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National Gallery, Londres
Londres : Les paysages de Renoir

La National Gallery sort des sentiers battus pour mettre en lumière des œuvres mal comprises et mal répertoriées de Renoir.

Article mis en ligne le avril 2007
dernière modification le 15 juillet 2007

par Régine KOPP

Deux expositions, l’une à Londres et l’autre à Paris, se sont ouvertes presque simultanément, nous montrant le choc du plein air sur les artistes de la
deuxième moitié du XXe siècle.

A la National Gallery de Londres, ce sont les paysages peints par Renoir au début de sa carrière et la découverte de couleurs qu’il reconnaît lui-même comme “inimaginables dans un atelier“, tandis qu’au Musée d’Orsay à Paris, l’exposition explore l’impact qu’a eu le plein air sur des artistes allant de Corot à Picasso, et plantant leur chevalet dans la forêt de Fontainebleau : un atelier grandeur nature.

Renoir, peintre de paysages
C’est pour redécouvrir des œuvres mal comprises et mal répertoriées que Colin Bailey, conservateur en chef de la Frick Collection de New York et commissaire de l’exposition, a opté pour une thématique jamais explorée jusqu’ici. Thématique originale que la National Gallery de Londres explicite tout au long de l’exposition dans un parcours chronologique d’une soixantaine de paysages multiples et variés, qui montre une facette novatrice de ce “peintre de la figure“ avec ses portraits au chapeau, ses figures sensuelles et son humanité joyeuse et bigarrée.
Un voyage qui commence dans les lieux mythiques des peintres impressionnistes – Fontainebleau, Chatou, Argenteuil, Paris, la Haute Normandie – pour entraîner ensuite le visiteur vers des contrées plus ensoleillées, l’Estaque, mais aussi Venise et Naples et surtout l’Algérie où la palette de l’artiste s’enflammera littéralement. C’est un voyage de première classe qui est offert au visiteur, tant les œuvres prêtées par les musées des quatre coins du monde mais aussi par des collectionneurs privés sont exceptionnelles.

Les œuvres montrées recouvrent deux décennies (1865-1883) pendant lesquelles l’artiste expérimente, s’essayant à des techniques différentes, puis s’éloignant (autour de 1880) d’une perception impressionniste de la nature, pour acquérir son propre langage pictural.
Les premières toiles traduisent avec évidence son admiration pour Corot et son désir de s’approprier sa technique pour peindre en plein air. Mais c’est surtout dans sa confrontation avec son ami Monet que son style va se personnaliser, traquant tout ce qui frissonne et qui vibre.
L’exposition présente la version de La Grenouillère (1869) de chacun des deux artistes : Monet privilégie l’architecture de ses paysages et ses reflets sur l’eau tandis que Renoir montre plus de fluidité et d’irrégularité. A partir des années 1870, ses coups de brosse gagnent en rapidité, il explore la couleur, invente des structures spatiales, pour se sentir libre. Des œuvres comme Régate à Argenteuil (1874), Les Moissonneurs (1873) en témoignent mais aussi Mare aux canards (1873) qui est présentée comme une série de deux toiles jouant différemment sur les effets de lumière, tout en gardant les mêmes couleurs dégradées et la même atmosphère.
Tout au long du parcours, on est frappé par la variété : variété des lieux mais surtout variété dans l’utilisation de la palette. Cela saute aux yeux, dans ses œuvres peintes en Algérie : Jardin d’essai (1881), Champ de bananiers (1881) qui font penser aux touches colorées de Pollock, car à mesure que la matière s’épaissit, la présence humaine se dissout dans une composition qui tend vers l’abstrait. Cette impression d’abstraction frappe aussi dans une œuvre comme La Vague (1879) où une masse turbulente de couleur bleue fusionne avec du blanc.

A son retour d’Afrique du Nord, Renoir séjourne d’abord en Italie d’où il rapporte des œuvres d’une incroyable liberté d’exécution. Il s’arrête ensuite chez Cézanne avec lequel il poursuit le dialogue pictural : dans Rochers à l’Estaque (1882), les coups de brosse se font plus courts et parallèles.
L’exposition prend fin en 1883 avec une série d’œuvres exécutées lors d’un séjour à Guernesey. Après cette date, il deviendra davantage ce “peintre de figures“, délaissant les paysages, pour n’y revenir qu’occasionnellement mais sans retrouver toutefois sa veine expérimentale et innovatrice.

Régine Kopp

Renoir landscapes, 1868-1883.
National Gallery, Londres, tlj de 10 à 18h, nocturne le mercredi jusqu’à 21h.
Tel : 00 44 2077475935

Après Londres, l’exposition sera présentée à la National Gallery of Canada d’Ottawa, du 8 juin au 9 septembre 2007 et au Philadelphia Museum of Art, du 30 septembre 2007 au 6 janvier 2008.