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Fondation Baur, Genève
Genève : Routes Océanes

L’exposition de la Fondation Baur retrace le voyage de la porcelaine, d’Orient en Occident.

Article mis en ligne le avril 2010
dernière modification le 28 août 2010

par Françoise-Hélène BROU

L’exposition de la Fondation Baur propose un voyage sur les traces des grands voyageurs et aventuriers qui ouvrirent les routes maritimes vers l’Orient. C’est au cours de ces périples, devenus source de récits fabuleux, que l’Occident découvre les merveilles de ces mondes inconnus : la cannelle, le camphre, la noix de muscade, le poivre, le clou de girofle, l’ébène, le jade, la soie, le thé, et surtout la porcelaine.

Dès le Moyen Age, la porcelaine chinoise fascine le monde par la qualité de ses décors et fait l’objet d’un commerce intensif, dominé jusqu’au 16e siècle par les marchands arabes. Puis la découverte par les navigateurs européens, notamment les Portugais, de nouvelles routes maritimes marque le début d’une période où toutes les nations maritimes de la vieille Europe se concurrencent pour la domination du commerce lucratif avec la Chine. Le volume des exportations de céramique ne cesse d’augmenter et les fabricants chinois, conscients de cet essor exceptionnel, vont adapter leurs méthodes de production aux goûts et exigences des consommateurs. C’est ainsi que les porcelaines d’exportation, souvent de qualité inégale, vont se distinguer très nettement des objets destinés au marché intérieur chinois.

En témoignent par exemple les porcelaines à décor bleu et blanc de la dynastie Ming (14e-17e s.) qui se caractérisent par l’utilisation d’une seule couleur, déclinée en camaïeu. Mais ce sont surtout les bleu-blanc de “type Kraak“ de l’époque Wanli (16e-17e s.) qui illustrent emblématiquement le développement du marché de la porcelaine chinoise. Cette production spécialement réalisée pour l’exportation se distingue par ses formes et motifs où décor compartimenté et rayonnant, bord moulé et motif central en bleu et blanc dominent.
Salle après salle, le parcours chronologique de l’exposition illustre les “tribulations“ de la porcelaine chinoise depuis la mer de Chine jusqu’aux rivages de la Méditerranée et de l’océan Atlantique. Ainsi des grès émaillés de l’époque Tang (7e-10e siècles) et porcelaines monochromes blanches de l’époque Song (10e-12e siècle) en passant par les grès porcelaineux à couverte verdâtre dits “céladons“ et les admirables porcelaines “Quingbai“ d’un blanc teinté de bleu pâle, de la dynastie Yuan (13e-14e siècles), jusqu’aux plats à décor tapissant bleu et blanc du 17e siècle, que la Compagnie hollandaise des Indes commercialisa massivement, le visiteur traverse ces routes océanes. L’ultime escale du périple, une salle transformée pour l’occasion en pont de jonque chargé de jarres et d’épices, présente un ensemble de porcelaines au corps lourd et épais, avec décor monochrome, bleu et blanc ou à combinaisons d’émaux vert et rouge. Ces pièces désignées sous le terme de “céramiques de Swatow“ (16e siècle) étaient particulièrement prisées en Asie du Sud et au Japon.

L’ouverture et la surveillance des routes navigables, le monopole des commerces et trafics des matières précieuses, des armes, des esclaves, convoités et trustés par les Européens, n’auraient pas été possibles sans le perfectionnement des instruments d’astronomie et de la cartographie marine. Très judicieusement l’exposition offre en contrepoint un ensemble d’objets à caractère documentaire : boussole, astrolabe, cadran solaire, cartes, maquettes de jonque et boutre, gravures représentant des instruments de navigation, sculptures primitives d’Indonésie, livres anciens relatant les découvertes des voyageurs. Les pièces présentées au public proviennent de la collection de céramiques chinoises de l’Ambassadeur et Madame Charles Müller, de généreux prêts de musées genevois : Bibliothèque des Conservatoire et Jardin botaniques de Genève, Bibliothèque de Genève, Fondation Martin Bodmer, Musée Barbier-Mueller, Musée d’ethnographie de Genève, Musée d’histoire des sciences, et de collectionneurs privés.

Françoise-Hélène Brou

« Routes océanes, les tribulations de la porcelaine chinoise ». Jusqu’au 1er août 2010 à la Fondation Baur, Musée des Arts d’Extrême-Orient, 8 Rue Munier-Romilly, Genève.
www.fondationbaur.ch