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Les films de septembre 2007

Commentaires sur les films : Ratatouille – Hairspray – Caramel – La Sconosciuta – Death At A Funeral.

Article mis en ligne le septembre 2007
dernière modification le 4 mars 2012

par Firouz Elisabeth PILLET, Philippe BALTZER

Ratatouille


De Brad Bird (USA, 2007) film d’animation 1h50

Créés en 1986, les Studios Pixar sont devenus en quelques films une référence dans le petit monde du dessin animé numérique : « Toy Story », « Cars », « Némo » et « Monster & Cie » c’est eux. Leur recette ? Confier la direction des studios ainsi que le « final cut » aux créateurs plutôt qu’aux comptables. Simpliste mais payant !
Après une lutte fratricide et impitoyable, Disney et Pixar finissent par fusionner en 2006. La direction de la nouvelle entité est depuis confiée à un « Pixar boy », John Lasseter, qui n’est autre que le réalisateur de « Toy Story » et de « Cars ». Un vrai conte de fée à la Disney !

« Ratatouille »

Pour ce nouveau « festin-animé » les studios Pixar/Disney nous ont mitonné l’histoire de Remy un rat des champs doté de papilles gustatives si fines qu’il délaisse les immondices pour n’ingurgiter que des reliefs d’ortolans. Incompris par les siens (le rat de gout contre les rats d’égout !) le gourmet quitte son clan en rêvant de devenir chef d’une grande table de la Capitale. L’action se déplace alors dans un Paris de carte postale et plus précisément chez « Gusteau », un grand restaurant dont la réputation périclite depuis qu’il est dirigé par un personnage irascible et vénal : Skinner. Notre rongeur s’allie alors avec Linguini un commis de cuisine un peu balourd et, ensemble, ils parviendront à redresser la notoriété de l’établissement et à subjuguer le redoutable critique gastronomique Anton Ego ...
La réussite de cette « Ratatouille » tient à plusieurs ingrédients : un scénario inventif, drôle et savoureux, quelques poursuites échevelées, un rien d’anthropomorphisme, un sens du comique de situation (la main et l’esprit en cuisine) enfin une cinéphile clairement affichée ; amusez vous par exemple à retrouver les références aux « Aristochats », à la « Guerre des Mondes » ou à « un Américain à Paris ». En un mot, cette « Ratatouille » est un délicieux moment estival et familial à consommer sans modération.
Philippe Baltzer

Hairspray


de Adam Shankman, avec John Travolta, Michelle Pfeiffer, Christopher Walker, Nicole Blonsky. USA, 2007.

Remake de la comédie de John Waters (1988), la version de 2007 est décapante et enjouée. A l’instar de l’affiche, bigarrée et colorée, le film brille de mille feux. Hairpsray est servi par des acteurs qui ne craignent pas d’être grimés et prennent du plaisir à se fondre dans des personnages insolites. Malgré son physique passablement arrondi, la jeune Tracy n’a qu’une idée en tête : danser dans la célèbre émission de Corny Collins. Par chance, ce dernier assiste à une de ses performances au lycée et lui propose de venir rejoindre son équipe. Tracy devient instantanément une star, s’attirant du même coup la jalousie de la parfaite Amber, qui régnait jusqu’ici sur le show. La chance de Tracy tourne lorsque, après avoir été témoin d’une injustice raciale, elle se retrouve poursuivie par la police pour avoir marché à la tête d’une manifestation pour l’intégration des Noirs. Désormais en cavale, ses chances d’affronter Amber au cours de la finale et de remporter le titre de " Miss Hairspray " semblent bien compromises.

« Hairspray »

