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Musée des beaux-arts, Bâle
Bâle, Musée des beaux-arts : Jasper Johns
Article mis en ligne le juillet 2007
dernière modification le 4 août 2007

par Régine KOPP

Que le directeur du musée des Beaux-Arts ait programmé cette exposition consacrée à l’œuvre pionnière du début de la carrière de Jasper Johns, ne peut être que légitime. L’artiste entretient en effet depuis longtemps, une longue amitié avec l’institution bâloise.

Dès 1967, le directeur de l’époque Franz Meyer avait acquis des œuvres graphiques, suivi en 1970, par l’achat d’une peinture, Figure2, une œuvre de 1962. Au fil des ans, la collection des œuvres de Jasper Johns s’est étoffée. L’artiste lui-même ayant donné en dépôt en 1980 deux œuvres majeures, pour compléter l’ensemble : Flag above white with collage (1955) et Out the window number2 (1962), deux œuvres qu’il offrira déinitivement en 1994, à la mémoire de Christian Geelhaar, le directeur qui avait succédé à Franz Meyer et qui, à son tour, avait entretenu avec l’artiste une relation très étroite. Christian Gelhaar avait enrichi le fonds Johns avec deux autres œuvres du début des années précoces de l’artiste : Construction With Toy Piano (1954) et The Bath (1988).

Une œuvre en rupture
Après avoir été montrée à la National Gallery of Art de Washington, l’exposition est présentée en exclusivité en Europe, à Bâle. Avec soixante-dix œuvres prêtées par des musées et des collections privées des Etats-Unis et d’Europe.
Dans l’art américain d’après-guerre, l’œuvre de Jasper Johns – l’artiste est né en 1930 – représente une rupture radicale, au milieu du siècle dernier. En 1954, il cherche à se réinventer, avide de trouver d’autres voies et décide pour cela de détruire son œuvre passée. A partir des années cinquante, Johns peint des objets banals du quotidien comme une cible mais choisit aussi de fixer directement sur la toile des objets réels – pour l’essentiel des reliques du processus pictural, comme par exemple une boîte de peinture. Avec la volonté de créer des relations diverses et variées entre l’espace fictif de l’art et le monde matériel des biens de consommation. Lorsque le mouvement de l’expressionnisme abstrait se radicalise, Jasper Johns explore d’autres voies de techniques visuelles. On sait le rôle qu’il a joué dans la naissance du Pop Art, qui fera de la réalité infiniment reproductible de la culture de masse, son cheval de bataille. Jaspers Johns, quant à lui, s’intéresse à l’acte artistique en soi et plus particulièrement aux conditions de la peinture qu’il explore également dans le dessin et la gravure.

Interaction des idées
C’est donc à travers des peintures, des dessins et des œuvres graphiques que s’illustrent les quatre thèmes spécifiques et les variations qui en découlent, montrant l’interaction des idées sur une période de dix ans. Ce large champ de références aux associations multiples résulte de l’imbrication des quatre thèmes intrinsèques à l’oeuvre de l’époque. Il y a d’abord la cible, en forme de signal, puis la présence d’instruments mécaniques, nécessaires à la réalisation du tableau, comme une latte de bois pivotante, qui trace à la manière d’un compas des contours circulaires et répand régulièrement la couleur. S’ajoutent enfin le thème de la dénomination et de l’utilisation des couleurs primaires rouge, jaune et bleue et celui de l’usage fait par Jasper Johns de l’empreinte de son propre corps. C’est en 1955 que l’artiste commence à peindre des cercles concentriques d’une cible, un sujet à la fois figuratif et abstrait mais qui néanmoins échappe à toute classification.

Tension
L’art de Johns étant de conjuguer l’acuité conceptuelle avec la magie picturale et la distanciation sceptique avec un laisser-faire intuitif. Cette tension créatrice entre forces opposées caractérise cette œuvre pionnière de la première décennie, mais, qui malgré toute son immédiateté, reste hermétique et mystérieuse. Cette exposition permet donc pour la première fois de comprendre et de suivre le processus avec lequel Jasper Johns élabore progressivement ses thèmes.

Au moment où Art Basel attire tout ce que la planète compte de collectionneurs, de directeurs de musée et autres amateurs, cette exposition et celle du Schaulager, toutes deux consacrées à des artistes américains, confirment que Bâle est la place incontournable pour l’art contemporain.

Régine Kopp

Exposition du 2 juin au 23 septembre 2007
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tél. : +41 61 206 62 62