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Fondation de l’Hermitage, Lausanne
Lausanne : La collection Bemberg

Compte-rendu d’une visite

Article mis en ligne le 30 avril 2021
dernière modification le 1er juin 2021

par Vinciane Vuilleumier

La Fondation de l’Hermitage accueille jusqu’à fin mai une partie de la collection Bemberg à l’occasion de travaux dans les locaux habituels, l’hôtel d’Assézat à Toulouse.

L’exposition présente une belle sélection des maîtres anciens (16ème-18ème) et un ensemble impressionnant d’œuvres modernes du tournant du 20ème. La peinture à l’huile est à l’honneur, mais le visiteur curieux découvrira aussi au dernier étage de la Fondation une petite sélection de pastels et dessins modernes. Dans l’ensemble, Les chefs-d’œuvre de la collection Bemberg reprend la présentation chronologique de la Fondation Bemberg dans un écrin plus sobre – le site de la Fondation permet d’ailleurs de se faire une bonne idée des espaces d’exposition toulousains.

Parcours thématiques
Il est dommage, cependant, de n’avoir pas profité d’un nouvel espace temporaire d’exposition pour oser une présentation originale des œuvres, une mise en relation thématique, peut-être ahistorique, pour jouer avec les possibilités offertes par la richesse de la collection. Au lieu d’une organisation chronologique, il aurait pu être rafraîchissant d’imaginer un propos original, plus subjectif peut-être, mais qui tente des rapprochements inattendus. Il faut noter, cela dit, que l’offre de médiation de l’Hermitage comprend des parcours thématiques (Portraits, Paysages, Chapeaux) qui offrent une autre perspective sur la collection.

La première salle de l’exposition est aussi la plus marquante : le subtil éclairage par spots individuels met en valeur la galerie de portraits anciens, la richesse des étoffes et des incarnats délicatement peints à l’huile. Dans la semi-pénombre de l’espace, il semble presque que les tableaux soient illuminés de l’intérieur, et cette scénographie lumineuse accorde toute sa force au tiers souvent absent – les cadres.

Si la collection Bemberg offre à l’amateur la rencontre de plusieurs grands maîtres de l’histoire de l’art, elle ménage également un parcours passionnant à celui qui s’entiche des cadres : moulures, dorures, colonnes – la richesse des encadrements réussirait presque à voler la vedette à certaines toiles. C’est dans tous les cas une occasion privilégiée pour méditer sur l’apport particulier du cadre dans la présentation et la contemplation de l’art, et pour regretter, en un sens, que les catalogues reproduisent rarement les cadres des œuvres.

Plaisir esthétique
L’espace du musée reste un terrain de jeu, avec ou sans médiation, malgré la linéarité de la présentation : créer son parcours en faisant fi de l’ordre proposé, c’est ce qui fait de la visite muséale un véritable moment à soi. La visite muséale est pour moi la recherche de coups de cœur, de petits détails que je prendrai le temps de déployer en de longues rêveries – car au final, c’est du détail, de l’élément particulier étudié de près que partent les plus riches méditations sur l’art…

Elisabeth Vigée Le Brun « Portrait de la comtesse Kagenek en Flore » (détail), 1792
huile sur toile, 75 x 62 cm. Toulouse, Fondation Bemberg, photo © RMN-Grand Palais / Fondation Bemberg / Mathieu Rabeau

Le contraste délicat de relief dans la couche picturale entre la couronne de fleurs et les cheveux libres et flottants de la comtesse de Kagenek en Flore dans le portrait « au naturel » réalisé par Elisabeth Vigée Le Brun ; la composition minimale et si forte du nu d’Egon Schiele, l’équilibre entre la signature et le modèle qui génère une telle tension dans l’espace du papier ; le grain du pastel et ses couleurs vives, l’harmonie des teintes et la courbe sensuelle de la chevelure d’une Femme à la coiffeuse d’Edgar Degas – Les chefs-d’œuvre de la collection Bemberg exposés à la Fondation de l’Hermitage recèlent en effet des trésors de plaisir esthétique.

Vinciane Vuilleumier

Jusqu’au 30 mai 2021