Plongée dans les années soixante, cheveux crêpés, pattes d’éph et revendications des Noirs pour obtenir des droits civiques, cette comédie musicale se révèle un hymne joyeux à la tolérance et l’égalité entre tous. Quelle que soit sa différence (poids, couleur de peau, etc.), chacun a droit aux mêmes chances. Le réalisateur John Waters, qui est à l’origine du premier Hairspray, s’est inspiré de sa propre jeunesse pour trouver la muse inspiratrice ; il se souvient du jour où il a couché sur papier cette histoire délirante : "J’ai écrit cette histoire sur mon lit alors que je vivais dans un appartement sordide de Baltimore. Je me suis beaucoup inspiré de choses que j’ai pu vivre là-bas dans les années 60. Je regardais le "Buddy Dean Show", une émission de danse pour les adolescents qui passait sur une chaîne locale.
Hairspray signe le retour de John Travolta – méconnaissable – à la comédie musicale ; son déhanché et son entrain fleurent bon l’époque de Grease et de Saturday night fever. L’acteur se souvient avec amusement de l’expérience vécue sur le tournage d’Hairspray, où il est devenu une femme par la magie du maquillage, reprenant le rôle tenu par Divine en 1988. On ne va pas tout vous dévoiler avant que vous n’ayez vu le film mais sachez que la transformation physique de l’acteur a donné bien du fil à retordre aux maquilleurs et aux costumiers.
Le rythme frénétique et soutenu du film, pourvu de nombreuses chansons et chorégraphies des sixties (cha-cha-cha, twist, mambo) est un vrai régal qui ralliera plusieurs générations. Spectacle familial par excellence, Hairspray met à l’honneur Nicole Blonsky, jeune actrice américaine qui excelle dans le rôle de Tracy, savourant tout particulièrement cette première expérience sur grand écran. En 2002, la jeune actrice avait en effet été recalée au casting de la version jouée à Broadway en raison de son trop jeune âge. Une star est née…
Firouz Elisabeth Pillet

Caramel


de et avec Nadine Labaki, avec Yasmine Elmasri, Yasmine Al Masri, Joanna Mourkazel, Gisèle Aouad, Sihame Haddad, Aziza Semaan. Liban, 2007.

Quel étrange titre qui met à l’eau à bouche ? Détrompez-vous, il ne s’agit pas d’un documentaire gastronomique. Mais plutôt d’un film de femmes par une femme, Nadine Labaki, qui signe avec Caramel une première œuvre éblouissante et sensuelle. Le titre fait allusion à la cire faite à la manière orientale, mêlant sucre, eau et jus de citron et que l’on fait bouillir. L’action se déroule majoritairement dans un institut de beauté et voit défiler une galerie de portraits attachants, hommes et femmes confondus. Seul l’amant est connoté négativement, d’ailleurs la caméra élude systématiquement son visage.

« Caramel »
© Bac Films

La belle réalisatrice est aussi actrice puisqu’elle interprète le rôle-titre de Layale, une jeune femme de trente ans, chrétienne, gérante d’un salon de beauté où cinq femmes se retrouvent pour partager rires, chagrins et confidences. Maîtresse d’un homme marié, Layale reste très attachée à sa famille et craint de les décevoir. A ses côtés travaillent Nisrine, jeune femme fiancée à un Musulman, lequel ignore qu’elle n’est plus vierge, et Rima, introvertie et garçon manqué, qui se découvre une attirance pour les femmes. Leurs voisines de palier sont Rose et Lili, une couturière dévouée et sa grande sœur, un peu folle, qui ramasse tous les papiers qu’elle trouve dans la rue à la recherche des lettres d’amour d’un officier français qu’elle a aimée dans sa jeunesse.
Dans ce film sensuel et ensoleillé, bercé par une mélopée voluptueuse, les femmes se retrouvent dans cet oasis de paix qu’est le salon de beauté, univers où les mains effleurent au plus près la peau des femmes, les langues se délient et les cœurs se confient. Les spectateurs se laissent porter délicatement par les méandres des ces confidences beyrouthines plus que féminines. Merveilleusement interprété par des actrices non professionnelles qui mettent sincérité et spontanéité dans leur interprétation, Caramel est une escapade réussie au pays des cèdres. Rassurez-vous, rien à voir avec le salon kitsch et suranné de Vénus Beauté de Tonie Marshall. D’ailleurs, Caramel a fait l’unanimité lors de sa présentation à la Quinzaine des Réalisateurs au dernier Festival de Cannes.
Firouz-Elisabeth Pillet

La sconosciuta


(L’Inconnue), de Giuseppe Tornatore, avec Xenia Rappoport, Michele Placido. Italie, 2006.

Une ville italienne, une ville du Nord, avec toute l’indifférence des grands centres urbains. L’inconnue s’appelle Irena. Elle est arrivée, il y a quelques années, d’Ukraine. Elle fait partie de ces filles de l’Est, proies d’hommes sans scrupules qui, entre violence et humiliation, se retrouvent entraînées dans la torpeur et l’effroi du trafic de blanches et sont maintenues en esclavage sur les trottoirs des grandes villes. A-t-elle un objectif précis lorsqu’elle arrive, avec l’aide d’un gardien, et surtout à force de persévérance, à trouver un emploi de femme de ménage dans l’immeuble en face duquel elle s’est installée ? En effet, son objectif semble être d’approcher une famille de résidents : les Adacher. Ils se composent de Donato, qui est orfèvre, son épouse, Valeria, créatrice, et la petite fille Tea. Afin de travailler chez eux, Irena se lie d’amitié avec leur vieille femme de ménage, Gina, puis la remplace. Irena accomplit froidement son plan. Tout semble se dérouler comme elle l’a prévu jusqu’au jour où son passé la rattrape. Film noir pour un sujet qui l’est tout autant : il fallait donc une actrice aux épaules assez larges pour porter un film aussi dense, aussi obscure, aussi difficile.

