Arts-Scènes
Slogan du site

Cinéma Danse Expositions Musique Opéra Spectacles Théâtre

Film de novembre 2009 : “Le syndrome du Titanic“

Nicolas Hulot et Jean-Albert Lièvre s’associent pour délivrer un message simple et clair : il est grand temps de penser “écologie“.

Article mis en ligne le novembre 2009
dernière modification le 29 janvier 2012

par Firouz Elisabeth PILLET

Le syndrome du Titanic


de Nicolas Hulot et Jean-Albert Lièvre. France, 2009.

L’homme court-il à sa perte ? A-t-il décidé de scier la branche sur laquelle il est assis ? En d’autres termes, de détruire la Terre qui l’abrite et le nourrit ? Ces questions sont devenues récurrentes mais, malgré cette insistance, il semblerait que le plus grand nombre d’entre nous y reste indifférent. Et pourtant, les signes annonciateurs du naufrage s’accumulent : dérèglements climatiques en série, pollution omniprésente, extinction exponentielle d’espèces animales et végétales, pillage anarchique des ressources, multiplication des crises sanitaires. Telles sont les questions auxquelles s’attaque le septième art, et que rappelle Nicolas Hulot dans son premier film, réalisé avec la complicité de Jean-Albert Lièvre, créateur de Ushuaïa.
D’ailleurs, on ne cesse de nous réitérer ces questions, portées dorénavant sur grand écran, dans l’espoir de toucher le plus grand nombre d’entre nous. Al Gore, devenu militant actif, après sa défaite controversée aux élections présidentielles en 2000, s’est mu en acteur et orateur du documentaire réalisé par David Guggenheim, An inconvenient Truth (Une Vérité qui dérange) ; présenté au Festival du film de Sundance et au Festival de Cannes de 2006, ce film montrait les effets dramatiques du réchauffement climatique sur la planète mais s’apparentait à un cours ex cathedra ; la sortie du film avait d’ailleurs été accompagnée par une série de conférences à travers le monde, données par Al Gore en personne. Plus récemment, le film de Yann Arthus-Bertrand, Home, sorti en juin 2009, rappelait l’équilibre terrestre ancestral rompu depuis l’industrialisation, puis la mondialisation ; le film, filmé en plans aériens, ressemblait plus à un voyage visuel fort poétique et pictural qu’à un plaidoyer.

« Le syndrome du Titanic » de Nicolat Hulot et Jean-Albert Lièvre

Depuis vingt ans, Nicolas Hulot a parcouru notre planète sous toutes ses latitudes. Nul ne le sait mieux que lui : c’est un espace exigu, aux équilibres précaires. Son livre (publié en 2005) est un ultime cri d’alerte avant de céder au désespoir : si nous tous, riches comme pauvres, ne modifions pas immédiatement notre comportement pour faire "mieux avec moins" et mettre l’écologie au centre de nos décisions individuelles et collectives, nous sombrerons ensemble, tel le Titanic qui a poursuivi sa folle course en direction de l’iceberg. Le livre avait certes convaincu mais le nombre de lecteurs concernait des minorités, préoccupées par le naufrage planétaire qui se déroule sous nos yeux. Nicolas Hulot a donc recouru à un médium plus populaire, au sens noble du terme, plus accessible à tous : le cinéma.
Passant ainsi de l’écriture à l’image, Nicolas Hulot ne condamne pas le progrès, nécessaire à l’évolution, mais, citant Einstein, souligne que « nos actions ont échappé à nos intentions », et que les conséquences d’une industrialisation acharnée et d’une mondialisation telle qu’on a dû créer un néologisme pour la définir – globalisation – ont détruit l’harmonieux équilibre et presque anéanti les réserves naturelles du globe. Le cinéaste insiste tout au long de son film : la profusion des moyens est bonne, son utilisation à outrance est mauvaise. La crise écologique accroît les inégalités entre les hémisphères, confortant les déséquilibres indus par la crise sociale, économique et énergétique. Il incombe aux plus nantis, aux plus chanceux de modifier ce comportement suicidaire ; il incombe donc aux pays occidentaux de donner l’exemple et d’insuffler un changement.

Allant plus loin que ses prédécesseurs, Nicolas Hulot allie une succession d’images magnifiques à une réflexion non seulement écologique mais aussi philosophique. Le message est simple et direct : les hommes doivent réapprendre à se fixer des limites, dans une symbiose avec la Nature. Le modèle industriel et global est usé, il est impératif de trouver un nouveau modèle, symbole d’un nouveau monde plus égalitaire. A cette succession d’images savamment enchaînées s’ajoute une bande son judicieusement choisie (Nina Simone, Mozart, une reprise nipponne du Poinçonneur des Lilas de Gainsbourg). Quand Nicolas Hulot ne commente pas les images présentées, il agrémente son film d’extraits sonores de politiciens, de physiciens, de scientifiques comme Kennedy, Al Gore, Hubert Reeves, Robert Oppenheimer, Paul Virillo. En une heure trente, Nicolas Hulot a su captiver, conscientiser, convaincre sans effrayer pour autant.

Firouz-Elisabeth Pillet