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Film de mai 2011 : “Je n’ai rien oublié“

Le sujet, Alzheimer, est sérieux, mais la mise en scène manque de force et le scénario de légèreté...

Article mis en ligne le 1er mai 2011
dernière modification le 29 janvier 2012

par Firouz Elisabeth PILLET

Je n’ai rien oublié


de Bruno Chiche, avec Gérard Depardieu, Alexandra Maria Lara, Françoise Fabian, Niels Arestrup, Yannick Renier, et avec la participation de Nathalie Baye. France, 2010.

Depuis des années, Conrad Lang vit aux crochets de la riche famille Senn, d’abord camarade d’enfance de Thomas, puis gardien de leur maison de vacances à Trouville ; la famille l’utilise comme bon lui semble et lui s’en contente. Mais un jour, il met le feu à leur maison de campagne. Les Senn se sentent contraints de l’héberger chez eux. Mais lorsque son état de santé se dégrade, lorsqu’il se met à raconter à Simone, jeune épouse de l’héritier Senn, des souvenirs d’enfance qui ne collent pas tout à fait à l’histoire officielle de la famille, Elvira, la matriarche, se montre étrangement menacée. Comme si ce vieux fou inoffensif portait en lui les moyens de la détruire et d’effriter la bienséance des apparences. C’est alors qu’entre Conrad et Simone va naître une amitié étrange, amenant la jeune femme à faire face, pour le bien-être, voire la sauvegarde de Conrad, à une Elvira bien plus dangereuse qu’il n’y paraît.

« Je n’ai rien oublié » de Bruno Chiche

Ceux qui avaient été dépités par la prestation pathétique de Gégé dans Mamouth peuvent se rassurer : Gérard Depardieu revient en forme et donne une touche attendrissante à Conrad, en proie à des pertes de mémoire immédiate mais qui distille avec moult détails les souvenirs enfouis du passé… au grand dam de la maîtresse de maison, Elvira, qui imagine de nombreux stratagèmes pour mettre un terme à ce danger potentiel.

Abordant le sujet crucial de la maladie d’Alzheimer, le film se déroule dans le monde guindé de la bourgeoisie où les non-dits sont de mise. Autour de la maîtresse de maison, le réalisateur a réuni une belle palette d’acteurs qui apportent tous un élément fondamental à ce puzzle pervers fait de domination. Mais quand il s’agit de la relation d’amitié entre Conrad et la charmante belle-fille, Simone, le film devient pétri de tendresse. Tendresse lorsque ceux qui l’aiment prêtent une oreille attentive à ses souvenirs, qu’il conte avec exactitude ; comme Elisabeth, l’ex-femme du fils de famille Thomas, que Conrad a toujours secrètement aimée ; et Simone, la jeune épouse du fils de Thomas.

Ce troisième long métrage de Bruno Chiche s’inscrit dans le genre thriller familial, évoluant dans des décors ouatés et calfeutrés pour mieux étouffer les velléités de vérité. Ce film d’ambiance, où chacun donne sa réplique, n’est pas sans rappeler les drames bourgeois de feu Chabrol, mais n’égale en rien ceux du maître, car manquant sérieusement de méchanceté et de perversité. Adaptée du premier roman de Martin Suter, Small World (Editions Christian Bourgois), cette satire au vitriol de la bourgeoisie et de ses sales magouilles est aussi une étude romanesque de la maladie d’Alzheimer. Malgré un casting clinquant, le film pêche par la faiblesse de la mise en scène et la lourdeur du scénario qui surligne les non-dits, pourtant très visibles pour les spectateurs. Bref, on sort de la séance avec le sentiment d’avoir été trompé par les promesses du film.

Firouz-Elisabeth Pillet