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Genève, Galerie Jan Krugier & Cie : Eduard Angeli

Jusqu’au 21 décembre, la Galerie Jan Krugier présente une cinquantaine d’œuvres récentes d’un artiste majeur de la scène contemporaine autrichienne, Eduard Angeli.

Article mis en ligne le décembre 2007
dernière modification le 22 janvier 2008

par Laurent CENNAMO

Jusqu’au 21 décembre, la Galerie Jan Krugier présente une cinquantaine d’œuvres récentes (peintures et dessins) d’un artiste majeur de la scène contemporaine autrichienne, Eduard Angeli. Plongée dans un univers étrangement dépouillé et silencieux, intemporel, à mi-chemin entre la Peinture métaphysique de Giorgio De Chirico et les paysages urbains de Edward Hopper.

Né à Vienne en 1942, Eduard Angeli complète ses études à l’Académie des Beaux-Arts de la capitale. Un séjour à Istanbul (1965-1971) et de nombreux voyages à Venise inspirent un travail régulièrement exposé en Europe dès 1966, principalement en Autriche et en Allemagne. Une exposition au prestigieux Albertina de Vienne en 2006 marque une sorte de consécration pour cet artiste par ailleurs secret. Eduard Angeli réside à Venise depuis 2004.

Hommage à Venise
Venise est au centre de la production récente d’Eduard Angeli. Ce sont principalement les formes architecturales du décor vénitien qui attirent l’œil d’Angeli : conjonction de ponts et de murs - si particulière à Venise -, géométrie constructiviste d’un patio, quais, jetées, passages, fenêtres aveugles, murs monumentaux de brique rouge du quartier de l’Arsenal. L’œil s’attarde également sur la triste architecture rationaliste d’un pâté de maisons du Lido vu de la plage ou sur des câbles de bateaux traçant dans l’espace – ou le vide – un étrange triangle équilatéral. Si l’élément urbain est omniprésent, il est réduit à l’essentiel, dépouillé de tout signe de la vie quotidienne. Angeli n’est pas un chroniqueur ou un réaliste pittoresque.
Nous sommes très loin ici de l’agitation touristique, du grouillement humain caractérisant la Venise « réelle ». Angeli ne s’intéresse pas non plus aux bâtiments célèbres de Venise, aux monuments historiques, les murs qui le captivent sont des murs noircis ou rouge brique, généralement lisses (aucun goût chez lui pour le riche ornement des façades vénitiennes !).
L’atmosphère qui se dégage de ces toiles est intemporelle, tendue jusqu’à la crispation, suspendue. Il y a indiscutablement une dimension mélancolique chez Angeli, chaque paysage étant un « paysage de l’âme », le reflet d’un vide ou d’un mal qui est également celui de la civilisation. Dans son introduction au catalogue de l’exposition à la Galerie Krugier, Philip Rylands insiste sur le caractère presque menaçant de ces architectures réduites à l’essentiel et isolées dans l’espace, généralement présentées de manière frontale ou dans des fuites perspectives vertigineuses.

Mélancolie et transparence
La vision de Venise d’Eduard Angeli est fascinante (c’est un peu l’ivresse du vide). Plus encore peut-être qu’à la célèbre Peinture métaphysique de Giorgio De Chirico, c’est aux paysages urbains sombres et désespérés d’un autre grand peintre italien des années 20, Mario Sironi, qu’on pense à la vue de ces toiles. Un tableau comme Kanal I (2006) fait quant à lui irrésistiblement penser à certains paysages urbains de Edward Hopper (Approaching a City, 1946). Huile sur toile ou sur toile de jute, fusain et craie sur toile ou papier, pastel, aquarelle, sanguine : les possibilités techniques de l’artiste autrichien, bien que discrètes, semblent pratiquement infinies. La trame apparaît souvent en transparence sous la mince couche picturale ; cet intérêt pour le support, son relief particulier ou ses accidents, rappelle un autre peintre « vénitien » dont la Galerie Krugier possède une collection exceptionnelle : Zoran Music.

Laurent Cennamo

Jusqu’au 21 décembre à la Galerie Krugier
Tél. +41 22 310 57 19
du lundi au vendredi de 14h00 à 18h00