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Opéra de Marseille
Marseille : “Manon Lescaut“

Beau succès pour cette Manon puccinienne, et un orchestre des grands soirs.

Article mis en ligne le décembre 2009
dernière modification le 22 janvier 2010

par François JESTIN

Un grand soir certainement, puisque la France bat l’Irlande 1-0 dans le match aller qualificatif pour la prochaine coupe du monde, mais c’est un autre match de football qui fait d’abord l’actualité à Marseille. Après la défait de l’Algérie face à l’Egypte, des scènes de violence urbaine éclatent dans le quartier du Vieux-Port et de l’Opéra, avec pour résultat des spectateurs enfermés pendant l’entracte : grilles fermées à clés, et interdiction de sortir à l’extérieur.

Discours orchestral de qualité
Ceci n’empêche pas l’orchestre de produire une musique exceptionnellement brillante, piquante, ayant de la profondeur, du ressort. Le maître d’œuvre de cette qualité de discours orchestral est évidemment en premier lieu le chef Luciano Acocella, avec qui les musiciens jouent véritablement en équipe. Nous avions découvert Acocella il y a trois ans, à l’occasion d’un concert à Avignon (voir SM 187) où il accompagnait son épouse, la soprano Patrizia Ciofi ; ce soir il confirme ses galons de grand chef d’orchestre de valeur.

Cast
Côté vocal, l’oreille est globalement un peu déçue. On attendait beaucoup de la soprano américaine Catherine Naglestad dans le rôle-titre, après sa formidable Tosca ici-même il y a cinq ans (rôle quelle reprend en juillet prochain à Orange, aux côtés d’Alagna). Mais Manon n’est pas exactement Tosca, et sa voix de grande ampleur ne caractérise pas idéalement toutes les facettes du personnage, en particulier on a beaucoup de mal à croire à la jeune fille ingénue du premier acte, surtout lorsque la chanteuse est une grande et belle femme. Naglestad entre bien mieux dans les habits de la bourgeoise / courtisane de l’acte II, et s’épanouira totalement au dernier acte – dans le désert américain lors de son agonie fatale – avec des aigus projetés souverainement.

« Manon Lescaut », avec Catherine Naglestad (Manon), Marc Barrard (Lescaut) et Zwetan Michailov (Des Grieux)
© Christian Dresse

Le ténor Zwetan Michailov (Des Grieux) chante certes toutes les notes de la partition, avec des aigus convaincants, mais le timbre manque de séduction, d’un minimum d’ensoleillement, et de beaucoup d’italianità. Marc Barrard est – comme toujours – une valeur sûre, avec une voix bien timbrée et présente, et les seconds rôles sont homogènes ; on relève en particulier le baryton-basse Jacques Calatayud (Geronte) et le ténor clair Julien Dran (Edmond).

Décors et mise en scène
Pour le côté visuel du spectacle, les décors de Michel Hamon ne font pas très riche (on en arrive à avoir quelques doutes sur la silhouette de bateaux à l’acte III du port du Havre), et la mise en scène d’Yves Coudray est surtout axée sur le jeu des solistes, le mouvement, les déplacements, entrées et sorties des masses chorales. Ce parti pris fonctionne fort bien, et quelques idées originales sont également suggérées. Par exemple à l’acte I, des filles de joie s’activent à l’auberge du relais d’Amiens : une fille aux seins nus fait sa toilette au lever de rideau pour donner le ton, puis Edmond ira au bordel, et ensuite Geronte retrouvera la charmante demoiselle, … certainement pour tuer le temps en attendant Manon !

François Jestin

Puccini : MANON LESCAUT : le 14 novembre 2009 à l’Opéra de Marseille