De janvier à juin 2009, le public genevois pourra découvrir les œuvres de deux artistes genevois Thierry Vernet (1927-1993) et Floristella Stephani (1930-2007).
«  Je suis un nomade de la peinture. Je plante ma tente,
j’épuise le pâturage, je repars ». Thierry Vernet, Paris le 18 mars 1962

Grâce à l’initiative d’Ilona Stephani et de quelques amis, ce parcours rendant hommage à ces deux peintres vient de voir le jour. Il s’articulera à la fois dans un espace et une chronologie dilatée, puisque de nombreux événements sont organisés de concert dans différents lieux de la cité jusqu’au mois de juin.

Périple
Cette invitation au voyage débute autours d’une sélection de dessins présentés à la Pinacothèque des Eaux-Vives, espace d’exposition connu pour son travail de promotion de l’art contemporain auprès du public à travers le prêt d’œuvres originales. Intitulé De l’usage du dessin à « l’Usage du Monde », cet événement présente une sélection d’impressions de dessins à partir des plaques typographiques réalisées par Thierry Vernet. Ces impressions à l’encre noire viennent tapisser les murs blancs comme autant de fenêtres ouvertes sur le voyage qu’il réalise dès 1953 aux côtés de Nicolas Bouvier (1929-1998). Cette aventure le conduit à Belgrade rejoindre son ami « qui, lui, chasse des musiques exotiques dans les cafés de la capitale yougoslave ».

Ce périple les conduira de Salonique à Istanbul, de Trébizonde à Tabriz, puis d’Ispahan à Kaboul pour s’achever sur l’île de Ceylan, dans la petite ville de Galle. Ce voyage à bord de leur vieille Topolino s’élabore au rythme d’une guitare et d’un accordéon, de l’écriture et de la peinture. Deux ans après avoir quitté les rives lémaniques, Thierry rejoint son amie Floristella à Colombo, laissant Bouvier découvrir les Indes. Les trois jeunes gens passeront quelques temps sur l’île de Ceylan, puis leurs chemins se séparent ; le couple rentre en Europe alors que Bouvier continue seul.

Recomposition
Le peintre retravaillera dans le calme le butin qu’il ramène de ce voyage. A partir des croquis pris sur le vif, des rapides esquisses qui évoquent tant de souvenirs, il recompose. Son talent pour le dessin et la peinture, il le fait fructifier dans la lenteur d’une recherche intime. Il donne l’explication de ce choix dans le journal qu’il tient : «  Les peintres sous contrat, ces fleurs de serre. Je préfère les fleurs de montagne, plus petites mais à la couleur éclatante et au parfum violet. Evidemment, il y en a des milliers que personne ne voit jamais, mais si, par hasard, on en voit une, on sait que de l’autre côté de la montagne, les prés en sont couverts. »
Pour gagner sa vie, Vernet répond à des commandes de décorations d’intérieur, conçoit une table pliante et réalise régulièrement d’importants décors de théâtre à Genève pour le théâtre de la Comédie, le Grand Théâtre ou l’Opéra de Chambre (OCG), mais c’est à Paris, dès 1958, qu’il développe son œuvre picturale.
Gilles Lapouge écrivait dans La Quinzaine littéraire, à propos de Routes et Déroutes, publié en 1992 par Bouvier : « Il y a plus lent que Nicolas Bouvier et que les frères Polo. Il y a les as de la critique littéraire française qui ont réfléchi trente années avant de découvrir que ce Suisse en balade est l’un des grands écrivains de son temps ».
Souhaitons dès lors que ce parcours conduise le public à la (re)découverte de l’œuvre graphique et picturale de ces deux artistes et qu’il ne faille pas attendre trente nouvelles années pour en reconnaître le mérite.

Catherine Gratton

Bibliographie :

– Nicolas Bouvier « L’Usage du Monde », dessins de Thierry Vernet, Payot 1992.
– Thierry Vernet « Peindre, écrire, chemin faisant » L’Age d’Homme, Genève 2006.

LIBRAIRIE LE VENT DES ROUTES
Rue des Bains 50 - Du 28 mars au 22 avril.
www.vdr.ch - (Tél. 022/800.33.81)
Le visage des peintres de ce monde
Cette librairie de voyage s’inspire du souffle à la fois littéraire et itinérant de Nicolas Bouvier. Il était naturel que le café-librairie devienne l’escale de ce voyage artistique autour de l’œuvre de Thierry Vernet et Floristella Stephani.
Seront exposées des photos prises par leurs amis, Nicolas Bouvier, Jean Mohr ou Jean Bouvier, le peintre. Dévernissage mercredi 22 avril en présence de M. François Laut, auteur de L’oeil qui écrit (biographie de Nicolas Bouvier) et de Mme Eliane Bouvier, suivi d’une séance de signature.

THÉÂTRE À LA BIBLIOTHEQUE DES EAUX-VIVES
Le mardi 31 mars à 20h30
Les Anges du Levant
Textes : Thierry et Floristella Vernet, adaptation : Jérôme Richer. Avec une comédienne et un musicien. Lier lettres de Thierry et journal intime de Floristella, dresser le tableau de deux fameux observateurs du monde, créer des ponts entre l’Europe et l’Asie, faire un voyage à travers la pensée de deux amoureux de la vie, voilà l’invitation à laquelle vous êtes conviés. Un voyage qui se fera en musique, entrée libre.

BIBLIOTHÈQUE DE GENÈVE
Mardi 21 avril 2OO9
http://www.ville-ge.ch/bge/actualites/espace-ami-lullin.htm - La salle de conférence Espace Ami Lullin, au rez-de-chaussée.
Horaire dès 18h15, de 18h30 à 20h, conférences.
L’exil de la création, la création de l’exil
La Bibliothèque de Genève accueille en présence de Madame Barbara Roth, conservateur du Département des manuscrits, les conférences d’Alexandra Loumpet-Galitzine et de François Laut. En choisissant librement parmi les œuvres de l’exposition, Alexandra Loumpet-Galitzine docteur de l’Université de Paris I, interroge le processus de création comme une mise en exil volontaire du monde et de soi.

MANOIR DE COLOGNY
Du mardi 24 mars au dimanche 5 avril
4 place du Manoir - 1224 Cologny
Horaires d’ouverture du lundi au vendredi 15h-19h, samedi et dimanche de 15h à 18h. Visites sur demande 079 337 60 14.
La peinture du monde
Exposition de peintures issues de collections privées genevoises. Thierry Vernet et Floristella Stephani se marient à Ceylan et se fixent à Paris pour vivre leur passion commune : la peinture. Installés sur les hauteurs de Belleville à Paris depuis 1958, ils explorent les joies uniques et les aléas d’une création avec la rigueur calviniste de Suisses exilés. S’interdisant tout jugement sur l’œuvre de l’autre, ils s’engagent dans une création parallèle, affrontant ensemble avec patience les difficultés du quotidien. Des amis les encouragent et acquièrent leurs tableaux. Cette exposition est donc un double hommage : à leurs œuvres et à ceux qui les ont aimées.
Vernissage 24 mars dès 18h.