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A l’Opéra de Montpellier
Montpellier : “L’Elisir d’Amore“

Un “Elisir d’amore“ très réussi et une production colorée et intelligente.

Article mis en ligne le février 2007
dernière modification le 19 juin 2007

par François JESTIN

Un ensemble très réussi pour cet “Elisir“ : de jeunes voix pleines d’avenir, et une production colorée et intelligente, fortement buffa et divertissante, mais qui propose aussi une deuxième grille de lecture.

Dès l’ouverture l’ambiance est en effet menaçante : des paysans abattent en cadence leur faux sur les blés, devant un inquiétant ciel gris en fond de scène. La mort pourrait-elle roder dans cet “Elisir” ? Et pourquoi pas ! Nemorino ne met-il pas sa vie en danger lorsqu’il boit le mystérieux breuvage du bon Docteur Dulcamara ? Et s’il s’agissait de drogue, ou d’un poison ? La mise en scène de Davide Livermore choisit néanmoins le côté de l’opéra-bouffe, même si la « furtiva lagrima » viendra rappeler plus tard que tout n’est pas rose dans le village : Nemorino chante son tube, pendant qu’une prostituée attend au second plan au pied d’un lampadaire, dans les phares des voitures qui passent.

L’Elisir d’amore - Riccardo Novaro (Belcore) et Nicole Cabell (Adina) © Marc Ginot - Opéra National de Montpellier

A la fin de l’air (sur les paroles « Si puo morire d’amore »), elle a apparemment trouvé son client, et sort de scène. La production rappelle singulièrement celle de Laurent Pelly à l’Opéra-Bastille, avec beaucoup d’éléments communs dans les décors – champs de blé, bottes de paille, poteaux électriques, coquelicots, allées et venues en vélo sur le plateau (scooters à Paris), … – le monde de Livermore étant peuplé de personnages felliniens (le clown de Giulietta Masina dans “La Strada”, “Ginger et Fred”, …). Les solistes retenus dans la distribution ont une belle allure sur scène, à commencer par la somptueuse soprano américaine Nicole Cabell (Adina) : la voix est charnue, assez agile, et produit de beaux piani. Le baryton Riccardo Novaro (Belcore), superbement timbré, n’appelle aucun reproche (à suivre donc !), tandis que la basse colombienne Valeriano Lanchas (Dulcamara) déploie un volume impressionnant dans le grave et le medium, les aigus devenant un peu sourds et courts. Le maillon faible de la distribution reste le ténor de Riccardo Botta (Nemorino), au timbre relativement belcantiste (« Una furtiva lagrima » joliment conduite), mais d’un maigre format vocal, et qui a tendance au déraillement dès qu’il essaie de pousser le volume.
Il n’est pas toujours aidé par le chef d’orchestre Matteo Beltrami, qui se laisse emporter parfois par son enthousiasme, et couvre alors nettement les voix. Sa direction reste quand même dans l’ensemble de qualité, dynamique, avec des nuances forte assez appuyées, et des tempi souvent très rapides.

François Jestin

Donizetti : L’ELISIR D’AMORE : le 3 décembre 2006 à l’Opéra de Montpellier