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Film d’avril 2011 : “Une pure affaire“

Alexandre Coffre croque un portrait social de la couche moyenne, entre comédie sociale et polar.

Article mis en ligne le avril 2011
dernière modification le 26 août 2011

par Firouz Elisabeth PILLET

Une pure affaire


de Alexandre Coffre, avec Pascale Arbillot, François Damines. France, 2011.

David Pelame a la quarantaine et vit dans une maison de banlieue avec femme et enfants. Marié à Christine depuis vingt-et-un ans, le temps d’oublier leur passion initiale, le couple vit au rythme monotone du train-train quotidien, essayant d’inculquer des valeurs de respect des lois et de droiture à leurs deux enfants, une fille ado et rebelle, et son petit frère d’une douzaine d’années, avec lesquels la communication est devenue sporadique et douloureuse.
Professionnellement, David n’est jamais devenu le grand avocat associé d’un cabinet de renom qu’il rêvait d’être, mais plutôt un simple gratte-papier qui excelle dans les tâches secondaires les plus rébarbatives. Bref, la vie de David n’a rien d’idyllique jusqu’au soir où, promenant le chien, il découvre un sac plein de sachets de cocaïne. Signe du destin ou providence que ce sac tombé du ciel le soir de Noël, une valise pleine de cocaïne et un téléphone croulant sous les appels de clients. David pense alors avoir trouvé le moyen de relancer sa vie en épongeant les dettes de sa famille et offrant à chacun de ses membres le petit luxe qui allègerait leur quotidien : un solarium pour Madame, une voiture de sport pour Monsieur, des jeux vidéo et tout un appareillage informatique pour la jeune génération.

« Une pure affaire » de Alexandre Coffe
© Mont-Blanc films

La comédie à la française est un genre tellement galvaudé et malmené que les spectateurs ont fini par perdre tout espoir pour son avenir. Entre succès populaire et communautaristes à la Dany Boon – son récent Rien à déclarer ne réalise pas les entrées escomptées après la déferlante des Ch’tis - et délire potache, voire trivial, version Michael Youn, difficile de se faire une petite place dans ce genre qui a connu son heure de gloire au temps de René Clair, Jean Renoir, Michel Audiard comme réalisateurs ou Louis de Fuinès, Bourvil, Fernandel comme acteurs. Certains sortent du lot, comme Le Nom des gens, récemment primé aux Césars pour la qualité de son scénario.
Pour son premier long métrage, l’ancien réalisateur de publicités Alexandre Coffre quitte le côté tape-à-l’œil et clinquant des spots publicitaires bien que cette forme corresponde à sa source d’inspiration, la nouvelle Poudre de l’anglais Matthew Kneale. Pour réaliser cette alchimie entre comédie sociale et polar, Alexandre Coffre croque un portrait social de la couche moyenne, mise à mal par la crise sociétale et financière, brossant le portrait affligeant du couple de la classe moyenne. Doté d’un scénario intelligent et raffiné, et servi par des personnages emplis de nuances et de subtilité – incarnés par des acteurs jubilatoires, y compris dans les rôles secondaires : Gilles Cohen, de la Comédie française, en malfrat dealer ; Laurent Lafitte en collègue prompt à la délation ; Didier Flamand en grand-père surprenant – cette première réalisation d’Alexandre Coffre nous réconcilie avec la comédie à la française. Les dialogues corrosifs s’enchaînent, laissant peu de répit aux spectateurs, et ils sont agrémentés par une succession de situations cocasses et de quiproquos rocambolesques. François Damiens s’en donne à cœur joie dans un monologue – la création d’une message téléphonique, pour lequel il a pu se laisser aller à l’improvisation qui lui est chère – aux côtés d’une Pascale Arbillot, superbe au milieu d’une distribution magnifique, enfin utilisée à sa juste valeur. Les répliques font mouche à chaque fois et régalent les spectateurs.

Firouz-Elisabeth Pillet