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Musée d’art et d’histoire de Genève
Genève : L’Art et ses marchés

Une sélection de 115 peintures des écoles flamandes et hollandaises des XVIIe et XVIIIe siècles est exposée au Musée d’art et d’histoire.

Article mis en ligne le novembre 2009
dernière modification le 30 août 2010

par Catherine GRATTON

La peinture flamande et hollandaise des XVIIe et XVIIIe siècles est mise à l’honneur au Musée d’art et d’histoire de Genève.

Après quatre années consacrées à l’étude et aux traitements de conservation des écoles du Nord, l’exposition intitulée L’art et ses marchés s’est ouverte le 30 septembre au Musée d’art et d’Histoire de Genève. Cet événement offre au public genevois l’occasion de découvrir un pan de son riche patrimoine à travers la sélection de 115 peintures des écoles flamandes et hollandaises des XVIIe et XVIIIe siècles.
Ce second volet fait suite à La naissance des genres, présentée en 2005, dont l’exposition présentait à travers une sélection de 32 peintures l’éclosion des genres picturaux au XVIe siècle dans les anciens Pays-Bas. Ce projet est le fruit d’une intense collaboration entre l’unité d’histoire de l’art de l’Université de Genève et le Musée d’art et d’histoire, et plus particulièrement entre Frédéric Elsig (récemment nommé professeur assistant pour la période moderne) et Victor Lopes (conservateur-restaurateur de peinture au département des Beaux-Arts). Leurs recherches ont porté sur l’étude du corpus hollandais et flamand, dont les dépôts ne conservaient pas moins de 237 œuvres. Cet ensemble a ainsi été inventorié et reproduit pour la première fois dans un catalogue raisonné, offrant au lecteur une description matérielle et historique de chaque peinture. Cette vaste entreprise s’est muée en un laboratoire de recherche appliquée, puisque à l’occasion de séminaires organisés entre les bancs de l’université et l’atelier de conservation des peintures du musée, les étudiants en histoire de l’art ont eu l’occasion de découvrir les spécificités matérielles de chaque œuvre, utiles dans l’orientation de leurs recherches.

Constitution des collections
L’étude liée à la provenance des œuvres a permis de comprendre les mécanismes par lesquels une grande collection publique se constitue. Notre ensemble trouve ainsi son origine en 1805 par l’envoi napoléonien d’un groupe de 21 tableaux, parmi lesquels figurent deux tableaux flamands et un hollandais : Le temps et les Parques et le Christ en croix attribués à Antoon Van Dyck et à son cercle, et l’énigmatique portrait d’un Rieur assigné à un brillant élève de Rembrandt : Jan Victoors (aujourd’hui attribué au cercle d’Aert de Gelder).
Avec la fondation du Musée Rath en 1826, ce noyau s’étoffe grâce aux dons et legs des collectionneurs genevois (le comte Jean-Jacques de Sellon offre ainsi deux magnifiques natures mortes du peintre Jan Van Os, exposées en fin de parcours), complétés par des achats ponctuels de la ville après 1851, date à laquelle la commune de Genève devient propriétaire du musée. C’est ainsi que le Repos de Diane par Peter Paul Rubens et Frans Snijders est acquis en 1852 sur le marché parisien.
L’histoire de cette collection, longue de deux siècles, liée au goût pour la peinture flamande et hollandaise à Genève est parfaitement décrite en introduction du catalogue, où fourmillent de nombreuses références et où figurent des acteurs depuis longtemps oubliés.

Catalogue et exposition
Organisée en six sections thématiques et présentée sur des cimaises d’un bleu profond, l’exposition articule chaque genre pictural autour d’une œuvre emblématique dont la qualité irradie l’ensemble du groupe. Ainsi, pour le genre du portrait, le visiteur est accueilli par le chef-d’œuvre de Jan van Ravesteyn : Pieter van Veen, son fils Cornelis et son clerc Hendrick Borsman, immédiatement relayé par le Portrait de la famille de François van den Brandelaer peint par l’artiste de Dordrecht Nicolas Maes. La qualité des œuvres ne cesse d’éblouir. Elle cède parfois à la singularité d’une production archaïque comme dans l’œuvre de Johan Woutersz, la Consultation, dont la présentation au public explique le phénomène de résurgence d’un goût pour la peinture du XVIe siècle en plein Siècle d’or.
Articulée sur deux axes, la peinture de paysage permet au public de comprendre le développement de ce genre à travers d’une part la vision hollandaise, où l’intérêt pour le monde extérieur s’exprime dans la vérité topographique et climatologique, et d’autre part à travers la lumière méridionale venue d’Italie et dont l’influence produit un paysage arcadien où se mêlent figures et ruines. Longtemps considéré comme le genre le plus vil, la nature morte vient conclure, aux côtés de la peinture animalière, cet éblouissant feu d’artifice. Le spectateur détournera le regard ou se délectera peut-être face à la puissance et à la cruauté offertes par la Chasse au sanglier, que réalise en 1654 Johannes Fijt, alors que la transparence et le subtil coloris du Vase de fleurs de Nicolaes van Verendael (autrefois attribué à Rachel Ruysch) ou la délicate composition des Fruits et fleurs de Jan van Os nous rappelle ô combien cet art parvient, à la fin du XVIIIe siècle, à synthétiser l’ensemble des genres.

À mi-chemin du parcours, les notions de marché de l’art et du métier du peintre, auxquelles se rattache la question de l’authenticité de l’œuvre, se développent autour de vitrines didactiques où sont présentés les matériaux et les instruments utilisés par le peintre. Cette démonstration est complétée par la présentation d’une copie en cours de réalisation, où chaque séquence de travail y est rigoureusement décrite.
A peine cette exposition a t-elle débuté que la question de sa pérennisation se pose déjà : où iront finir ces œuvres merveilleuses ? Sur les cimaises d’un futur musée rénové et agrandi ? Peut-être…

Catherine Gratton

Informations pratiques :
« L’art et ses marchés », Musée d’art et d’histoire, 2 rue Charles Galland, du Ier octobre 2009 au 29 août 2010. Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 17h. Tél. : 022 418 26 00
Catalogue : éd. Somogy, 2009, en vente à la librairie du musée, 75 CHF (pendant toute la durée de l’exposition). Coffret du catalogue raisonné des peintures flamandes et hollandaises (2 volumes) 125 CHF.