« L’Inconnue / La sconosciuta »
© Medusa Produzione

Atmosphère à la Hitchcock, traces de sang à la Tarantino, sujet brûlant d’actualité – l’esclavage sexuel – une pointe de sentimentalisme final, La Sconosciuta entraîne les spectateurs à découvrir, entre le récit de la vie d’Irena et des flashbacks de plus en plus fréquents, l’histoire de cette femme mystérieuse, inconnue. Entre chronique policière et thriller, le film plonge le public dans une enquête qu’il mène contre son gré. Chaque découverte entraîne son lot d’horreurs. Pour contrecarrer cette noirceur, la complicité croissante entre Irena et Tea, la fillette dont elle a la charge, laisse espérer un avenir plus lumineux. Il faut avoir le cœur solide et les yeux audacieux pour suivre sans broncher cette chronique d’une descente aux enfers. Mais cela en vaut la chandelle car il est rare de voir un film si juste sur un tel juste, si ce n’est Chaos de Coline Serreau en 2001. Ennio Morricone a signé la bande originale de neuf des onze long-métrages que Giuseppe Tornatore a réalisé ou co-réalisé, dont celle de L’Inconnue.
Firouz Elisabeth Pillet

Death at a funeral


de Franck Oz, avec Matthew MacFadyen, Rupert Graves. Angleterre, 2007.

Le jour des funérailles du patriarche, famille et amis arrivent chacun avec leur dose de problèmes existentiels, d’angoisses, de colère retenue, de déceptions. Daniel, le fils, désireux de lire l’hommage à son père malgré la surprise générale de l’audience, va revoir son frère rival Robert, célèbre romancier parti vivre aux États-Unis. Martha, la cousine, veut à tout prix faire accepter à son père vieux-jeu son nouveau fiancé qui a accidentellement avalé une pilule hallucinogène dont l’effet dure quelques huit heures. Mais les vraies complications commencent lorsqu’un invité mystérieux, menace de dévoiler un terrible secret de famille... Daniel et sa joyeuse bande vont user de tous les stratagèmes pour enterrer le père... et ses confidences.
Présenté sur la Piazza Grande lors d’une soirée à la météo clémente, le dernier film de Franck Oz a séduit un public bigarré, ralliant diverses générations grâce à la finesse de son humour « so british » qui monte en crescendo tout au long du film. Death at a funeral a d’ailleurs remporté le Prix du Public, une valeur sure du Festival.

« Deat at a Funeral / Joyeuses funérailles »
© Metro Goldwyn Mayer (MGM)

Quel démiurge se cache derrière ce film ? Franck Oz qui est surtout connu pour son travail comme marionnettiste pour Le Muppet Show ou encore pour Star Wars, puisque dès le deuxième film sorti en 1980, Star wars : Episode V - L’Empire contre-attaque, il est la voix originale et l’homme qui se cache derrière Maître Yoda. Il reconnaît que son passé dans les marionnettes lui sert avec bonheur dans le registre de la comédie. L’homme est charmant, spontané, a le rire facile et une curiosité d’enfant. Tous les ingrédients sont réunis pour que Death at a funeral soit savamment dosé : de l’humour sans sombrer dans la caricature, des sujets critiques traités avec finesse, une galerie de portraits très élaborée et équilibrée où tous les personnages, même secondaires, ont leur rôle à jouer. Le film a été tourné en l’espace d’à peine sept semaines. Comme quoi, quand on est inspiré, le talent ne tarde pas à s’exprimer. Pourtant, à la veille de la projection sur la Piazza Grande, ce dimanche 5 août, le cinéaste redoute la réaction d’un public qu’il méconnaît : italien, français, allemand. Il craint que cet humour à la fois si subtil et décapant que savent si bien servir les Anglais ne déplaise. L’ovation du public après la projection l’a rassuré… Il n’en trouvait plus ses mots et a bafouillé un « thank you so much » ému.
Firouz Elizabeth Pillet