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Spécial Grand Théâtre
Entretien : Philippe Cohen

Quelques questions à Philippe Cohen, directeur de ballet.

Article mis en ligne le mai 2010
dernière modification le 28 août 2011

par Emmanuèle RUEGGER

Depuis la saison 2003/2004, Philippe Cohen dirige avec succès la Ballet du Grand Théâtre de Genève. Il nous a présenté la saison prochaine.

Le Grand Théâtre de Genève a changé de directeur. Est-ce que quelque chose a changé pour vous ?
Philippe Cohen : Non, rien n’a changé. Mais cela n’est pas une surprise puisque dès que Tobias Richter a été nommé, en 2007, j’ai été une des premières personnes qu’il a rencontrées. Nous ne nous connaissions pas. Il m’a demandé si j’avais envie de rester. Il était prêt à m’accompagner.
Et tout se passe bien. Il ne remet pas en question l’autonomie que nous avons. Nous sommes parfaitement intégrés à la maison, au Grand Théâtre de Genève, mais nous sommes le Ballet du Grand Théâtre de Genève.

Comment se porte le Ballet du Grand Théâtre de Genève ?
Il se porte bien. Il n’y a pas de baisse de tournées et nous continuons à fidéliser notre public à Genève. J’ai eu quelques inquiétudes avec la crise mais nous donnons entre cinquante et soixante représentations par an en-dehors de Genève. C’est une bonne moyenne. Nous tournons en ce moment cinq programmes très différents, avec le même succès.

Quels chorégraphes allez-vous inviter la saison prochaine ?
Pour la saison 2010/2011 je ne voulais plus de relecture de grand ballet, comme nous en avons proposé les années précédentes. J’avais des chorégraphes en tête mais je voulais m’appuyer sur des œuvres musicales fortes. Nous avons ici l’Orchestre de la Suisse Romande ce qui est un luxe pour nous et pour les chorégraphes. Depuis quelques années, je voulais travailler sur le Requiem de Fauré. A ma connaissance, MacMillan est le seul qui l’a chorégraphié (en 1976, ndlr). D’abord, c’est une musique sublime. Ensuite, cela me permet de réunir toutes les forces vives du Grand Théâtre autour d’un même projet : l’orchestre, les chœurs du Grand Théâtre et le Ballet.

Philippe Cohen
Photo GTG / François Grobet

Il y a deux ans, Ken Ossola, un ancien danseur de Kylián, a créé une très belle pièce chez nous, Ombre fragile. En voyant son travail, le respect qu’il a de la musique, je me suis dit qu’il pourrait être le bon chorégraphe. Il a pris un peu de temps pour réfléchir, puis il a accepté.
Le Requiem ne remplit pas la soirée. Il fallait donc inviter un autre chorégraphe. J’ai pensé alors à Stijn Celis, un chorégraphe belge, ancien danseur de Mats Ek. Il fallait une œuvre orchestrale de la même envergure que le Requiem de Fauré. Elle donne envie de mourir tant elle est belle, mais elle est quand même profonde. Stijn Celis m’a proposé la Nuit Transfigurée de Schönberg, ce qui est une idée formidable. Pour moi, c’était tout de suite une évidence.
Pour le deuxième programme, j’ai pensé à un chorégraphe dont je suis le travail depuis quatre ans, Emanuel Gat. D’habitude on lui demande un format 20 ou 30 minutes. Je lui ai proposé une soirée entière parce que je voulais confier la compagnie à un créateur, pour qu’il puisse développer son esthétique, sa gestuelle. Emanuel est un des rares chorégraphes qui ont une grande culture musicale. Il m’a proposé le Clavier bien tempéré. Cela s’appellera Préludes et Fugues. Nous proposons donc des œuvres musicales majeures, chorégraphiées par des créateurs assez jeunes, ils ont une quarantaine d’années.

Allez-vous inviter une compagnie ?
Oui ! Nous avions depuis longtemps envie d’inviter le Tanztheater Wuppertal. L’arrivée de Tobias Richter a accéléré le processus, car il était très proche de Pina Bausch quand il était à Düsseldorf. Nos démarches avaient commencé du vivant de Pina Bausch.
Finalement le Tanztheater Wuppertal vient avec Néfes, la création qu’ils ont faite à Istanbul. C’est une production qu’ils reprennent pour nous.

Le Ballet du Grand Théâtre participera à la production de Orphée et Eurydice de Gluck, pour laquelle vous avez fait appel au chorégraphe Mats Ek. Quel en sera l’enjeu pour lui et pour les danseurs ?
La danse de Mats Ek a toujours eu une dimension dramatique. On reconnaît la danse de Mats Ek mais sa force est l’intelligence de la narration. Quand il a quitté le Ballet Cullberg, il a fait de nombreuses mises en scène d’opéras. Il était logique qu’il se frotte à Orphée et Eurydice, qui a été conçu pour le chant et la danse. Il l’a créé une première fois à Stockholm. Nous avons beaucoup de chance de travailler avec lui.
Pour les danseurs, l’enjeu d’Orphée et Eurydice est d’être confrontés à un spectacle où la danse n’est pas le moteur principal.

Pendant la saison 2010/2011 il y aura donc tout une dynamique créée autour de la danse. Je suis content que Tobias Richter continue à faire venir des compagnies de qualité, nous avons tout à y gagner. Ce sera une saison très, très riche. Et celle qui gagne, c’est la danse.

Propos recueillis par Emmanuèle Rüegger