.45.45)