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Au Théâtre national de Nice
Nice : “Marco Polo“

Beau début de saison à Nice.

Article mis en ligne le 10 décembre 2010
dernière modification le 26 août 2011

par Stéphanie NEGRE

Pour l’ouverture de sa saison, le Ballet Nice Méditerranée présente Marco Polo de Luciano Cannito sur une musique de Mario Sciavoni. Le chorégraphe italien s’inspire des Villes invisibles d’Italo Calvino dont il reprend la trame narrative : le face-à-face entre l’empereur Kublaï Khan et le navigateur vénitien qui lui parle de ses voyages et des villes qu’il a visitées.

Alors que le roman évoque cinquante-cinq villes, Luciano Cannito n’en retient que trois. Chacune est symbolisée par une femme et est l’allégorie d’un trait de caractère humain : le goût du passé pour Maurilia, la recherche du plaisir pour Zobéide et le penchant pour l’artifice pour Chloé.

Eric Vu An et Jean-Sébastien Colau dans « Marco Polo »
photo D. Jaussein

Le ballet s’organise en grands tableaux présentant les villes et leurs habitants et en scènes plus resserrées, la confrontation entre Kublaï Khan et Marco Polo. Celui-ci expose, attise la curiosité, soutient le mépris puis la colère de l’autocrate conquérant qui récuse ce qu’on lui dévoile : une critique à peine dissimulée de sa cour, du jeu du pouvoir et des courtisans. Même s’il est lucide, il n’aurait sinon pas compris aussi bien la symbolique des villes, l’homme de pouvoir n’aime pas qu’on lui renvoie en face la réalité de sa situation et de sa propre faiblesse. Lors de ces face-à-face, la danse devient plus brutale, tourne à l’affrontement. Marco Polo qui n’aura jamais transigé avec le fil conducteur de son récit, ne doit son salut qu’à la fuite.

J. Bailet dans « Marco Polo »
photo D. Jaussein

L’empereur reste seul, tourmenté mais s’apaise quand sa favorite se lance dans une danse de séduction. La vie continue à la cour de Chine. Tout le spectacle s’articule donc autour des deux personnages principaux. Eric Vu An, l’empereur, avec la présence qu’on lui connait, passe du trouble à la colère contenue, puis de la colère exprimée à l’expression de la fragilité pour se reprendre et afficher une maîtrise totale.
Jean-Sébastien Colau qu’on avait découvert dans Viva Verdi, réussit à tenir tête à une telle personnalité sans jamais s’effacer. A eux deux, ils captent l’attention et nous entrainent dans le voyage et la réflexion. Autour de ce duo, la compagnie déploie ses talents. On regrette juste le manque d’expression chez ces demoiselles qui personnifient les villes. Plus de caractère dans l’interprétation aurait permis de mieux saisir l’ambiance et l’esprit qui s’en dégagent. Quant aux décors et costumes, ils nous plongent dans un palais extrême-oriental et dans les méandres des souvenirs de voyage de Marco Polo.

JS Colau dans « Marco Polo »
photo D. Jaussein

Lors des programmes de la saison passée, la compagnie avait présenté à chaque fois trois œuvres courtes. Là, avec ce ballet d’un peu moins de deux heures et demi, elle nous montre de la plus belle manière qu’elle peut interpréter des œuvres plus conséquentes et s’attaquer désormais aux grands classiques du répertoire.

Stéphanie Nègre

Les 29, 30 et 31 octobre 2010