Arts-Scènes
Slogan du site

Cinéma Danse Expositions Musique Opéra Spectacles Théâtre

Film de mars 2011 : “La ligne droite“

Avec La ligne droite, le réalisateur Régis Wargnier évoque son sport de prédilection, l’athlétisme.

Article mis en ligne le 1er mars 2011
dernière modification le 29 novembre 2011

par Firouz Elisabeth PILLET

La ligne droite


de Régis Wargnier, avec Rachida Brakni, Cyril Descours, Clémentine Célarié. France, 2010.

Après cinq années de prison, Leïla, une jeune Française d’origine maghrébine, retrouve la liberté. Elle doit prouver sa volonté de se réinsérer, en dénichant un contact de travail et un logement, afin de pouvoir peu à peu reprendre contact avec Souleï, son fils âgé de sept ans qui l’a à peine connue ; depuis son emprisonnement, Leïla a accepté de le donner à l’adoption en le confiant à son beau-frère. Ce dernier rechigne à laisser Leïla revoir son fils. Déchirée par cette situation, la jeune femme rencontre Yannick, un jeune athlète qui vient de perdre la vue dans un accident. Elle accepte de lui servir de guide moyennant rémunération, alors que le statut même de guide d’athlète est normalement bénévole !
La seule discipline que celui-ci peut pratiquer avec son handicap, c’est la course. Mais avec un guide, auquel il est attaché par un fil le temps de l’entraînement. Ce sera en l’occurrence une guide : Leïla, elle-même athlète de haut niveau dans sa vie d’avant.
Leïla se tait sur son passé. Yannick, étouffé par les marques de compassion de son entourage, va s’arranger de ce silence jusqu’au jour où il veut percer ce mutisme pour aller de l’avant, parvenir à franchir les obstacles, physiques et psychiques, reconstruire sa vie en allant vers cette inconnue qui l’attire, en la découvrant peu à peu par les sens, les mots et les émotions.

« La ligne droite » de Régis Wargnier

L’entraînement, et puis les projets de compétition vont les aider à se reconstruire, l’un avec l’autre. Leïla demeure inaccessible, secrète, farouche et parfois revêche.
Avec La ligne droite, le réalisateur Régis Wargnier parle de son sport de prédilection, car il est passionné d’athlétisme. De plus, ce n’est pas son coup d’essai en la matière puisque le cinéaste avait déjà réalisé un documentaire, Cœurs d’athlètes, dans lequel il brossait les portraits de trois champions.
Ainsi, Wargnier a profité de la réunion d’athlétisme de Paris/Saint-Denis 2010 et de la piste du Stade de France pour tourner la scène finale de son film La ligne droite. Quelques minutes avant la première course officielle de la soirée, le cinéaste a dirigé ses deux acteurs principaux lors du 400 mètres de la scène finale du film. Pour réussir cette scène, tournée en une seule prise, en direct et en public, les acteurs Cyril Descours et Rachida Brakni ont suivi une préparation spécifique à l’Institut National du Sport et de l’Éducation Physique avec 29 séances d’entraînement entre mars et juillet.
Tout au long de cette rencontre progressive qui se déroule sous nos yeux par touches successives, au rythme du petit prince apprivoisant le renard, les remparts psychologiques que Leïla et Yannick s’évertuaient à entretenir se fissurent peu à peu, laissant place à une effusion de sentiments qui submergent tant les protagonistes que le public. Tel un peintre impressionniste, Wargnier élabore son tableau dans des tonalités délicates, pondérées, subtiles, pour atteindre une catharsis qui entraîne les spectateurs à verser quelques larmes pudiques.

Le propos du film aurait pu conduire à un excès de mélodrame ou un pathos facile ; il n’en est rien. Tout est contenu dans une retenue délicate et sonne juste, grâce au jeu parfait et troublant de véracité des deux comédiens : Rachida Brakni, Madame Eric Cantona à la ville, et Cyril Descours, au talent fort prometteur, découvert dans Complices de Frédéric Mermoud.
Régis Wargnier nous propos avec cette ligne droite une bulle d’oxygène qui rehausse le niveau des films français sortis récemment, lesquels semblent se délecter des niaiseries de mauvais goût, tel le dernier opus d’Eric et Ramzy, Halal police d’État. Bref, si un soupçon d’hésitation devant les propositions en salles devait se manifester, optez sans hésiter pour le dernier Wargnier !

Firouz-Elisbeth Pillet