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Film de septembre 2010 : “L’Italien“

Olivier Baroux surprend avec L’italien, proposant une réflexion sur la tolérance, l’altérité...

Article mis en ligne le septembre 2010
dernière modification le 23 septembre 2011

par Firouz Elisabeth PILLET

L’Italien


de Olivier Barroux, avec Kad Merad, Valérie Benguigui, Roland Giraud, Guillaume Gallienne. France, 2010.

D’origine maghrébine, Mourad Ben Saoud mène deux vies en alternance. Depuis cinq ans, il prétend être Dino Fabrizzi, vendeur italien de Maserati ; par ce truchement d’identité, il espère être ainsi mieux intégré dans la société française en général, et plus particulièrement auprès de son employeur. Ce qu’il réussit. Pour ses parents, émigrés algériens établis à Marseille, et son frère cadet, il est responsable d’agence à Rome. Seule sa sœur Amel connaît son mensonge et commence à se lasser de ce double jeu. En tant que Dino Fabrizzi, il a bien réussi ; d’ailleurs, il est en passe de devenir le nouveau directeur de l’agence. Jusqu’au moment où son père tombe gravement malade, à seulement dix jours du Ramadan. Pour le soutenir, Mourad accepte de le faire à sa place. Il consulte un Iman et essaie de rafraîchir ses connaissances en islamologie qui commencent à dater un peu. L’Italien et l’Algérien doivent désormais cohabiter dans le même corps, au risque de déconcerter les proches et les amis… Jusqu’au jour où Mourad est découvert par son collègue et concurrent.

« L’Italien » de Olivier Barroux

Kad Merad tourne beaucoup, et souvent avec son acolyte de longue date, Olivier Barroux. On aime ou on déteste leur humour de potaches. D’abord tandem télévisuel, chacun a suivi sa route : Olivier comme écrivain, Kad comme l’acteur préféré de l’Hexagone, réalisant son rêve d’enfant, figurant dans de nombreux films. Le précédent film du duo, Safari, avait laissé pantois, tellement il était mauvais.
Donc, Kad Merad tourne beaucoup et exerce son métier le plus simplement du monde. Il ne lui reste plus maintenant qu’à dénicher les bons sujets. C’est bien là tout le problème du comédien. En seulement deux ans (depuis l’incroyable succès de Bienvenue chez les Ch’tis, de Dany Boon), Kad a participé à neuf longs métrages – Mes stars et moi, Safari, RTT, Protéger et servir... – dont peu ont marqué les esprits. Les inconditionnels de l’acteur ne lui en tiennent pas rigueur et espèrent le retrouver au sommet de l’affiche avec un film réussi, se souvenant de ses belles performances, récentes ou passées : Les irréductibles, Je vais bien ne t’en fais pas, Faubourg 36, Le Petit Nicolas.

« L’Italien »
© Eskwad

Olivier Baroux signe ici sa troisième mise en scène, après Ce soir je dors chez toi et Safari, qui n’avait donc pas convaincu. Il surprend avec L’italien, proposant une comédie bien interprétée et qui débouche sur une réflexion. Une réflexion sur la tolérance, sur l’acceptation de l’altérité, sur les préjugés et sur les idées préconçues, une réflexion bien nécessaire alors que la France se met en quête d’une identité nationale perdue.
L’histoire débute par une situation extrêmement rocambolesque, qui rappelle la condition de certains clandestins qui usurpent une identité pour trouver un logement, un travail, une situation… Une double identité qu’un journaliste allemand avait choisi d’emprunter en sens inverse, en devenant un ouvrier turc illégal en Allemagne du croyable (Günther Wallraf, Tête de Turc).

« L’Italien »
© Eskwad

Le film aurait pu enchaîner cliché sur cliché, sur les thèmes de l’immigration, de la tolérance, en passant par les valeurs familiales et professionnelles qui diffèrent selon chacun, selon ses origines culturelles. Tout en conservant un humour constant sans jamais sombrer dans les clichés faciles – alors que Mourad est refoulé en Algérie, n’ayant pas de passeport à son nom, on assiste à son interrogatoire par un officier algérien… Pour ceux qui connaissent, on se croirait sur place, le film explore les multiples facettes de l’immigration et les obstacles à franchir. Tous les acteurs sont convaincants, jusqu’aux rôles secondaires. Lors de la première à Marseille, Kad Merad peinait à dissimuler son émotion car l’histoire de Dino, c’est un peu celle de son père.
Guillaume Gallienne amuse en ami confident et artiste dans le vent ; le collègue raciste et enclin à la délation, Landrin – interprété par Philippe Lefebvre, déjà remarquable dans Mon idole et OSS 117 : Le Caire, nid d’espions – parvient à rendre son personnage détestable. La présence de Roland Giraud, encore une fois épatant en chef compréhensif et paternaliste, rappelle quel grand acteur il est ; l’acteur avoue d’ailleurs avoir accepter de jouer dans ce film par amitié. Valérie Benguigui épate en plantureuse fiancée. Bref, la dernière création de Kad et Olivier amuse, attendrit, émeut et convainc.

Firouz-Elisabeth Pillet