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Film de septembre 2009 : “Whatever Works“

Le Woody Allen millésime 2009 prouve que le réalisateur ne s’est pas assagi en revenant à ses premières amours, à savoir la comédie new-yorkaise.

Article mis en ligne le septembre 2009
dernière modification le 29 janvier 2012

par Jérôme ZANETTA

Whatever Works


écrit et réalisé par Woody Allen. USA 2009 1h32. Avec Larry David, Evan Rachel Wood, Patricia Clarkson, Ed Begley Jr, Conleth Hill, Michael Mc Kean.

New-York est-elle dotée d’un pouvoir magique ? Peut-on y conter des histoires si jouissives qu’elles semblent s’incarner comme dans aucune autre ville ? Sans aucun doute, sans quoi cet enfant terrible de la Big Apple ne serait pas revenu au bercail après quelques opus européens infidèles. Et bien, le millésime 2009 prouve que le Woody ne s’est pas assagi en revenant à ses premières amours, la comédie new-yorkaise bavarde et malicieuse en diable, avec ce qu’il faut de provocation mêlée d’une lucidité jubilatoire. Et en effet la magie opère, Woody Allen nous raconte un couple improbable – lui un génie en physique quantique vieillissant et pour le moins misanthrope et cynique, elle une jeune candide en short, légère et spontanée – qui va filer une romance dans un Brooklyn paisible et feutré. Le Brooklyn d’une terrasse de café de quartier qui met en scène un premier monologue d’anthologie, celui de Boris Yelllnikoff, parfait alter ego du réalisateur qui déroule sa vision du monde, des gens et de son histoire, en nous prenant à témoin, nous spectateurs sans réactions, incapables de réagir à la société telle qu’elle nous façonne. Le sens du jeu de Larry David rappelle qu’il n’est pas pour rien le créateur du sitcom Seinfeld. Pour sa part, il considère sa vie comme une succession d’éléments parfaits, mais qui, quels qu’en soient ses conséquences, le conduira six feet under et ne mérite qu’une chose, d’y mettre un point final. C’est ce qu’il a déjà tenté de faire quelques années auparavant, après avoir raté le prix Nobel, mais il a également raté son suicide. Cela lui aura permis de se libérer de son carcan petit-bourgeois new-yorkais, des codes sociaux si convenus et d’un mariage idéal insupportable !

« Whatever Works » de Woody Allen

Or, quand il tombe sur cette pauvre petite fraîche, charmante et écervelée, il daigne l’accueillir dans son appartement, malgré son dédain proverbial pour l’humanité. Tel un ange du cinéma de Capra ou une jeune provinciale chez Lubitsch, Melody va transformer le quotidien de Boris : le couple finit par se supporter car elle ne comprend pas la plupart des invectives qu’il profère et il adore s’écouter parler ! Ils finiront même par tomber amoureux l’un de l’autre, la novice est séduite par son Pygmalion. Mention spéciale pour Evan Rachel Wood qui nuance parfaitement son personnage. Jusqu’à l’arrivée des parents de Melody, qui nous vaut une scène délirante en présence de la mère, sudiste votant Bush et fervente adepte de la prière christique, que Boris et son entourage transformeront en artiste authentique, fanatique du narguilé et des joies de la polygamie. Le numéro de Patricia Clarkson est irrésistible. Quant au père, lui aussi pourra opérer un coming out tardif qui permet à Woody Allen une ultime salve sarcastique à l’endroit des USA et qui semble dire aux républicains transis Yes we can.
Mister Allen use d’un ton plus libre, plus juste et caustique que jamais, ses dialogues enlevés et précis révèlent un réalisateur toujours plus vert et bondissant, mais avec ce je ne sais quoi de poésie et de vitalité sensible qui rappellent les grandes heures des comédies hollywoodiennes. La magie d’une histoire d’amour racontée au cinéma par un admirateur du grand Houdini fonctionne toujours, pour notre plus grand plaisir. Alors, whatever works !

Jérôme Zanetta