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A la Galerie Fallet, Genève
Genève, Galerie Fallet : Les « Résonances » de Yang Din

Quelques mots à propos de Yang Din, artiste issu de la diaspora, et de son œuvre.

Article mis en ligne le mars 2008
dernière modification le 19 avril 2008

par Françoise-Hélène BROU

L’art contemporain chinois est désormais une valeur confirmée sur les marchés de l’art, la plupart des grandes manifestations, foires ou expositions, présentent régulièrement les jeunes générations d’artistes chinois. A Genève quelques galeries se profilent sur ce filon, Pierre Huber ou Anton Meier par exemple. En mars c’est au tour de la Galerie Fallet d’offrir au public l’occasion de découvrir les travaux de Yang Din, artiste issu de la diaspora.

Figures emblématiques
Né en 1958 à Shantou, Yang Din quitte la Chine à vingt ans et s’installe à Paris où il réside et travaille encore aujourd’hui. Il se définit comme un enfant de la Révolution culturelle, période de persécution durant laquelle il perd son père déporté dans un camp. Toutefois rien dans ses tableaux n’évoque directement ces années de terreur, un « rien » qui paradoxalement résonne comme un cri étouffé dans les vastes champs colorés de ses compositions. Car d’emblée on observe que Yang Din organise son espace pictural sur le postulat du vide effaçant au passage toute représentation humaine – ce qui ne signifie pas toute présence humaine –, en effet ses fonds, formes et figures subissent une telle réduction plastique et iconique que le regard se trouve focalisé sur un nombre limité de valeurs, lesquelles dès lors acquièrent une prégnance accrue.

Sur des fonds essentiellement monochromes, particulièrement denses et structurés, s’inscrivent quelques rares et frêles figures emblématiques : arbres, fruits, maisons, objets divers, autant de traces fonctionnant sur le mode de la litote ou de la synecdoque, outils rhétoriques de la réduction sémantique et qui dans le domaine pictural accentuent les effets d’abstraction et de conceptualisation. C’est ainsi que lorsque sur ses toiles se dresse un arbre isolé dans un territoire uniformément rouge, bleu, blanc ou jaune, le minimalisme du propos prend soudain une résonance, une épaisseur polysémique. Et ce qui paraît au premier abord comme la représentation d’un paysage glisse alors, imperceptiblement, sur le terrain de la méditation contemplative suggérant l’infinité du temps et de l’espace, le caractère éphémère et aléatoire de l’humain dont la figure absente souligne son inachèvement, peut-être sa disparition. On pense ici aux univers désespérément vides de Samuel Beckett où la dissolution de la conscience et du langage, des lieux et autres repères spatiaux, préfigure l’épuisement, l’extinction de l’espèce.

Puissance vitale
Mais dans la peinture de Yang Din, l’abîme du vide existentiel a contrario ne fait que renforcer la puissance vitale de l’image, le goût élémentaire des matières et textures, de la couleur, le plaisir des jeux de découpage et d’agencement compositionnel, de distribution de la lumière. Il semble que « il reprend la création au commencement, qu’il en suit pas à pas, au bout du pinceau, les différentes étapes. Comme s’il nous disait : Voici l’espace, voici la Terre et le Ciel, voici l’ombre et la lumière et voici les souffles qui les animent. » (Marc Crépon, Donner la Parole à Yang Din, Paris 2004).

Françoise-Hélène Brou

Yang Din « Résonances », peintures récentes. Jusqu’au 19 avril à la Galerie Fallet, 5 rue de la Tour-de-Boël, Genève.