Pour célébrer le 120e anniversaire de la naissance d’Otto Nebel (1892-1973),le Musée des beaux-arts de Berne propose une exposition qui s’intéresse à la fois, et c’est inédit, à l’œuvre de l’artiste et de l’écrivain.

L’exposition s’est fixé pour but de révéler les correspondances entre, d’un côté, la peinture, le dessin, la gravure et le collage, et de l’autre, les œuvres littéraires, c’est-à-dire entre l’image et le mot. Un parcours à la fois thématique et lié aux différentes étapes de la vie de l’artiste, qui résida à Berne pendant plusieurs décennies, permet de présenter les œuvres majeures de peinture et de littérature.

Comme de nombreux représentants de l’avant-garde du début du XXe siècle,
Otto Nebel fit des expérimentations avec la langue et l’art. Sa tentative la plus remarquable consista à « produire à partir de divers éléments des constructions de sens et des modèles d’harmonie ». L’exposition montre que l’œuvre pictural ne peut pas être isolé du reste et que l’on peut voir aujourd’hui en Nebel un artiste de « l’intermédia ».

Membre du mouvement « Der Sturm » formé autour de Herwarth Walden, Nebel s’y distingua comme un artiste du mot et livra à la revue aussi bien des textes que ses premières linogravures. Dans les années vingt, Nebel créa ses Runenfugen (Fugues de runes), des poèmes composés d’un nombre limité de lettres. L’abstraction à laquelle il aspirait alors ne trouva qu’ultérieurement son expression dans sa création picturale. Nebel traitait les aspects techniques avec grand soin et il « construisait » en général ses peintures et ses feuilles en couleur selon des procédures rigoureuses de travail, aussi bien pour la préparation des fonds que pour l’application des différentes couches de peinture.

Ses séjours en Italie, durant lesquels il créa le célèbre atlas de couleurs qu’il utilisa pour de nombreuses œuvres, ont été déterminants dans son parcours. À l’instar des signes d’écriture des Runenfugen, la couleur et la lumière constituent dans ses paysages et ses vues de villes un registre visuel autonome. Au milieu des années trente, Nebel se détacha progressivement de la figuration et forgea une langue visuelle de signes qu’il appela Runenbilder (Tableaux de runes). Ses écrits témoignent pourtant que cette langue visuelle n’était pas pour lui absolument « non figurative » : « Dans mon art, il n’y a que des choses… de purs évènements de ma vie intérieure. »

Nebel offrit en 1969 près de 200 œuvres au Musée des Beaux-Arts de Berne. La Fondation Otto Nebel, qui a son siège à Berne, gère sa succession et la part littéraire de l’œuvre est conservée aux Archives littéraires suisses. Les œuvres de l’exposition proviennent principalement de ces fonds, mais aussi de collections privées, et elles sont assorties d’œuvres d’artistes avec lesquels Nebel eut des relations artistiques et personnelles. La publication richement illustrée qui accompagne l’exposition aura valeur d’ouvrage de référence sur la création poétique et picturale d’Otto Nebel.

Jusqu’au 24 février 2013.