Arts-Scènes
Slogan du site

Cinéma Danse Expositions Musique Opéra Spectacles Théâtre

Film d’avril 2008 : “There Will Be Blood“

Paul Thomas Anderson explore des territoires où le cinéma ne nous emmène pas très souvent.

Article mis en ligne le avril 2008
dernière modification le 3 mars 2012

par Philippe BALTZER

There Will Be Blood


De Paul Thomas Anderson (USA, 2007) avec Daniel Day-Lewis, Paul Dano.

Un homme seul et hirsute creuse fiévreusement un trou avec des outils rudimentaires dans une terre inhospitalière. Les quinze premières minutes du film de Paul Thomas Anderson sont muettes. On suit, hypnotisé, le travail de forage frénétique d’un homme, puis d’un petit groupe de prospecteurs de pétrole. Nous sommes quelque part en Californie dans les années 1920, la deuxième ruée vers l’or, celle de l’or noir, vient de débuter. Les pionniers du capitalisme sont à pied d’œuvre, Daniel Plainview est de ceux-là. Animé par une formidable soif de réussite et habité par une haine de son prochain hors du commun, il bâtit avec acharnement un empire pétrolier au mépris de toute morale ... avant de sombrer dans la folie. Au même moment, sur ces mêmes terres arides, un contre-pouvoir tout aussi inquiétant s’installe dans la vallée : Paul Sunday, un prêcheur fanatique convertit ses brebis à l’obscurantisme religieux....

« There Will Be Blood »
Crédit photo Walt Disney Studios Motion Pictures France

Avec ce grand western « pré-dallasien », Paul Thomas Anderson nous livre une sorte de « Pierre de Rosette » de l’inconscient collectif américain ; la fable tragique « du dollar et du goupillon » (Télérama) auquel il convient d’ajouter la valeur travail (souvent dans la glaise) et une famille peu enviable. Bref des territoires où le cinéma ne nous emmène pas très souvent.

Une mise en scène splendide, une audace formelle rare, une photographie superbe et inventive, des décors grandioses et les quelques « rift » de guitares dus à Jonny Greenwood de « Radiohead » sont autant de qualités à mettre à l’actif de cette fresque âpre et quasi biblique. Mais tout cela ne serait rien sans la magistrale et double performance de Daniel Day-Lewis (le prospecteur Plainview) et Paul Dano (le prêcheur Sunday). L’affrontement sublime et bestial de ces deux personnages magnifiquement servis par des acteurs hors du commun, justifie à lui seul la vision de ce film ... et méritait bien un Oscar pour l’acteur irlandais.

Après les très prometteurs Boogie Nights et Magnolia, et le sympathique Punch-Drunk Love, le jeune réalisateur américain (37 ans !) vient de faire son entrée dans la cour des grands.
Certains parlent déjà d’un nouvel Orson Wells ...

Philippe Baltzer